Nos envoyés spéciaux : le Congo sans Lumumba
Notice
L'équipe de Cinq colonnes à la une revient au Congo pour faire le point sur la situation politique dans les différentes composantes du pays, depuis le gouvernement de Léopoldville jusqu'aux États sécessionnistes du Sud-Kasaï et du Katanga qui recourent aux mercenaires pour constituer leur armée.
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Éclairage
Le chef d'État-major de l'armée nationale congolaise (ANC), le colonel Mobutu, prend le pouvoir le 14 septembre 1960. Il écarte les autorités politiques et il nomme un collège de commissaires chargé de relancer une administration désorganisée par les crises qui se sont succédées depuis l'indépendance le 30 juin 1960. Le Premier ministre Lumumba est placé en résidence surveillée et isolé politiquement face à la coalition formée contre lui, depuis le président Kasavubu jusqu'à son ancien proche Mobutu. Lumumba est aussi écarté de la scène internationale lorsque l'Organisation des Nations-Unies (ONU) reconnaît fin novembre la délégation de Kasavubu comme la représentation légale du Congo. Il décide alors de rejoindre Stanleyville où l'ancien Vice-premier ministre Gizenga a rassemblé les forces nationalistes. Il est arrêté avec ses proches et renvoyé à Léopoldville. Mais Mobutu et Kasavubu craignent l'alliance des gardiens et des membres de l'ANC avec le Premier ministre déchu à la suite d'un soulèvement à Thysville où est enfermé Lumumba. Ils décident, en accord avec le président du Katanga, Tshombe, de le transférer vers cette ancienne province qui lui est violemment hostile. Cette décision de renvoi vers le Katanga ou le Sud-Kasaï qui revient à une élimination physique est également prise à l'égard de proches de l'ancien gouvernement légal. Lumumba et deux de ses proches sont assassinés à leur arrivée au Katanga le 17 janvier 1961. Mais la presse n'annonce que mi-février leur décès « dans la brousse » : évadés, ils auraient été l'objet de la vindicte de villageois. L'assassinat soulève l'indignation de la communauté internationale. Plusieurs pays communistes et du groupe afro-asiatique décident de reconnaître le gouvernement national de Gigenza comme seul gouvernement légal. L'ONU autorise le recours à la force par les casques bleus pour mettre fin au chaos et elle créée une commission d'enquête sur la mort des nationalistes. Parallèlement le président Kasavubu supprime le collège des commissaires et nomme un gouvernement dirigé par Joseph Ileo.
Le journaliste Roger Louis se rend au Congo pour comprendre la situation après la mort de Lumumba. Si à Léopoldville le Premier ministre Ileo regrette cet assassinat, de son côté le président Kasavubu le considère comme un non évènement. Il estime que l'entente politique est désormais possible et il s'oppose aux actions des casques bleus, considérés comme une force d'occupation. L'État autonome du Sud-Kasaï soutenu par la Forminière, une filiale de la société générale belge qui y contrôle l'extraction du diamant, rencontre de graves difficultés. La guerre qui a opposé l'ANC aux troupes du président Kalonji lors de la reconquête du Sud-Kasaï a fait de nombreuses victimes et entraîné la famine. Kalonji apparaît comme un dirigeant qui crée un royaume privé autour des Baluba, engagé dans un combat contre les Lulua. Il rejette les accusations portées contre lui d'avoir fait exécuter sommairement des lumumbistes en invoquant un jugement régulier. Il constitue une armée avec l'aide de conseillers militaires belges et de mercenaires, comme le Français Jean Gillet, qui recrute des enfants. Enfin, au Katanga, les opinions proférées contre l'ancien Premier ministre tout autant que les titres de presse reflètent l'hostilité contre Lumumba, tandis que Tshombe dénonce la commission d'enquête sur la mort de Lumumba comme une ingérence dans les affaires de son État. Le reportage présente les actions de l'armée katangaise contre la révolte des Baluba, avec un encadrement belge et le recours à des mercenaires, les « affreux », parmi lesquels des Belges, des Sud-Africains mais aussi des militaires français tels que le colonel Trinquier et le commandant Faulques envoyés officieusement pour accroître l'influence de la France dans la région en jouant la carte Tshombe.