Déclaration de François Mitterrand après sa défaite à la présidentielle
19 mai 1974
07m 37s
Réf. 00281
Notice
Résumé :
Au soir du second tour de l’élection présidentielle anticipée des 5 et 19 mai 1974, après une campagne brève et passionnée, François Mitterrand doit reconnaître sa défaite. Elle est courte donc frustrante mais aussi porteuse de promesses tant la gauche semble désormais proche du pouvoir. C’est ce que veut prioritairement retenir le candidat battu.
Type de média :
Date de diffusion :
19 mai 1974
Source :
ORTF
(Collection:
Soirée électorale : élection présidentielle 2ème tour
)
Personnalité(s) :
Thèmes :
- L'Homme politique > L'élu de la Nièvre > Maire de Château-Chinon
- L'Homme politique > L'opposant > à Valéry Giscard d'Estaing
- L'Homme politique > Le candidat aux élections présidentielles > 1974
- L'Homme politique > Le dirigeant politique > PS
- L'Homme politique > Le dirigeant politique > Union de la Gauche
- L'homme privé > Les lieux > Le Morvan
Éclairage
Le décès de Georges Pompidou le 2 avril 1974 entraîne une présidentielle anticipée. François Mitterrand, premier secrétaire du PS soutenu par le PCF, arrive nettement en tête (43,2 %) au soir du premier tour devant les candidats d’une droite divisée (32,6 % pour Valéry Giscard d’Estaing et 15,1 % pour Jacques Chaban-Delmas). Après un entre-deux-tours tendu et incertain, notamment marqué par un débat entre les deux candidats encore en lice, il subit, le 19 mai, une courte défaite face à Valéry Giscard d’Estaing (élu avec 50,8 %).
Prenant la parole tard dans la soirée – au vu de l’étroitesse de la marge, le résultat a tardé à se préciser –, il livre une courte déclaration où il remercie ses électeurs, s’incline devant le suffrage universel et adresse des vœux de succès à son adversaire. Cependant, en fustigeant, dans une formule typique de la façon dont la gauche conçoit alors le combat électoral, « une formidable coalition du pouvoir en place et des forces de l’argent », il souligne l’ampleur de la déception, sinon de la rancœur, qui l’anime, lui comme ceux qui le soutiennent.
Mais, en se projetant résolument vers l’avenir, il tient surtout à présenter ce scrutin comme une étape vers « une victoire inéluctable ». A juste titre car si cette élection est sans doute venue un peu trop tôt pour qu’il puisse l’emporter, elle traduit la dynamique favorable qui s’est installée après qu’il a pris la tête du Parti socialiste en juin 1971 puis signé, un an plus tard, un programme commun de gouvernement avec les communistes. Depuis, le PS, en grave crise en 1968-1969, enregistre de nombreuses nouvelles adhésions, voit la gauche se rééquilibrer à son profit et celle-ci apparaît donc désormais aux portes du pouvoir.
Après cette défaite, frustrante mais pleine de promesses, du printemps 1974, le mouvement, qui connaît là un renforcement décisif, se poursuit comme l’espérait et l’annonçait François Mitterrand. Les cantonales de 1976 et les municipales de 1977 sont ainsi des triomphes pour la gauche et plus particulièrement pour le PS. La rupture de l’union entre socialistes et communistes entraîne toutefois un échec inattendu lors des législatives de 1978. Ce n’est pourtant là qu’un contretemps supplémentaire. En mai 1981, après moult nouvelles péripéties, François Mitterrand prend sa revanche sur Valéry Giscard d’Estaing et entre à l’Elysée.
Prenant la parole tard dans la soirée – au vu de l’étroitesse de la marge, le résultat a tardé à se préciser –, il livre une courte déclaration où il remercie ses électeurs, s’incline devant le suffrage universel et adresse des vœux de succès à son adversaire. Cependant, en fustigeant, dans une formule typique de la façon dont la gauche conçoit alors le combat électoral, « une formidable coalition du pouvoir en place et des forces de l’argent », il souligne l’ampleur de la déception, sinon de la rancœur, qui l’anime, lui comme ceux qui le soutiennent.
Mais, en se projetant résolument vers l’avenir, il tient surtout à présenter ce scrutin comme une étape vers « une victoire inéluctable ». A juste titre car si cette élection est sans doute venue un peu trop tôt pour qu’il puisse l’emporter, elle traduit la dynamique favorable qui s’est installée après qu’il a pris la tête du Parti socialiste en juin 1971 puis signé, un an plus tard, un programme commun de gouvernement avec les communistes. Depuis, le PS, en grave crise en 1968-1969, enregistre de nombreuses nouvelles adhésions, voit la gauche se rééquilibrer à son profit et celle-ci apparaît donc désormais aux portes du pouvoir.
