Le service Recherche et Développement d'Airbus Helicopters à Marignane

Le site d’Airbus Helicopters à Marignane dans les Bouches-du-Rhône s’étend sur 80 hectares près des pistes de l’aéroport Marseille Provence, d’où décollent les essais en vol. Il s’agit du siège social et principal lieu de production d’hélicoptères d’un groupe leader mondial pour les appareils civils et parmi les meilleurs pour les appareils militaires. Les chaînes d’assemblage, désormais digitalisées, permettent d’assurer le montage final du nouvel Écureuil H 160, un hélicoptère polyvalent, en à peine une quarantaine de jours.

Cette filiale hélicoptères de l’avionneur européen Airbus est le premier employeur industriel de la région Sud-Provence Alpes Côte d’Azur, puisqu’elle occupe à Marignane plus de 8 000 salariés, appelés compagnons, auxquels il faut ajouter quelques milliers de personnes supplémentaires employées chez les sous-traitants de la région. Fêté en 2019, le lien entre la ville provençale et l’aéronautique est vieux de 80 ans et la spécialisation dans la fabrication d’hélicoptères intervient au début des années 1960, lors du transfert par Sud-Aviation depuis La Courneuve de la chaîne d’assemblage de l’Alouette, cet hélicoptère léger très répandu et décliné à travers toute une gamme.

Héritier du bureau d’études transféré dans le sud de la France dès 1963, un important service Recherche et Développement emploie aujourd’hui plus d’un millier de personnes. Depuis 2016 ceux qui inventent les hélicoptères de demain sont installés dans un bâtiment ultramoderne de 20 000 m², baptisé Marignane Development Center (MDC). Équipé des dernières technologies, telles des salles de visualisation 3D, des salles de réalité virtuelle, ou des équipements de prototypage rapide, ce nouvel écrin, à plusieurs dizaines de millions d’euros, a permis de regrouper sur six niveaux des équipes de recherche hier disséminées. Le but est d’amplifier le travail collaboratif et les synergies dans une optique de perpétuelle innovation. Ce bâtiment est inspiré du Systemhaus de Donauwörth en Bavière, autre centre d’ingénierie flambant neuf de l’entreprise construit trois ans auparavant.   

La société Airbus Helicopters, appelée Eurocopter de 1992 à 2016, est née de la fusion des divisions hélicoptères de l’Allemand DASA, successeur de MBB, et du Français Aérospatiale, lui même issu en 1970 de la fusion entre Sud-Aviation et Nord-Aviation. En 1976, les deux anciens ennemis héréditaires, s’étant livrés trois guerres en moins de trois-quarts de siècle, signent une lettre d’intention pour la fabrication conjointe du futur hélicoptère de combat Tigre. L’accord de coopération est entériné en 1984 année où le président français François Mitterrand et le chancelier allemand Helmut Kohl sont main dans la main à l’ossuaire de Douaumont lors d’une cérémonie rendant hommage aux soldats des deux nations morts au combat durant la terrible bataille de Verdun en 1916. Ce geste de Verdun parachève la réconciliation vingt-un ans après la signature, le 22 janvier 1963, du traité d’amitié de l’Elysée, qui vise à renforcer la coopération franco-allemande dans les domaines de l’éducation et de la jeunesse mais aussi de la défense. La France et l’Allemagne ont alors déjà planifié depuis 1957 la réalisation conjointe d’un avion de transport militaire, le C-160 Transall, qui vole pour la première fois le 25 février 1963. Cet événement est suivi dix ans plus tard, en 1973 à Istres, du vol du premier prototype de l’Alphajet,  avion destiné à l’entraînement et l’attaque au sol équipant encore aujourd’hui la patrouille de France, et autre coopération franco-allemande. Le vol du premier prototype du Tigre se déroule en 1991 et la production en série débute en 2002. L’année précédente a été posée la première pierre de l’école franco-allemande (EFA), qui ouvre ses portes, en 2003, au Cannet-des-Maures dans le Var, sur le site de l’école de l’aviation légère de l’Armée de terre (EALAT), dans le but de former les futurs équipages sur le système d’armes commun du nouvel hélicoptère.

Alors que la Guerre froide prend fin à la suite de l’effondrement du bloc de l’Est, la création d’Eurocopter permet d’atteindre une taille critique et une dimension internationale pour faire face à la concurrence des hélicoptéristes américains. Cette mutualisation des moyens à l’échelle européenne sert aussi à optimiser l’outil industriel en intégrant aux différents programmes d’autres partenaires du vieux continent pour développer ensemble une gamme complète d’hélicoptères répondant aux besoins du marché. Un appareil produit par Airbus Helicopters est aujourd’hui composé de pièces venant de plusieurs pays européens. L’entreprise dispose par ailleurs de chaînes d’assemblage à Marignane en France, à Donauwörth en Allemagne, à Albacete en Espagne, à Brasov en Roumanie, mais aussi, au Mexique, aux Etats-Unis et depuis 2019 à Qingdao en Chine. Outre l’implantation dans des pays à bas coût de main-d’œuvre permettant de produire de nouvelles versions de certains anciens appareils,  Airbus Helicopters, qui réalise près de trois-quarts de son chiffre d’affaires à l’export, doit se rapprocher de ses clients, notamment lorsque ceux-ci effectuent d’importantes commandes. Cela a en outre l’avantage de faire de la place sur les chaînes d’assemblage de Marignane et Donauwörth, afin de mettre en production les nouveaux appareils conçus sur place par les compagnons du service Recherche et Développement.  
 
Bibliographie

• Monique Colonges et Christian Da Silva, 1939-2019 Marignane : 80 et toujours la même passion, Septèmes-les-Vallons, Société provençale d’impression, 2019.    
• Fache Jacques, « Quand l'entreprise recompose l'espace acentral », Géographie, économie, société, 2008/4, vol. 10, p. 469-492. DOI : 10.3166/ges.10.469-492. URL : https://www-cairn-info.lama.univ-amu.fr/revue-geographie-economie-societe-2008-4-page-469.htm