Contre-guérilla

04 avril 1957
15m 20s
Réf. 01024

Notice

Résumé :

Film d'instruction. Entraînement : accrochage et et réduction de l'adversaire.

Type de média :
Date de diffusion :
04 avril 1957
Personnalité(s) :
Lieux :

Éclairage

L'instruction des jeunes appelés arrivant en Algérie commence dès les premiers mois en France, et se poursuit en Algérie de manière plus ou moins poussée. Elle intègre pour tous les soldats des éléments techniques et sociologiques de base liés au combat particulier qui se déroule en Algérie. Mais ce sont surtout les officiers qui doivent suivre une formation complémentaire à la « contre-guérilla », pour reprendre le terme de l'époque employé dans le titre de ce film. La guerre subversive et la guerre psychologique (le versant armé de l'action psychologique) font l'objet de cours spécifiques. Le Centre d'instruction de pacification et de contre-guérilla (CIPCG) est créé à Arzew en Algérie en juin 1956 ; il dépend d'abord du 3e bureau (instruction) de l'état-major de la Xe région militaire, puis du 5e bureau (action psychologique) à partir de juillet 1957 ; il vise à former les officiers arrivant en Algérie aux bases de l'action psychologique et de la sociologie musulmane. Par ailleurs au niveau national le Centre d'instruction de guerre psychologique (CIGP), créé en novembre 1954 (donc juste après la guerre d'Indochine qui va servir de modèle à la première phase de la guerre d'Algérie) au sein du Cours supérieur interarmées, est remplacé par le Centre d'instruction interarmées de l'action psychologique (CIIAP) après la mise en place des 5e bureaux mi-1957.

Ce film est une déclinaison des cours sur la contre-guérilla ; il est réalisé avec soin en 1957 par le soldat Philippe de Broca, alors en service au SCA Alger. S'agissant d'un film d'instruction, il n'est pas structuré comme les films de propagande, et ne contient d'ailleurs pas du tout les mêmes éléments. C'est un film de guerre entièrement fictionnel réalisé sur le modèle des films américains, mais qui n'épargne pas le spectateur puisqu'il est supposé connaître la réalité de la situation en Algérie, contrairement aux films de propagande qui visent au contraire à masquer la réalité. En particulier, on voit dans ce film à la fois des morts français et des troupes de l'ALN, ce qui est très rare ; bien que tous ces éléments soient « joués » devant la caméra. Comme le note un carton au début, le film ne peut traiter de toute la contre-guérilla, et n'est qu'un « prologue destiné à vous montrer dans ce genre particulier de combat l'ambiance, la vie du contre-guérillero ». Le but d'une telle séance n'est pas le divertissement : il faut repérer les fautes commises par les personnages (casque non mis, endormissement...), qui fragilisent des opérations de nomadisation, et comprendre les interactions entre les sections et l'état-major, entre le terrain et l'aviation, etc. Le film met en œuvre un vrai scénario, ainsi qu'un suspense quant à l'arrivée des renforts héliportés. Une synthèse finale donne les points non réglementaires, et se termine sur une remarque négative : « en l'absence de camouflage, il est vraiment surprenant que cette embuscade ne se soit pas soldée en définitive par une bonne contre-embuscade ».