Après cette défaite, frustrante mais pleine de promesses, du printemps 1974, le mouvement, qui connaît là un renforcement décisif, se poursuit comme l’espérait et l’annonçait François Mitterrand. Les cantonales de 1976 et les municipales de 1977 sont ainsi des triomphes pour la gauche et plus particulièrement pour le PS. La rupture de l’union entre socialistes et communistes entraîne toutefois un échec inattendu lors des législatives de 1978. Ce n’est pourtant là qu’un contretemps supplémentaire. En mai 1981, après moult nouvelles péripéties, François Mitterrand prend sa revanche sur Valéry Giscard d’Estaing et entre à l’Elysée.
Antoine Rensonnet
Transcription
Michel Péricard
Daniel Grandclément, vous ne nous entendez pas ?Daniel Grandclément
Voilà !Michel Péricard
Allez, je vous entends maintenant.Daniel Grandclément
Eh bien, François Mitterrand est toujours à l’Hôtel du Vieux Morvan, il n’a pas encore, il n’est pas encore arrivé à la Mairie, nous ne le voyons pas mais c’est par là qu’il va sortir tout à l’heure. Je pense que ça sera dans une ou deux minutes maintenant au maximum, de toute façon, nous vous rappellerons.Michel Péricard
Eh bien, écoutez, je crois qu’au moment où nous parlions, il me semble avoir vu, je n’ai pas rêvé, non ? Il me semble avoir vu la porte. Et voilà, la porte s’ouvre. La porte s’ouvre et Monsieur Mitterrand sort. Daniel Grandclément,Daniel Grandclément
Oui ?Michel Péricard
À vous.Daniel Grandclément
Écoutez, il va traverser la place qui est devant l’hôtel maintenant, la Mairie est à une centaine de mètres de l’Hôtel du Vieux Morvan, je pense qu’il sera là dans une minute. Vous voyez les journalistes qui le précèdent et l’accompagnent. Il est seul, Madame Mitterrand est restée à l’hôtel. Voilà, vous allez le voir, maintenant, je pense qu’il sera là d’ici 30 à 40 secondes, il y a un escalier, nous sommes au premier étage de la Mairie et je pense que nous allons entendre du bruit, nous allons le voir arriver vraiment d’un moment à l’autre.Michel Péricard
Et bien entendu alors, nous restons en liaison avec vous car nous attendons la déclaration de Monsieur François Mitterrand. Nous l’avons très bien vu sortir et traverser les quelques mètres qui séparent l’Hôtel du Vieux Morvan, voilà un hôtel qui aura eu sa publicité ce soir, et la Mairie,Daniel Grandclément
J’entends du bruit dans l’escalier, je crois qu’il arrive. Le voilà maintenant, les journalistes le précèdent, il y a énormément de journalistes ici, 50 ou 60. Il est seul, personne ne l’accompagne. Voilà, il va faire donc cette déclaration sur la même table qui a servi au dépouillement tout à l’heure, cette grande table verte de la Mairie de Château-Chinon. Voilà, il y a beaucoup de bruit, un brouhaha, il apparaît,(Bruit)
Daniel Grandclément
Monsieur Mitterrand réclame quelques précisions, c’est le résultat des scrutins.(Bruit)
Daniel Grandclément
Et il se concentre avant sa déclaration.(Bruit)
Daniel Grandclément
Et il demande quelques ultimes précisions. Michel Péricard, François Mitterrand vous demande les chiffres exacts.Michel Péricard
Je vais vous les donner, Monsieur, les derniers chiffres que nous ayons, mais ce ne sont pas, ce n’est pas terminé, c’est 12 669 786 voix pour Monsieur, 700, pardon, décidément, je n’arrive pas à lire ce 7. 12 669 786 voix pour Monsieur Mitterrand.Daniel Grandclément
12 669 000 voix pour vous, Monsieur Mitterrand. Et en pourcentage Michel Péricard, exactement.Michel Péricard
En pourcentage, 49,31.Daniel Grandclément
En pourcentage…, oui,François Mitterrand
Mesdames et messieurs, s’il vous plaît, je voudrais vous donner connaissance d’une déclaration que j’adresse aux Français dans leur ensemble, et particulièrement à ceux qui ont voté pour moi. À l’heure présente, le résultat de l’élection présidentielle semble acquis. Le suffrage universel est notre loi, sa décision s’impose à tous. Je souhaite au prochain Président de la République d’accomplir sa mission en préservant ce qui fait l’essentiel de notre communauté nationale. Je remercie les 12 millions et 600 à 700 000 Françaises et Français qui en se comptant sur mon nom ont réalisé le plus grand rassemblement de notre histoire contemporaine sur les idéaux de la Gauche. Je mesure leur tristesse à la dimension de leur espoir. Qu’ils gardent foi dans la cause qu’ils servent, Grâce à eux, en ce jour du 19 mai 1974, quelque chose vient de commencer qui ne s’arrêtera pas de sitôt. Une formidable coalition du pouvoir en place et des forces de l’argent a contenu d’extrême justesse le mouvement populaire. Amis de France et d’Outremer, je vous demande de rester unis et de partager ma résolution. Notre combat continue parce que vous représentez le monde de la jeunesse et celui du travail, votre victoire est inéluctable.(Bruit)