Portrait de Pierre François
- Vitesse de lecture: 1 x (normal)
Infos
Résumé
Pierre François, « peintre décorateur » sétois, a travaillé sur une multitude de supports. Son art très personnel s’exerce également sur les enveloppes de la Poste, lettres officielles ou correspondance privée. Le facteur et le receveur de Mèze parlent de ce courrier original qu’ils réceptionnent et distribuent volontiers, même si l’adresse n’est pas toujours très lisible !
Date de publication du document :
21 déc. 2022
Date de diffusion :
19 mars 1996
Éclairage
- Contexte historique
- Articles utilisant cette vidéo
- Parcours thématiques
Informations et crédits
- Type de média :
- Type du document :
- Collection :
- Réalisateur :
- Source :
- Référence :
- 00127
Catégories
Thèmes
Lieux
Personnalités
Éclairage
Éclairage
- Contexte historique
- Articles utilisant cette vidéo
- Parcours thématiques
Contexte historique
ParDocteur en sociologie
Dans la cohorte des artistes sétois, Pierre François représente la lignée des autodidactes guidés par leur imagination et leur fantaisie, qui multiplient les expériences et que ne freine aucun conformisme hérité. Son attachement à sa ville de naissance l’a peut-être confiné dans un cercle restreint d’admirateurs, mais il est cependant reconnu par la critique comme un talent original. L’une de ses caractéristiques essentielles est de s’exprimer sur une grande variété de supports, des dessins de presse aux décors de théâtre, en passant par les pochettes de disques, les illustrations de livres ou les affiches. Il utilise aussi systématiquement les matériaux de récupération, les objets du quotidien délaissés qu’il habille en œuvres d’art : c’est pourquoi il se définit volontiers comme peintre décorateur
. Cette dispersion nuit peut-être à sa reconnaissance institutionnelle, mais elle est sa véritable signature.
Parmi ces multiples aventures graphiques, la vidéo met ainsi en lumière son usage particulièrement original des simples enveloppes postales qui crée un lien personnel avec ses correspondants – ainsi qu’avec les facteurs ! Des courriers officiels bénéficient de ce procédé : J’ai détourné l’obstacle qui pourrait être une corvée, quelle qu’elle soit, en un jeu, et j’ai plaisir à le faire, sinon je n’écrirais pas…
[1]. C’est en même temps une affirmation en acte que l’art n’est pas enfermé dans des espaces réservés, et plus encore que l’acte artistique est un plaisir, un jeu.
Sans formation artistique initiale, vivant de petits métiers, Pierre François peint pour le plaisir, même lorsqu’il lui arrive, l’expérience et la renommée venant, de travailler sur commande, comme pour la décoration de la salle Victoire des musiques actuelles à Montpellier, ou celle du Muséobus de l’Hérault pour le Département. Cette disponibilité l’a mis en phase avec ce que son environnement régional mettait à sa disposition. Pierre François a pleinement vécu l’époque d’effervescence politique et culturelle qu’ont été les années 1960-1980, auprès de créateurs qui lui ont permis de s’exprimer en participant activement à deux mouvements voisins. Celui du théâtre engagé d’André Benedetto en Avignon, avec sa salle des Carmes, qui entre rapidement en conflit avec le festival officiel, et lance l’alternative du festival off sur la base de ruptures politiques et de revendications décentralisatrices. François participe au mouvement en peignant des décors et des affiches pour les spectacles de Benedetto. Parallèlement, son amitié avec le poète sétois Yves Rouquette, son contemporain, l’entraine dans la révolution régionaliste
, dans une conjoncture culturelle particulièrement favorable, qui voit alors fleurir la production littéraire d’oc, la troupe de théâtre de Claude Alranc, et la nouvelle chanson occitane avec Marie Rouanet, autant d’occasions de manifester son talent de décorateur et d’illustrateur.
Pierre François disparait en 2007, à 72 ans ; deux ans avant André Benedetto, alors qu’Yves Rouquette meurt en 2015. Ce sont trois témoins majeurs d’une Occitanie agitée et fébrile, d’une grande effervescence créatrice, et qui peut aujourd’hui paraître bien lointaine. Pourtant, le peintre survit pleinement à Sète, comme source d’inspiration pour la génération de la figuration libre
(Combas, Di Rosa, Biascamano…) ainsi que dans cette institution si proche de sa philosophie qu’est le MIAM, le Musée international des arts modestes. … Je suis un peintre réaliste. Les gens s’y retrouvent assez bien.
disait Pierre François avec raison.
[1] Dans un court métrage de témoignages, réalisé par sa fille Isabelle François, sur le site dédié au peintre : http://www.pierre-francois.com/pierre-francois-le-film/
Remerciements à Isabelle François.
Transcription
(Cliquez sur le texte pour positionner la vidéo)
Bertrand Lefebvre
Allez, nous allons à Sète, rejoindre un artiste qu’on aime bien, Pierre François.
Emmanuel Watremez
Alors c’est un peintre actuellement, auparavant il a fait plein de métiers, il a exercé plein de métiers puisqu’il a été ostréiculteur, il a été cuistot, il a été aussi peintre de plafonds, il a fait plein de choses.Mais alors, surtout donc, la peinture mais depuis qu’il est tout petit, il adore envoyer des courriers, enfin des courriers très personnalisés, très décorés.Chez les Anglo-Saxons ça s’appelle le « mail art » c’est-à-dire c’est cet art qui tourne autour des enveloppes.En France ça n’a pas de nom encore, donc…
Bertrand Lefebvre
On ne l’appelle pas.
