Le Nouvel opéra de Lyon

10 mai 1993
03m 57s
Réf. 00041

Notice

Résumé :

L'opéra de Lyon se refait une jeunesse entre les mains de Jean Nouvel. La visite du chantier avec l'architecte permet de constater que la fonction du lieu joue une importance majeure et régit la conception des espaces.

Date de diffusion :
10 mai 1993
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Éclairage

Dans les années 1980, les nouvelles mises en scènes lyriques exigent la modernisation de l'Opéra de Lyon. Construit en 1831 par les architectes Antoine-Marie Chenavard et Jean-Marie Pollet, il est devenu insuffisant pour répondre aux exigences d'une programmation plus ambitieuse. En 1986 est organisé un concours dont Jean Nouvel est le lauréat. L'opéra est inauguré en 1993.

Du théâtre néo-classique du XIXe siècle, l'architecte ne garde que les façades et le foyer du public. Restaurés jusque dans le détail de leur décor initial, ces vestiges témoignent de l'histoire de l'édifice et rappellent les fastes de la culture traditionnelle. Tout le reste de l'édifice est détruit. L'espace intérieur est restructuré et divisé en dix-huit niveaux qui permettent de tripler le volume de l'ancien théâtre. Au sommet des façades restaurées, une verrière semi-cylindrique affiche la modernité de ce nouveau théâtre. Il devient un des symboles du développement culturel de la ville de Lyon.

À l'intérieur, entre les murs des anciennes façades, la grande salle de spectacle à l'italienne est agrandie. Elle est suspendue pour l'isoler des vibrations de la circulation automobile et du métro. Le public y accède par des entrées tapissées de soie rouge. Les fibres optiques devant chaque fauteuil des six niveaux de balcons renvoient les dorures du plafond et créent un espace illusionniste pour le spectateur. Un amphithéâtre de 200 places et des salles de répétitions prennent place sous le niveau du sol. On y trouve aussi les vastes espaces techniques. Le hall d'accueil sombre contraste avec les coursives des escalators qui le surplombent et les passerelles en tôle perforée des espaces de circulation sur toute la hauteur de l'édifice.

La voûte de verre qui couronne l'édifice abrite la salle de répétition du ballet. Les danseurs dominent les quartiers historiques de Lyon, Fourvière et la Croix-Rousse. Ils disposent d'une surface de 420 m² identique au plateau de la scène. Ce lieu devient aussi une salle de spectacle ouverte sur la ville. Les jours de représentation, la mise en lumière de Yann Kersalé anime la structure métallique. Elle transforme l'édifice en signal lumineux et coloré.

Le nouveau bâtiment offre des perspectives sur l'ancien théâtre et sur la ville. Ce dialogue constant entre tradition et modernité permet une création originale dans un quartier marqué par l'Hôtel de ville dont la construction remonte au XVIIIe siècle. Jean Nouvel a adopté une attitude subtilement radicale qui consiste à ne pas transiger avec la modernité tout en ne condamnant pas le passé. L'intérieur, tout carrossé de noir, évoque à la fois un piano laqué et une carrosserie d'automobile. Il s'encastre discrètement dans les façades de pierre appartenant à la tradition classique pour mieux s'épanouir à leur sommet avec la grande voûte qui unit les deux moments de l'histoire de l'édifice.

Laurent Baridon

Transcription

(Musique)
Journaliste
Après 6 ans d’errance, l’Opéra de Lyon retrouve un toit.
(Musique)
Inconnu
Il est joli, je sais pas mais personnellement, je le trouve quand même pas mal, donc.
Inconnue 1
Mais magnifique quand même.
Inconnue 2
Je préfère comme il était avant.
Inconnue 3
C’est curieux, surprenant; le moderne et l’ancien.
Journaliste
La partition est complexe. A partir de 89, il faut casser l’Opéra vétuste sans détruire ses façades du XIXème et bâtir à l’intérieur. Le défi de l’Opéra nouveau est orchestré par Nouvel, l’homme chauve au chapeau noir.
Jean Nouvel
Ce qui est intéressant en fait, c’est toujours ce rapport de l’histoire et de la modernité, de voir que la ville continue à se fabriquer et que la culture du 20e siècle peut être présente dans tous les endroits qui se créent.
(Musique)
Journaliste
Vertigineuse et humaine à la fois, la salle, suspendue dans le vide est construite à l’Italienne et revêtue de cuir et de bois noir. Face à une scène élargie, 1 300 places à l’acoustique exceptionnelle, éclairées individuellement de petites lumières en fibre optique comme les bougies d’une fête intime. A l’évidence l’anti-Bastille.
Intervenant
Ce que nous avons souhaité, c’est avoir une salle conviviale. C’est très important que les murs soient habités par un public et par les amateurs qui écoutent et qui sont tendus vers le spectacle.
(Musique)
Intervenant
Nous, ça nous permet d’avoir la couleur des timbres, la rigueur musicale, où l’expression ne soit pas forcée, ne soit pas volontairement déformée par le nombre de décibels. C’est ce qui arrive dans les grandes salles.
(Musique)
Journaliste
Pour accéder à ces couloirs de satin rouge et à cette coque laquée, on passe par le péristyle ancien fermé de vitres où se reflète et se prolonge la ville. Rien ne manque au rituel du théâtre.
Jean Nouvel
Dès qu’on a franchi cette enceinte, on est dans une architecture complètement contemporaine. C’est noir comme, comme un piano à queue, on sait que dans cette boite, il y a autre chose, c'est un registre en fait assez instrumental. Les joies du chantier.
Journaliste
Un chantier qui va se poursuivre encore plusieurs mois. En dehors des espaces publics, et sans compter les quelques réfections déjà nécessaires. Le chantier est un dédale gigantesque où même le créateur se perd encore.
Jean Nouvel
Non, non. Ici, ici on passe de l’autre côté. Ah, ah, ah, ah, ah, ah, ah, ah.
Journaliste
Instrument d’apparat mais aussi outil de travail. Sous les pieds du public, 20 mètres ont été creusés, bétonnés dur pour offrir sur 5 niveaux un petit amphithéâtre, des salles de répétitions. La surface utile a été doublée et portée à 14 800 m² et le volume triplé.
(Musique)
Journaliste
Troisième et dernier acte de cet œuvre, la plus transparente, le dôme de verre, recouvert de lames brise-soleil qui reçoivent et réfléchissent la lumière. Le corps de ballet dansera au-dessus de la ville au vu et au su de tous. Face à face désormais, l’Hôtel de Ville, symbole de l’autorité et l’Opéra, symbole de l’imaginaire. Le jour, sa massive harmonie s’impose déjà comme repère, la nuit comme témoin de vie et d’émotion. La voûte s’embrase en effet en fonction de l’activité dans le bâtiment comme un gros cœur flamboyant.
(Musique)