Sébastien Denis

Transcription

(Musique)
Journaliste
En zone d’insécurité, les convois automobiles sont toujours très vulnérables. Les efforts doivent tendre à l’application stricte des mesures réglementaires de sécurité qui permettent de diminuer cette vulnérabilité et de faciliter l’intervention des éléments réservés.
(Bruit)
Lieutenant
Transmettez au PC, nous sommes tombés dans une embuscade à 384.735, un GMC hors d’usage, blessé à évacuer, rebelle décroche vers le nord, je repars.
Intervenant 1
Voilà ce qui se passe, une bande rebelle importante vient de tendre une embuscade au pied du [psah].
Intervenant 2
Cela confirme les renseignements que nous avions déjà.
Lieutenant
Exact ! Les premières et troisièmes compagnies essayeront de rejeter les rebelles sur la cote 709. Les deux sections nomadisantes de la quatrième compagnie sont là. Ordonnez-leur de rejoindre au plus vite le col éditant une embuscade.
(Silence)
Soldat 1
Eh, grouille-toi, on démarre.
(Bruit)
Lieutenant
Eh, Faron.
Faron
Mon lieutenant.
Lieutenant
Alors, progression dispersée dans le bois, et ensuite le nom d’oued Saïd.
Soldat 2
Bien, mon Lieutenant.
Lieutenant
Bon, vous partirez en tête, trois hommes, trois voltigeurs de pointe. Et vous Micho, vous me suivrez avec votre poste radio pendant toute la progression.
(Bruit)
Soldat 1
Tu es prêt ?
Soldat 2
Oui, j’arrive.
(Bruit)
Journaliste
Pour être efficace et ne point courir de risque majeur, l’action ou l’intervention diurne et rapide de cette unité légère ; en cours de nomadisation est cependant conditionnée par le choix judicieux d’itinéraire, camouflé aux observatoires possibles de l’adversaire.
(Bruit)
Journaliste
Quelle que soit la rapidité du déplacement, celle-ci ne saurait pourtant supprimer le respect des mesures élémentaires de sureté ; qui doivent présider à la reconnaissance et au franchissement des points de passage dangereux.
(Bruit)
Journaliste
Une lisière de terrain boisé au couvert est nécessairement une limite de bond dans la progression de l’unité.
(Bruit)
Lieutenant
Appelez-moi le sous-lieutenant Faron.
(Bruit)
Lieutenant
Faron, inutile de continuer, le terrain est découvert et nous sommes en vue du village. Nous continuerons la progression cette nuit.
Faron
Bien, mon Lieutenant.
Soldat 1
Eh, passe-moi la gourde.
(Bruit)
Soldat 2
Eh, tu es malade, il ne faut pas pousser, il n’y a que deux litres en tout et pour tout.
Soldat 1
Et de quoi je me mêle ?
Soldat 3
Vous allez la fermer, oui ?
(Bruit)
Journaliste
Les hommes se sont reposés, protégés par les guetteurs.
Lieutenant
Faron, on va pouvoir repartir.
Faron
Mais on ne fouille pas le village mon lieutenant ?
Lieutenant
Non, ce n’est pas la peine, on va se faire signaler, et puis la bande est trop loin.
Faron
Bien !
(Bruit)
Journaliste
Pour l’unité en nomadisation, les déplacements de nuit sont la règle pour échapper aux vues de l’adversaire ; et pour gagner discrètement de nouvelles positions favorables à la mise en place d’embuscade permettant l’observation de jour dans un nouveau compartiment de terrain.
(Bruit)
Journaliste
Malgré la nuit, le dispositif adopté doit permettre le déplacement en sécurité. Les distances ou intervalles sont réduits pour conserver la liaison à vue.
(Silence)
Faron
Mon lieutenant.
Lieutenant
Oui !
Faron
L’éclaireur de la deuxième section a trouvé un bivouac abandonné.
Lieutenant
Ah, j’y vais.
(Bruit)
Faron
Vous voyez mon lieutenant, c’est ici.
Lieutenant
Ah oui, en effet, il y a à peine 24 heures que ce feu est éteint, et les traces ?
Faron
Par ici, mon lieutenant.
(Bruit)
Faron
Mon lieutenant.
Lieutenant
Qu’est-ce que c’est ?
Soldat 3
