Les forces de la communauté
Notice
Les soldats des colonies françaises sont formés à l'EFORTOM (Ecole de formation des officiers du régime transitoire des troupes d'outre-mer), située à Fréjus. Ils suivent un enseignement technique (réparation d'une radio, fonctionnement d'une fusée, etc.) et tactique (jeux de guerre sur cartes, topographie, etc.), ainsi qu'un entraînement physique : escrime, apprentissage parachutiste, exercice de débarquement. Accentué par une musique triomphante, le commentaire dresse l'éloge de la Communauté dès sa première phrase : "Dans la Communauté, tous les citoyens sont égaux en droit, quelles que soient leur origine, leur race et leur religion". Enfin, le reportage se conclut sur une citation de Gabriele D'Annunzio, "La France, sans laquelle le monde serait seul !", suivie d'une poignée de mains symbolique entre deux saint-cyriens, dont l'un est africain, lors de la traditionnelle remise du casoar.
- Europe > France > Provence-Alpes-Côte d'Azur > Var > Fréjus
Éclairage
Daté de 1960, ce film documentaire produit par le Service Cinématographique des Armées semble accuser quelque retard sur l'évolution rapide des événements politiques survenus en Afrique subsaharienne. La Communauté créée en 1958 a vécu et une page s'est déjà tournée : l'année 1960 est celle de l'accession à l'indépendance de la plupart des territoires anciennement colonisés par la France. Exalter les forces intégrées de la Communauté apparaît donc en décalage sensible avec l'histoire en train de se faire.
C'est sans doute qu'au tournant des indépendances, les continuités dans le domaine militaire sont plus fortes que sur le plan institutionnel et politique. La France est en passe de conclure une série d'accords de coopération avec la plupart de ses partenaires africains, dont les plus essentiels concernent justement les questions militaires. Des accords de défense et/ou de coopération militaire technique sont ainsi passés avec la Centrafrique (1960), le Gabon (1960), la Haute-Volta (1961), la Côte d'Ivoire (1961), le Togo (1963) et divers autres partenaires. Dans la plupart des cas, des bases militaires françaises sont maintenues sur place. Officiers et troupes françaises sont non seulement autorisés à stationner sur le sol africain, mais également conviés à assurer l'instruction des nouvelles armées nationales. L'armée française compte ainsi, en 1960, environ 30 000 hommes déployés dans ses anciens territoires ; les pays alliés lui assurent des facilités de circulation et l'utilisation des infrastructures locales. Plusieurs traités comportent même des « accords spéciaux » aux termes desquels les gouvernements des pays signataires peuvent demander à tout moment l'aide de la France en matière de défense.
De nombreux cadres militaires africains continuent par ailleurs à être formés en France. Cette formation s'inscrit dans une tradition que l'on peut faire remonter au milieu du XIXe siècle, avec la création des tirailleurs sénégalais en 1857. Le passage par Fréjus – lieu de formation évoqué dans le reportage – est une constante depuis au moins la Première Guerre mondiale pour les militaires venus de l'outre-mer. Les dernières années de la colonisation (notamment après 1956) avaient largement contribué à faire émerger une génération d'officiers et de sous-officiers africains qui constituent les cadres des forces armées des jeunes États et qui constituent les interlocuteurs privilégiés des gradés de l'armée françaises encore actifs sur le terrain africain, au gré des multiples interventions militaires de la France sur le continent.