Hippolyte et Aricie de Rameau au Festival d'Aix-en-Provence

16 juillet 1983
04m 36s
Réf. 01007

Notice

Résumé :

A Aix-en-Provence, on répète le premier chef d'œuvre lyrique de Jean-Philippe Rameau : Hippolyte et Aricie. Entre quelques images de répétitions, le metteur en scène Pier Luigi Pizzi parle du style baroque, le chef d'orchestre John Eliot Gardiner évoque la difficulté de jouer Rameau en renouant avec les instruments d'époque et Jessye Norman, interprète de Phèdre, fait part de ses impressions.

Date de diffusion :
16 juillet 1983
Source :

Éclairage

Les opéras de Jean-Philippe Rameau ont connu une éclipse de plus d'un siècle, et s'ils ont été redécouverts par quelques pionniers au début du XXe siècle, ce n'est vraiment que dans l'après-guerre qu'ils ont retrouvé progressivement le chemin des scènes. Dans ce processus, le chef anglais John Eliot Gardiner a joué un rôle important. Et la production d'Hippolyte et Aricie qu'il a dirigée en 1983 au Festival d'Aix-en-Provence constituait une date majeure dans la réhabilitation des opéras de Rameau.

Hippolyte et Aricie est la première tragédie lyrique du compositeur, qu'il crée en 1733 à l'Académie Royale de Musique, à l'âge de 50 ans. Fort de sa connaissance de l'harmonie et de l'orchestration, disciplines qu'il a étudiées de manière approfondie et scientifique, Rameau compose d'emblée un chef d'œuvre avec cet ouvrage empli d'une musique riche, expressive et complexe, à tel point que l'on dut couper certains passages que les interprètes de la création n'arrivaient pas chanter, tant leurs harmonies étaient nouvelles. Le livret de l'abbé Pellegrin reprend l'argument de la Phèdre de Racine, vu sous son angle le plus spectaculaire, prétexte au déploiement des machines comme aux intermèdes dansés.

Cette œuvre riche trouve ainsi à Aix-en-Provence des interprète à sa hauteur: outre la recherche perfectionniste de Gardiner, à la tête de son orchestre d'instruments anciens The English Baroque Soloists, le metteur en scène Pier Luigi Pizzi, alors très en vogue, travaille sur une esthétique historiquement informée, sans proposer pour autant une reconstitution d'époque. Cette production est aussi marquante par la prestigieuse distribution qu'elle réunit: autour du couple-titre formé par le ténor John Aler et la soprano Rachel Yakar, les personnages de Thésée et de Phèdre sont confiés à deux stars de l'époque, peu familières du répertoire baroque mais très charismatiques: José van Dam et Jessye Norman.

Alain Perroux

Transcription

Journaliste
Tout se joue ici, au Théâtre de l’Archevêché avec l’Opéra de Rameau, Hyppolite et Aricie . Je sais qu’il y a aussi au programme d’Aix-en-Provence le Mithridate de Mozart et la Cenerentola de Rossini. Mais l’œuvre de Rameau sera déterminante. C’est une option prise par Louis Erlo à Aix depuis 2 ans. Et quand il compose Hyppolite et Aricie , Rameau a 50 ans, c’est son premier opéra mais quelle expérience !
(Musique)
Journaliste
Tiré d’ Hyppolite , d’ Euripide et du Phèdre de Racine, seuls les amours d’ Hyppolite et d’Aricie séduisent Rameau. Une musique essentiellement française du XVIIIe siècle, un chef-d’œuvre selon certains.
(Musique)
Journaliste
Pour monter cet opéra, un italien Pier Luigi Pizzi, mise en scène, décors et costumes, et John Eliot Gardiner, un anglais à la direction musicale. Mais demander à Pier Luigi Pizzi s’il est amoureux du Rococo, il hésite pour vous dire que le mot lui déplaît profondément, visiblement, il prend cela pour une provocation.
Pier-Luigi Pizzi
Je préfère parler de baroque. Le Rococo c’est quelque chose qui est un peu une espèce de déformation du baroque. J’aime plutôt le baroque, c’est, ça me donne des images plus fortes et c’est sur ça que je travaille plutôt. On sent que cette musique a besoin d’images très riches qui correspondent à la richesse de l’invention musicale.
Journaliste
Voici John Eliot Gardiner, il dirige l’orchestre et comme beaucoup d’anglais, il est un passionné de musique baroque. L’orchestre joue des instruments d’époque ou des copies d’instruments, cela donne un climat musical remarquable.
John-Eliot Gardiner
Tout Rameau est difficile parce que c’est un style qui est disparu tout à fait. Alors il faut reconstruire ce style, il faut carrément, avec les instruments anciens, avec les chœurs, tous les ornements qui…. D’abord, la première fois qu’on fait ça, les ornements sont un peu gênants, vous savez. Mais c’est parce que c’est comme des moustiques, ils sont partout sur la partition. Il faut trouver le moyen de les intégrer dans la musique, dans les grands phrasés.
(Musique)
Journaliste
Une très belle interprétation et surtout Jessye Norman, une américaine qui chante divinement aussi bien le negro spiritual que Rameau.
(Musique)
Jessye Norman
J’aime beaucoup chanter ça, c’est la première fois que je chante des choses de Rameau et je suis ravie de le faire.
Journaliste
Une certaine sensibilité française ?
Jessye Norman
Oui, sûrement. C’est le texte. C’est bien avec la musique de Rameau, c’est magnifique. Il a pris le texte avec la musique, c’est magnifique.
Journaliste
Il y a un équilibre ?
Jessye Norman
Oui, je trouve, complètement, c’est magnifique.
(Musique)
Journaliste
Jessye Norman nous a donné ses premières impressions, c’est très rare qu’une chanteuse accepte une interview entre deux scènes mais quelle présence.
(Musique)
Journaliste
Quel sera l’accueil des critiques et du public après ce Rameau joué à Aix-en-Provence, c’est un beau pari, celui de Louis Erlo, espérons que ce n’est un risque mesuré.
(Musique)