Discours du 11 mars 1969
Notice
Le général de Gaulle s'adresse aux Français pour présenter son double projet de création des régions et de réforme du Sénat, projet qu'il soumet à leur vote par voie de référendum, le 27 avril.
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Éclairage
Depuis le 24 mai 1968, on sait que le général de Gaulle envisage un référendum dont le double objet serait de renouveler sa légitimité ébranlée par la crise de 1968, et dont il ne considère pas que le succès de la majorité aux élections législatives peut tenir lieu, et de recevoir du peuple un mandat destiné à marquer l'approbation du suffrage universel au projet de participation qui constitue désormais le thème majeur de la politique suivie. Si depuis la formation du gouvernement au début de l'été 1968, le ministre d'Etat chargé des réformes administratives Jean-Marcel Jeanneney est en charge du projet, la volonté du général de Gaulle de faire voter non une loi-cadre, mais un texte précis, a considérablement allongé les délais de préparation, le Président contrôlant étroitement chaque article, voire tenant la plume pour le rédiger lui-même. Ce n'est donc pas dans la foulée des élections victorieuses que le texte est proposé aux Français, mais le 27 avril 1969 sous la forme de deux textes liés portant sur l'organisation des pouvoirs publics (thème nécessaire à l'organisation d'un référendum) et consacrés l'un à l'organisation régionale, l'autre à la réforme du Sénat.
La décision d'organisation du référendum a été annoncée le 19 février. Le 11 mars, le général de Gaulle s'adresse aux Français dans une allocution radio-télévisée moins pour exposer le détail de projets complexes et juridiques que pour définir leur signification et inciter les Français à les approuver dans un contexte où se font jour des oppositions violentes contre l'inflation, le refus du gouvernement de consentir des hausses de salaires et de pratiquer une dévaluation pour restaurer la compétitivité des entreprises françaises, mais aussi, venues du patronat, des milieux politiques et même de la majorité, des réserves sur la politique de participation.
Or c'est précisément autour de celle-ci que le Général organise son allocution après avoir rappelé que la crise de mai a failli compromettre l'oeuvre de redressement national entreprise et réussie par la Vème République et accusé la contestation renaissante de préparer une seconde offensive contre la stabilité du pays qu'il se déclare résolu à défendre. Se présentant comme le champion de la réforme raisonnable face aux conservateurs comme aux agitateurs, il estime une fois de plus que seule la participation constitue une réponse pertinente aux aspirations de la population. Montrant qu'elle est en cours d'instauration à l'Université et qu'elle fera l'objet d'une loi pour les entreprises, il présente le projet soumis à référendum comme l'extension du principe à l'organisation de l'Etat. C'est ainsi que seront constituées des régions où siégeront côte à côte élus locaux et représentants des forces économiques et sociales afin de suivre les projets de développement de chacune d'entre elles et que le Sénat sera réformé pour accueillir, à côté des élus, des membres désignés par les organisations représentatives du travail, de l'économie et de la culture. Si le Général ne dit pas clairement que le nouveau Sénat perdra son rôle délibératif, il le suggère implicitement en déclarant qu'il sera saisi le premier de tout projet pour avis et amendement. En d'autres termes, il devient une extension du Conseil économique et social et perd son rôle de seconde Chambre, ce qui provoquera la protestation des élus locaux, électeurs des sénateurs.
Affirmant l'homogénéité des deux projets dont l'essentiel réside dans l'association des organismes économiques et sociaux à l'examen des textes législatifs (par quoi il espère les détourner des revendications catégorielles), il fait appel aux Français afin qu'ils soutiennent un projet dont le Chef de l'Etat considère qu'il renforcera le progrès et écartera le bouleversement.