La première coulée d'acier européen

Au début des années 1950, après deux guerres mondiales destructrices, la coopération européenne commence à se mettre en place. Elle prend principalement effet dans le domaine de l'économie et plus particulièrement dans le secteur industriel très florissant à l’époque. Ainsi, le traité de Paris signé le 18 avril 1951 entre la République Fédérale d'Allemagne (RFA), la Belgique, le Luxembourg, l'Italie, les Pays-Bas et la France instaure-t-il la mise en place de la Communauté européenne du charbon et de l'acier (CECA). La mise en commun de la production et du marché entre ces six pays a pour but d'empêcher un retour de la guerre, notamment entre la France et l'Allemagne qui se sont opposées et déchirées à travers trois conflits meurtriers entre la fin du XIX^e siècle et la première moitié du XX^e siècle. L’enjeu est également de favoriser le développement économique des pays européens qui ont subi d'importants dommages pendant la Seconde Guerre mondiale et qui ont alors besoin d'être reconstruits. En effet, les pays concernés par cette union possèdent des régions industrielles importantes. La sidérurgie constitue alors un dénominateur commun dans le développement industriel de la Lorraine, du Luxembourg et de la région ouest-allemande de la Ruhr. Ce projet économique partagé est au cœur du discours prononcé par Robert Schuman en  1950 alors ministre des Affaires étrangères en France, ce père de l’Europe focalise sur la question du charbon et de l'acier, appelant à une mise en commun des productions allemandes et françaises. Une fois l'instauration de la CECA actée, c'est la ville luxembourgeoise de Esch-sur-Alzette, située au Sud du pays à proximité de la frontière française, qui accueillera symboliquement la première coulée d'acier européenne. La sidérurgie sera particulièrement prospère à Esch-sur-Alzette, et c'est au sein des hauts-fourneaux de Belval qu’intervient cette coulée d’« acier européen ». Pour accompagner ce moment historique, Jean Monnet, président français de la Haute Autorité de la CECA, se rend sur place et, pour marquer ce moment, lance lui-même la première coulée d'acier européen. Franz Etzel, vice-président allemand de la Haute Autorité de la CECA et Albert Coppé, deuxième vice-président de nationalité belge l’accompagnent. Le lingot d'acier résultant de cette première coulée portera la mention « EUROP » marquée en lettres capitales. Les journalistes présents vont immortaliser l'événement, des photographies de ce moment historique sont conservées par le quotidien Le Républicain Lorrain. De même, les actualités filmées diffusées dans les cinémas français à cette époque antérieure au développement de la télévision comme média de masse, vont relater cet événement majeur dans l'histoire de l'Europe. Quelques jours après l'événement, le 7 mai 1953, des images de l'usine de Belval sont en effet diffusées avec enthousiasme et présentent cette première coulée d'acier européen comme étant un pas de plus vers la communauté européenne. La CECA constitue une initiative fondatrice pour le projet de Communauté économique européenne (CEE) qui suivra et qui sous sa forme actuelle, réunit vingt-sept pays au sein de l’Union européenne (UE).