Emmanuel Watremez
On ne l’appelle pas.Mais il a fait une expo à Mèze le mois dernier.On a été lui rendre visite.Une expo où il avait récupéré toute une série d’enveloppes qu’il avait envoyées à des amis pour montrer un petit peu ce que c’est.Il y a aussi un concours qui a été ouvert aux scolaires.Pour présenter justement un petit peu ce mode d’expression qui est très particulier, c’est donner une vie un peu plus importante à ces contenants.
Bertrand Lefebvre
Des enveloppes qui ont souvent la vie dure.
Emmanuel Watremez
Voilà, on va à Mèze tout de suite.
(Musique)
Pierre François
Je ne sais pas si j’ai assez timbré.
Postière
Très bien, on va regarder.C’est vous qui faites tout ça ?Toutes ces enveloppes, tous ces timbres ?
Pierre François
Ouais, depuis que je suis bébé.
Postière
Ah oui ?(rires)
Pierre François
Quand j’écrivais à ma maman en colonie de vacances.J'ai commencé à lui faire des petits mots comme ça avec de la couleur sur l’enveloppe.Alors elle m’avait répondu que c’était rigolo et que c’était bien et que… Continue mon petit (rires).
(Bruit)
Pierre François
Tout gamin dans mon quartier, c’était des artisans peintres qui mélangeaient les couleurs.Et quand ils font des essais de couleur, ils les font toujours sur le mur de la façade quoi, pour vérifier si le bleu est bien bleu, le rose bien rose et après de temps en temps ils refilent un coup de blanc.Pour moi, c’était ça la magie.Je veux dire, c’était ça la peinture.Quelques couleurs qui embellissent la vie et qui sont changeantes, et quand il y en a marre on refile un coup de blanc et on repart à zéro.
(Musique)
Emmanuel Watremez
Pas un jour sans que le peintre expédie l’une de ses missives par la Poste.Pierre François communique beaucoup par écrit.Bien sûr ses lettres passent difficilement inaperçues dans la masse du courrier.
Michel Arnaud
Des fois on cherche l’adresse, comme là par exemple bon… Des fois elle se perd un peu dans les dessins. Mais bon, quand même dans l’ensemble,on arrive à se dire, on perd peut-être 10 secondes, mais on ne perd pas du temps.Moi, ça m’amuse !
Emmanuel Watremez
Si aujourd’hui, la correspondance particulière ne représente plus que 15 % de l’ensemble du courrier, Pierre François maintient la tradition de l’homme de lettres.Peinture, collage et calligraphie ne sont pas réservés uniquement à ses amis.
Pierre François
Quand j’écris à mon inspecteur à la Sécurité sociale, quand j’écris à mon avocat, quand j’écris à mon médecin, je lui fais des petits dessins dans la marge.Et à mon inspecteur des impôts également, pas de problème.
Emmanuel Watremez
L’écrivain privé s’amuse aussi avec les timbres, il les détourne, les repeint, les gribouille quand il ne les invente pas carrément.Son courrier saute toujours la barrière de l’affranchissement sans aucune difficulté.
Claude Vassalo
C’est pas un faussaire, c’est un inventeur de timbre.Donc en ce sens on a affaire à un artiste mais on n’a pas affaire à un faussaire.Il met beaucoup de temps pour faire une création artistique au point de vue timbre-poste, donc ce n’est pas à la portée de tout le monde.
Emmanuel Watremez
Ses envois restent rarement lettre morte, beaucoup de destinataires ont pris le pli et lui retournent les enveloppes personnalisées.Pierre François entretient une trentaine de correspondances régulières qui occupent une grande place dans sa vie.
Pierre François
Si on regarde bien les choses, je pense que honnêtement, je crois que c’est ce que je fais de mieux et d’essentiel, parce que c’est absolument désintéressé.Et puis peut-être que si on réfléchit encore mieux, les œuvres, quand on dit les œuvres c’est-à-dire les choses qui sont dans le droit fil de votre sincérité, ça ne doit pas dépasser votre écriture quoi, je veux dire ce n’est pas au niveau de la planète quoi.C’est peut-être quand c’est réduit que ça raconte beaucoup de choses.
Emmanuel Watremez
Domicilié rue Jean Vilar, l’artiste épistolaire répond systématiquement à toutes les lettres qui lui sont adressées aussi nombreuses soient-elles, il n’est jamais à court de faux timbres pour envoyer ses messages.
(Musique)
Sur les mêmes thèmes
Sur les mêmes lieux
Date de la vidéo: 19 sept. 2004
Durée de la vidéo: 01M 43S
Journées du patrimoine au chantier de l'association Voile latine
Date de la vidéo: 30 déc. 1967
Durée de la vidéo: 06M 31S
Les différentes étapes du lancement d'un chalutier
Date de la vidéo: 16 avr. 2014
Durée de la vidéo: 03M 15S
Les grands voiliers et les vieux gréements font escale
Date de la vidéo: 09 nov. 1970
Durée de la vidéo: 05M 43S