Témoignages sur la rafle de Lyon de 1942
Notice
Le 20 août 1942, ordre est donné de rassembler tous les juifs étrangers à Lyon pour les envoyer en Allemagne. Mais c'était sans compter sur l'assistance des Lyonnais, de nombreux enfants juifs purent ainsi être sauvés.
- Rhône-Alpes > Rhône > Lyon
Éclairage
La spécificité de Lyon et de sa région dans la Seconde Guerre ne tient pas seulement au fait qu'elles appartiennent jusqu'à la fin 1942 à la zone dite libre, que Lyon a été nommée capitale de la résistance, mais surtout que ces territoires ont été des lieux de refuge pour les populations menacées par les nazis, notamment les Juifs de l'Europe de l'est et du nord. Nombre d'entre eux s'étaient installés à Lyon et dans la région grenobloise, en provenance de l'Allemagne, de l'Autriche, de la Pologne ou d'autres pays de l'Europe de l'Est, croyant trouver là un endroit sûr et protégé.
Ce reportage revient sur un épisode peu connu du public, celui des rafles de Juifs étrangers qui ont eu lieu à Lyon à la suite de celle du Vel d'hiv à Paris en juillet de la même année. Réalisé essentiellement à partir des témoignages oraux accompagnés de quelques images d'archives, il insiste sur le rôle de Vichy dans la déportation des populations juives et, en contrepoint, l'assistance qui s'est organisée sous l'égide d'organisations confessionnelles, permettant de sauver une partie d'entre elles. En vertu du statut des Juifs voté le 3 octobre 1940, véritable fondement d'une politique antisémite, durci par le second (2 juin 1941) puis par la loi du 22 juillet 1941 (« aryanisation » économique), le gouvernement de Vichy pratique dans la zone sud les arrestations de Juifs. Ainsi devance t-il les demandes de l'occupant en participant directement à la déportation des Juifs. Comme l'indique le principal témoin René Nodot, président de la Ligue internationale contre le racisme et l'antisémitisme (LICRA), il était prévu de procéder à l'arrestation de 10.000 Juifs étrangers présents dans l'ensemble de la région. Rachel est l'une d'entre eux. Originaire de Belgique et réfugiée à Lyon avec ses oncle et tante après la déportation de ses parents, elle ne doit son salut qu'à l'action des membres de l'Amitié chrétienne qui interviennent pour prévenir les familles et, avec l'aide de médecins, faciliter leur mise à l'écart quand ils ont été arrêtés. Ces arrestations se déroulent à partir du 20 août principalement dans les départements du Rhône et de l'Isère. Elles sont conduites par les membres de l'administration française de Vichy, sous la direction du préfet de région. Les listes nominatives dressées par le commissariat général aux questions juives facilitent le repérage de personnes et leur arrestation brutale et massive. René Nodot rappelle l'importance des actions des membres des différentes confessions religieuses à Lyon et dans la région notamment pour le sauvetage des enfants juifs, cachés dans des familles, des maisons d'enfants ou des institutions religieuses. Avec 108 autres enfants, Rachel est ainsi distraite du groupe des prisonniers retenus dans le camp de Vénissieux dont quelques images évoquent le site par un mur surmonté de barbelés. Elle trouvera refuge dans le château de Peyrins (Drôme) : un lieu d'accueil moins connu que la Maison d'Izieu et qui ne connaîtra pas le même sort dramatique.
L'amitié chrétienne, regroupement officiel des différentes confessions catholique, protestante et juive, profite de son statut reconnu par le régime de Vichy pour mener sa politique de protection. Elle intervient pour cette mission comme le fait l'Œuvre de secours aux enfants, (OSE), très active pour faire passer en Suisse une partie des enfants juifs, qui furent ainsi sauvés. Une action risquée mais fondamentale alors que le contexte se durcit sous l'occupation directe des Allemands. Si à Lyon cette première grande rafle n'est pas de la même ampleur qu'à Paris, (545 personnes sont déportées à la suite des arrestations d'août 42), le nombre de personnes arrêtées et déportées dans la région ne cesse d'augmenter à partir de 1943, avec la multiplication des rafles.