J’ai trouvé des vêtements.
Lieutenant
Fais voir ! Pas de doute, c’est notre bande, ils ont bivouaqué hier soir ici. Ils ont laissé leurs vêtements civils avant d’aller attaquer le convoi. Il faut aller leur tendre une embuscade, au col, ils sont obligés d’y passer.
Soldat 3
D’après le nombre de vêtements, la bande doit être importante.
Faron
En effet, il vaut mieux prévoir des renforts héliportés. Micho, Micho, avertissez le PC.
Micho
Bien mon lieutenant, dès que j’aurais la liaison.
Lieutenant
Aux deux sections, rendez-vous à la cote 709.
(Bruit)
Journaliste
Les ordres ayant été donnés à la cote 709 par le commandant de l’unité aux différentes équipes et pièces. Après regroupement et étude du terrain, la progression est reprise pour la mise en place du dispositif d’embuscade au point favorable choisi sur l’itinéraire ; qui semble fréquemment être utilisé par l’adversaire.
(Bruit)
Roméo 1
Roméo 1 de Roméo, Roméo 1 de Roméo, parlez !
Roméo
Roméo de Roméo 1, j’écoute.
Soldat 2
Tu crois que les rebelles vont passer ici, toi ? Ils peuvent nous avoir vus ?
Soldat 1
Surtout si tout le monde fait comme toi.
Soldat 2
Dis donc, c’est une grosse bande à ton avis ?
Soldat 1
Je ne sais pas moi, enfin, si on accroche du sérieux, on aura sûrement du renfort.
Soldat 2
Espérons.
Soldat 1
Eh, regarde….
(Silence)
Journaliste
L’attente patiente et invisible, la neutralisation discrète d’éclaireurs ou sidi qui progressent généralement en tête du gros des forces de l’adversaire ; et sur celle-ci l’action de choc soudaine, précise et brutale ; tels sont les facteurs essentiels assurant avec le minimum de perte le succès d’une embuscade minutieusement préparée et bien montée.
(Silence)
Lieutenant
Micho, transmettez au PC : Avons accroché forte bande rebelle, demandons d’urgence transport héliporté.
(Bruit)
Lieutenant
Pas de réponse du PC ?
Micho
Rien pour le moment mon Lieutenant.
(Bruit)
Faron
Mon Lieutenant, il faudrait peut-être mieux décrocher parce qu’ils vont finir par nous contourner.
Lieutenant
Pas question, il faut garder le contact avec la bande, terminé ! Micho, Micho, rien encore ?
(Bruit)
Micho
Ventilateur de Roméo, parlez ! Ventilateur, ventilateur de Roméo, m’entendez-vous ? Parlez !
(Silence)
Soldat 1
Et si on reste là, on va finir par se faire tourner.
Soldat 2
Oui !
(Bruit)
Roméo
Roméo de Roméo 1, ça y est mon Lieutenant, on est pris par derrière.
(Bruit)
Lieutenant
Prenez message, résultat de l’embuscade, primo pertes rebelles, 15 tués dénombrés, 20 prisonniers, 30 armes de guerre récupérées, dont un FM. Deuxièmement, pertes amis, un tué, quatre blessés à évacuer d’urgence. Stop et fin, bien pris? terminé !
Journaliste
Voici quelques exemples des fautes qui ont été commises au cours de cette action. Ces hommes somnolent et l’attention s’est relâchée. La sûreté du convoi automobile en mouvement a pour base une activité intellectuelle et une observation permanente des cadres et de la troupe embarquée. Vous voyez ce pain d’une livre premier plan, tout alourdissement dans le chargement est une cause de fatigue supplémentaire pour le contre-guérilléro. Ces hommes ont été trop vite, ils sont fatigués. Un sérieux entraînement est indispensable si l’on veut conserver en permanence les moyens intellectuels et physiques nécessaires à la sûreté et au combat de choc. Dans cette position horizontale, l’antenne de ce poste SCR 300 ne permet évidemment pas de bonnes liaisons radio. Enfin, en l’absence de camouflage, il est vraiment surprenant que cette embuscade ne se soit pas soldée en définitive par une bonne contre-embuscade ou qu’elle ne l’ait pas décelée à distance.
(Musique)