Les héritages miniers en attente à Crusnes
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Résumé
Le reportage présente les héritages minier directs (ancien carreau) et indirects (ancienne cité minière) en s’appuyant sur le témoignage d’anciens mineurs et d’anciens habitants.
Date de publication du document :
Février 2022
Date de diffusion :
04 févr. 1994
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Contexte historique
ParProfesseur en Géographie, Loterr, Université de Lorraine
Tourné en 1994, ce reportage s’inscrit clairement dans la transition entre la phase de deuil post-minier ou post-industriel, que l’on constate partout dans ce type de territoire, et la phase de redéveloppement. Elle se caractérise par une première prise de conscience, après les nombreuses fermetures de mines et d’usines et leur cortège de destructions de sites, de l’importance de l’héritage minier et/ou industriel dans la société, la culture et les paysages locaux, mais sans encore aboutir à une valorisation, voire à une patrimonialisation de ces héritages.
La première partie du reportage se déroule sur l’ancien carreau de la mine d’Errouville, sur la commune de Crusnes. Ouverte en 1912, cette implantation est caractéristique des mines mises en place du côté français pendant l’annexion de l’Alsace et de la Moselle (1871-1918). En effet, les entrées de mines à flanc de talus et de versant (où affleure naturellement le minerai) deviennent alors allemandes et, si la France veut accéder au minerai, elle doit foncer, sur le plateau du Pays Haut, des puits de mines pour rejoindre, verticalement la couche de minerai en sous-sol. Les puits sont surmontés de chevalements qui soutiennent les monte-charges ; deux puits sont foncés ici. Depuis la fermeture en 1972, il ne reste en 2021 que l’armature en pierre du puits n°2 (visible de 0’29’’ à 0’46’’), le plus ancien, qui servait à la descente ou la remontée des mineurs et du matériel, alors que le puits n°1, en métal et consacré à la remontée du minerai, a été totalement détruit. Présent dans le bâtiment voisin (bien visible à 0’30’ derrière le chevalement) qui abritait la machinerie et les commandes du monte-charge, un ancien mineur explique le fonctionnement des installations. Deux mineurs retraités parcourent l’ancien carreau, sur lequel il ne reste que la structure en béton des accumulateurs à minerai (silos dans lesquels on stockait le minerai extrait avant de l’expédier), visibles de 0’00’ à 0’27’’ et une halle dont on aperçoit une petite partie en arrière plan à 0’30’’. Elle abrite en 2021 l’entreprise Welsch, spécialiste de chaudronnerie, de remorques et de serrurerie-ferronnerie.
La seconde partie du reportage, à partir de 1’46’’, débute sur un panneau de sortie d’agglomération consacré à « Crusnes-Cités ». Arraché et mis au sol, ce panneau barré symbolise à lui seul l’effondrement, non seulement de l’extraction minière, mais au-delà du système minier qui avait créé et façonné le territoire, donnant vie à une société spécifique et à un paysage bien différent du village originel de Crusnes dont la cité est séparée d’1 km. Les cités minières, dont les images apparaissent de 1’49’’ à 2’17’’, sont caractérisées par leur fort alignement et leur uniformité. Il s’agit ici de cités-jumelles, maisons accolées deux à deux et entourées d’un jardin. Classiques en Lorraine au début du XXe siècle, elles ont été construites avec l’ouverture de la mine et constituent un élément essentiel du système minier mis en place autour du carreau. Elles sont complétées par des services et des commerces (coopérative alimentaire, cantine-dortoir des célibataires, salle des fêtes, écoles, bains-douches, etc.), non visibles dans le reportage et, surtout, comme on peut l’observer à partir de 2’19’’, par une église particulièrement originale : Sainte-Barbe. Eglise préfabriquée en tôle de fer devant s’exporter dans les colonies, ce prototype a été expérimenté sur ce territoire. Ouverte en 1939, elle s’impose matériellement et symboliquement au cœur de la cité minière. En 1994, à la date du reportage, elle était particulièrement abîmée, couverte de rouille. Néanmoins, le commentaire fait état de son classement aux monuments historiques (MH), qui a effectivement eu lieu en 1990. Les travaux de restauration commencent en 1997 pour finir en 2006, avec une reconnaissance patrimoniale certes réelle (classement MH, signalisation) mais pas complètement assurée. En effet, l’église se dégrade à nouveau et, depuis 2020, recherche un nouveau propriétaire.
Le discours des personnes interviewées, anciens mineurs ou habitants, est empreint de nostalgie mais aussi de fierté. Issus d’origines différentes, principalement Italiens et Polonais, ils ont créé ici une vraie société avec une culture propre dans une petite commune auparavant agricole. Les discours des interviewés ouvrent la voie à la future valorisation de ces héritages, parfois à leur patrimonialisation (musée des mines de fer d’Aumetz et de Neufchef, classement MH de l’église…) et donc à une phase de redéveloppement territorial post-deuil qui est dominante au XXIe siècle dans le bassin ferrifère lorrain.
Transcription
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