Inauguration du premier vol direct entre Nice et Pékin

Le 2 août 2019 a lieu le vol inaugural de la liaison entre Pékin et Nice opéré par la compagnie Air China en présence de représentants des autorités françaises et chinoises. Le moment est historique puisqu’il s’agit du premier vol commercial sans escale entre un aéroport français de province et la Chine. Lors de la privatisation partielle de l’aéroport Nice Côte d’Azur, en 2016, les responsables politiques et acteurs économiques azuréens avaient fait pression pour que la société Aéroports de Paris (ADP) ne soit pas candidate à l’acquisition des parts du capital (60 %) mises en vente par l’État. Ils craignaient en effet que le nouveau gestionnaire privilégie le transit des vols internationaux par son hub parisien, au détriment du troisième aéroport français. Avec ses 13,8 millions de passagers en 2018 et une croissance soutenue de quatre pour cent par an, la plate-forme de Nice est la seconde de France, mais très loin derrière Roissy Charles de Gaulle (72,2 millions), principale plateforme de correspondance d’Air France à l’international, et Orly (33,1 millions). Le dynamisme de l’aéroport Nice Côte d’Azur est d’une part lié à l’absence, sur le plan terrestre, de ligne à grande vitesse (LGV) entre Marseille et Nice, plaçant la ville à plus de cinq heures de trajet de Paris par voie ferroviaire. Les vols vers la capitale représentent à eux seuls un tiers du trafic total. Cette vitalité aéroportuaire résulte d’autre part de la forte et croissante attraction touristique de la Côte d’Azur, et plus largement du dynamisme d’une économie très largement tertiarisée. À quelques kilomètres de l’aéroport, sur le plateau de Valbonne, est implanté le parc technologique de Sophia Antipolis. Depuis 1959 et le premier vol international à destination de Rome opéré par Air France à bord de la Caravelle, l’aéroport Nice Côte d’Azur s’est inséré dans un dense réseau européen au gré de l’arrivée de compagnies nationales traditionnelles puis de celles à bas coût. Cette offre continentale s’étend jusqu’en Russie, avec notamment la desserte de Moscou et Saint-Pétersbourg. Nice Côte d’Azur bénéficie par ailleurs de plusieurs liaisons long-courriers directes vers l’Amérique du Nord (New York et Montréal), le Golfe persique (Dubaï, Doha et Koweït City) et désormais la Chine avec trois vols par semaine en saison estivale vers Pékin, alors que l’ouverture d’autres liaisons vers Shanghai ou Canton est envisagée dans les prochaines années.

L’enjeu est de taille pour la Côte d’Azur, puisque le nombre de touristes chinois a certes été multiplié par plus de trois au cours de la dernière décennie, mais elle accueille moins de cinq pour cent des nuitées effectuées en France par cette clientèle à fort pouvoir d’achat. Plus largement, un essor significatif des relations commerciales est également escompté par les acteurs économiques du territoire azuréen avec d’éventuelles nouvelles implantations d’entreprises chinoises dans la région ou à l’inverse la conquête de nouveaux marchés dans l’empire du milieu. Par ailleurs une connexion aérienne directe vers la Chine ne peut que favoriser le développement de l’aéroport Nice Côte d’Azur, détenu majoritairement par le consortium Azzurra au sein duquel figurent la société d’autoroutes italienne, Atlantia (65,01%), la société de gestion aéroportuaire italienne, Aéroports de Rome (10%), et le fournisseur d’électricité français, EDF (24,99%). Le projet est que l’aéroport devienne à terme une alternative crédible aux grandes plateformes de correspondance européennes pour des voyageurs internationaux souhaitant un transit plus rapide et plus convivial. L’augmentation du transit aérien favorisera aussi mécaniquement les séjours touristiques de courte durée pour découvrir la ville de Nice, désormais bien reliée à l’aéroport par la ligne Est-Ouest du tramway. La présence significative d’officiels chinois indique enfin que cette ouverture de ligne fait partie intégrante de la projection du soft-power de l’empire du milieu, symbolisée à l’échelle mondiale par le pharaonique projet des nouvelles routes de la soie. Son promoteur, le président chinois Xi Jinping, était d’ailleurs en visite sur la Côte d’Azur en mars 2019 pour partager un dîner d’État avec Emmanuel Macron à Beaulieu-sur-Mer, mais aussi effectuer une brève visite dans la Principauté de Monaco, qui a fait le choix de déployer le réseau de télécommunication 5G en partenariat avec l’entreprise chinoise Huawei.   

Bibliographie

• Vincent Adoumé, Géographie de la France, Paris, Hachette, 2019.      
• Peter Frankopan, Les nouvelles routes de la soie : l’émergence d’un nouveau monde, Bruxelles, Editions Nevicata, 2018.  
• Christiane Navas, « Air China se pose à Nice », Les Echos, 5 août 2019.