Les réalisations de la France en Algérie
Notice
Réalisé pour le compte du Gouvernement Général de l'Algérie, ce film propose de montrer les bienfaits de la colonisation française en Algérie, tant sur les plans économiques et sociaux que politiques.
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Éclairage
Ce film du Gouvernement Général de l'Algérie s'inscrit dans la tradition de la propagande coloniale visant à louer les bienfaits et les réalisations de la France en Algérie. Le développement dont il est ici question a été mis en œuvre précisément au titre du contrôle du territoire et de l'encadrement des populations : infrastructures routières, équipements médicaux, écoles, mise en valeur agricole ou industrielle, maillage administratif.
Dans les faits, les résultats ne sont pas aussi brillants que le laisse supposer le commentaire.
La scolarisation atteint seulement 15% des enfants de colonisés d'Algérie en 1954. Le maillage médical est très inégal et surtout très insuffisant en zone rurale. La moitié des Algériennes accouchent en ville sans suivi, contre 7,8% des Européennes (Sylvie Thénault, Histoire de la guerre d'indépendance algérienne, Paris, Flammarion, collection Champs Histoire, p.39).
Sur le plan économique, les déséquilibres sont particulièrement forts. La colonisation agraire a été spécialement encouragée. Elle s'est manifestée d'une part, via la colonisation officielle par la distribution des terres du domaine public (préalablement agrandi aux dépens des « indigènes ») à de grands colons ou à des sociétés capitalistes et l'installation dans des villages de familles de petits colons. D'autre part, il s'agit de la colonisation privée par l'achat de terres par des colons aux propriétaires « indigènes », favorisé par la législation coloniale qui facilite la rupture de l'indivision traditionnelle. Ainsi les propriétés des colons représentent 2 726 700 hectares en 1950 soit 27,06 % du sol cultivable. En 1950, la taille moyenne d'une propriété européenne est de 123,73 hectares, à comparer aux 11,65 hectares chez les « indigènes ». Or les 630 732 propriétaires « indigènes » sont beaucoup plus nombreux que les 22 037 colons européens (Guy Pervillé, Atlas de la guerre d'Algérie, de la conquête à l'indépendance, Paris, éditions Autrement, collection « Atlas / Mémoires, 2003, page 12). L'agriculture européenne produit et commercialise la majeure partie des produits agricoles tandis que les fellahs en sont réduits à une agriculture de subsistance.
Sur le plan démographique, la propagande voit dans l'augmentation de la population musulmane la preuve des bienfaits de la colonisation qui crée les ressources alimentaires. Du fait de la transition démographique, c'est-à-dire une baisse continue de la mortalité associée à une forte hausse de la natalité, la population musulmane a en effet été multipliée par trois entre 1830 et 1954, passant de 3 à 9 millions, mais sans que son niveau de vie augmente dans les mêmes proportions. L'agriculture de subsistance des fellahs peine à nourrir en quantités suffisantes les bouches toujours plus nombreuses. Par conséquent, l'exode rural comme l'émigration vers la métropole s'accélèrent.
Sur le plan politique, l'Assemblée algérienne telle qu'elle est définie par le nouveau statut de 1947 entérine une flagrante inégalité. Elle est constituée de deux collèges, composé chacun de soixante représentants. Le premier collège représente les Français d'Algérie pleinement citoyens, hommes et femmes (soit 984 000 personnes en 1954), et une petite minorité de Français musulmans d'Algérie, autorisés à voter pour ce premier collège (65 000 personnes maximum). Le second collège concerne uniquement les « Français musulmans d'Algérie » (8 455 000 en 1954). Les femmes musulmanes ne disposeront du droit de vote qu'en 1958, alors que c'est à Alger qu'a été signée l'ordonnance du 21 avril 1944 qui accorde ce droit aux Françaises. Les élections truquées de l'Assemblée algérienne organisées par le nouveau gouverneur général Naegelen décrédibilisent l'ensemble de l'administration coloniale.
La nuit de la Toussaint Rouge, le 1er novembre 1954, qui marque le déclenchement de la guerre d'indépendance algérienne, vient apporter un violent démenti à la propagande française et sanctionner l'échec du projet colonial.