Cannes 1979 : les films primés

26 mai 1979
07m 46s
Réf. 00428

Transcription

Journaliste
Le 32ème Festival de Cannes s'est achevé il y a à peine 36 heures sur un palmarès qui, pour une fois, n'a guère soulevé de contestation. La preuve donc d'une sélection de qualité incontestable. Honneur au phénomène américain, à la publicité magistralement orchestrée. Arrivé au mois dernier au festival, Francis Coppola gagne la palme d'or pour " Apocalypse now ", impressionnante dissertation sur la guerre du Vietnam. Palme d'or partagée toutefois et c'est fort équitable avec " Le tambour " de Volker Schlöndorff, une adaptation libre mais émouvante (éprouvante presque) et d'une grande maîtrise de l'extraordinaire roman de Günter Grass. Prix d'interprétation féminine, indiscutable lui aussi, à Sally Field, la captivante héroïne de " Norma Rae " l'ouvrière révélée par l'action syndicale. Tandis que Jack Lemmon, jugé meilleur acteur masculin dans " Syndrome chinois ", a ajouté un nouveau fleuron à un palmarès déjà chargé. Autant de films cependant cette année qui, curieusement, avaient un point commun : la politique.
Inconnu
Le règlement du festival dit qu'il faut que la politique ne figure en aucun cas ni dans les discussions ni dans les films, or il n'y a pas un seul film qui n'aborde pas une question politique.
Sally Field
(Traduction) C'est le premier film qui a vraiment une importance pour moi (pour les autres aussi) mais il n'y a pas beaucoup de grands rôles féminins comme Norma Rae et puis, j'ai eu la chance d'avoir fait celui-là avec Martin Ritt. (Traduction) C'est très important dans ma carrière. (Traduction) C'est aussi une grande première pour moi.
Martin Ritt
(Traduction) Je l'ai rencontrée et, tout de suite, j'ai su que c'était elle, qu'elle était le personnage. (Traduction) Quand j'imaginais tous les traits qu'il devait avoir, il était évident qu'elle les possédait tous. (Traduction) Je savais qu'elle collerait au rôle et qu'elle y serait extraordinaire, ou plutôt je l'espérais. (Traduction) Choisir la distribution d'un film, c'est toujours un pari : on ne sait jamais. (Traduction) Il faut deviner juste.
Journaliste
Pour Sally Field, la Norma Rae du film de Martin Ritt, la révolution est intérieure : la fragile ouvrière va découvrir sa vérité de femme par le biais du syndicalisme. Toujours la politique (même s'il n'est pas question de parti) mais n'est-ce pas mieux ainsi.
Michael Douglas
(Traduction) Je pensais qu'après le succès que j'ai obtenu avec " Vol au-dessus d'un nid de coucou ", il m'aurait été facile de trouver l'argent pour produire un second film mais, en fait, j'ai travaillé quatre ans sur le " Syndrome chinois ". (Traduction) Et les deux premières années, je n'ai fait que chercher cet argent parce que personne n'y croyait mais heureusement pour moi qu'ils s'étaient trompés. Et, j'espère peut-être qu'il y a la chance pour Monsieur Lemmon parce qu'il est formidable dans le film et la première fois ici... Alors, j'espère qu'il gagnera quelque chose.
Journaliste
Michael Douglas a eu raison d'espérer : Jane Fonda, trop récente élue des Oscars hollywoodiens, et lui-même plus intéressé par son rôle de producteur que par celui qu'il tient dans le film, avaient laissé le champ libre à Lemmon. Et puis le sujet, évidemment, était au coeur d'une actualité (là encore politique) auquel personne aujourd'hui ne peut être insensible : la menace nucléaire. Pour Volker Schlöndorff, adapter Günter Grass à l'écran, était un pari difficile mais traiter du fascisme aujourd'hui (alors que le public y est très sensibilisé), c'était déjà à moitié gagné. Le jury de Cannes a fait le reste.
Volker Schlöndorff
J'ai senti quand je me suis attaqué, quand j'ai relevé le défi du " Tambour " qui passait pour infaisable, c'est que ou bien ce serait le cri complet ou bien ça passerait partout mais la palme, pour moi, signifie autre chose. Elle signifie que nous avons eu raison de persévérer à faire du cinéma allemand en Allemagne comme les Français, eux, préfèrent du cinéma français en France. Mais le cinéma ne peut intéresser tout le monde que si, d'abord, il parle de quelque chose de vrai, c'est-à-dire d'un endroit (et, donc concret). C'est-à-dire, c'est un encouragement formidable face au géant américain que notre petit David ait au moins tenu à égalité ce Goliath.
Journaliste
Je veux croire que l'arrivée fracassante de Coppola à Cannes n'a pas influencé le jury du festival. En tous les cas, " Apocalypse now ", interrogation sans complaisance sur les causes profondes de cette vision de presque fin du monde que fut la guerre du Vietnam, mérite toute notre admiration.
Francis Ford Coppola
(Traduction) Quelqu'un m'a dit un jour (et c'est le plus beau compliment qu'on m'ait fait), quelqu'un qui était au Vietnam (celui-là qui m'a raconté l'épisode de l'handicapé) que maintenant quand on lui demande comment c'était là-bas, il répond : " Allez voir ce film ". (Traduction) C'est ce dont je suis le plus fier : avoir montré exactement ce qui s'était passé là-bas parce que je pense que c'était vraiment comme ça : la folie. (Traduction) Je veux que les spectateurs sortent des salles en sachant ce que c'était cette guerre en ayant une véritable expérience, pas avec le sentiment d'avoir suivi une histoire mais avec celui d'être effectivement, eux aussi, allé au Vietnam.