Arrivée de l'euro au Pays des Trois Frontières

En application du Traité de Maastricht (1992), au 1^er janvier 1999 l'euro devenait la monnaie officielle dans 12 des quinze pays de l'Union, en l’occurrence la Finlande, l’Allemagne, la France, l’Italie, l’Espagne, les Pays-Bas, la Belgique, le Grand-Duché de Luxembourg, l’Autriche, le Portugal et l’Irlande, donc pour 291 millions d'habitants. Cette nouvelle devise constitue dès lors la deuxième monnaie internationale derrière le dollar.

A cette date, l’euro pouvait dès lors être utilisé pour des opérations bancaires dématérialisées, ainsi que pour des paiements par chèque, chèque de voyage ou carte bancaire, mais il n’y a pas encore de monnaie fiduciaire, cette devise demeure scripturale.

C’est le 1^er janvier 2002, que l'euro devient un petit bout d'Europe entre nos mains, selon la formule du président de la Commission européenne d’alors Romano Prodi. Près de 15 milliards de billets et plus de 50 milliards de pièces sont alors simultanément introduits, chamboulant la vie quotidienne de près de 304 millions d'Européens. Le temps de s'y habituer, beaucoup effectueront, calculette en main, des conversions plus ou moins aisées.

C’est dans un contexte d’incertitude relatif aux conversions à effectuer, qu’est tourné ce reportage le 14 décembre 1998 dans le Nord Meurthe-et-Mosellan plus communément appelé Pays des Trois Frontières. Dans ce territoire frontalier entre la France, le Grand-Duché de Luxembourg et la Belgique, les populations étaient déjà pourtant habituées à pratiquer le jonglage d’une monnaie à l’autre.

Dans les faits, le reportage montre bien que, malgré les habitudes, la crainte du changement en général et de la conversion en particulier reste grande. En témoigne notamment l’explication somme toute rocambolesque du pompiste luxembourgeois. A sa décharge, si l’exercice de conversion était facile à réaliser entre une seule monnaie et l’euro (1 euro = 6,5557 francs ; 1 euro = 40,5 francs luxembourgeois), dans un espace entre trois pays et trois monnaies différentes, le passage de l’une à l’autre tout en gardant à l’esprit les valeurs d’avant, devenait alors pour le moins périlleux, d’autant plus que chacun avait ses propres astuces de calcul. 

En réalité, l’euro a véritablement facilité les choses dans les espaces frontaliers comme la région de Longwy pris ici comme exemple (ainsi que cela est rappelé par le caissier de l’hypermarché Auchan de Mont-Saint-Martin), à condition toutefois d’oublier les anciennes devises. Sur le plan commercial par exemple, la comparaison des prix de part et d’autre des frontières en a été grandement améliorée et le rendu de monnaie, en une seule et même devise (l’euro), évite des arrondis de conversion rarement favorables aux consommateurs.

Le passage à l’euro devient une réalité pour la population à compter du 1^er janvier 2002 (avec cependant une période de latence durant laquelle les anciennes monnaies nationales (franc français, franc belge et luxembourgeois…) peuvent encore être échangées en euros). Il s’est également accompagné, singulièrement en France mais également dans les 12 premiers pays membres de la zone monétaire Euro (qui s’est élargie ensuite à Chypre, à l’Estonie, la Grèce, la Lettonie, la Lituanie, Malte, la Slovaquie et la Slovénie), de craintes d’inflation des prix et de baisse du pouvoir d'achat. Cette perception par les consommateurs d’une forte hausse des prix dénote en fait un certain pessimisme et altère l'image du passage à l'euro qui, au final, s’est pourtant réalisé sans difficulté particulière.

Le 1^er janvier 2019, l’euro a fêté ses vingt ans et constitue désormais la monnaie de référence incontestable du continent européen. Cette monnaie unique fait partie intégrante d’un ensemble institutionnel construit patiemment depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale et repose sur la mise en place d’un cadre de banque centrale unique appelé Eurosystème, s’articulant autour de la Banque Centrale Européenne (BCE) et des Banques Centrales nationales. L’Eurosystème gère la monnaie unique de manière indépendante, conformément à un mandat simple (maintien de la stabilité des prix) et à un objectif unique (contenir l’inflation sous la barre de 2 % sur le moyen terme). La traversée des grandes crises économiques de 2008 et de la dette en 2011 ont montré que la stabilité monétaire issue de l’euro avait permis de mieux résister qu’ailleurs.