Capbreton : barrage flottant et démonstration du plan POLMAR
Notice
Dans le cadre du plan POLMAR, la Direction Départementale de l'Équipement des Landes a testé, à Capbreton, un barrage flottant conçu pour lutter contre différentes formes de pollutions marines, tout en assurant la formation des hommes chargés de son utilisation.
Éclairage
En ce mois de novembre 1987, l'expérience tentée à Capbreton pour juguler d'éventuelles pollutions marines semble rassurante. Le système de "barrage flottant" testé ce jour-là après les premiers accidents aux répercussions dramatiques survenus en Europe occidentale semble, en effet, pouvoir remédier au pire.
De fait, les plans POLMAR (Pollution Maritime), créés en 1978, à la suite de la catastrophe de l'Amoco Cadiz, au large de la Bretagne, fédèrent depuis leur création, tous les moyens pour limiter les dégâts causés par des pollutions accidentelles pouvant affecter les côtes. D'où l'idée de constituer deux pôles d'intervention interactifs : le plan POLMAR "mer", confié aux préfets maritimes, et le plan POLMAR "terre", confié aux préfets des départements concernés. Agissant conjointement, les deux structures permettent dès lors la mobilisation et la coordination de moyens de lutte préalablement identifiés et testés.
Si les nappes d'hydrocarbure du Torrey Canyon en 1967 au large de la Grande-Bretagne, de l'Amoco Cadiz en 1978, du Gino en 1979 et du Tanio en 1980, au large des côtes bretonnes, n'ont pas encore affecté les plages landaises, l'échouage de milliers de fûts remplis de produits toxiques en 1983 (voir Les plages de la Côte Aquitaine envahies par des fûts de produits chimiques), entre Bayonne et Arcachon, expliquent la vigilance des autorités qui s'attendent, à juste raison, à d'autres types de pollution : un jour ou l'autre, le golfe de Gascogne sera aussi concerné par la "marée noire". Elle constitue en effet, un danger imprévisible et incontournable sur une planète où l'écologie n'est pas encore un souci prépondérant. Les îles septentrionales des Féroé, au large de l'Écosse, n'ont-elles d'ailleurs pas déjà émis, en 1986, une série de timbres sur la question, mettant notamment en exergue les dangers liés à l'immersion en mer de produits toxiques et non toxiques ?
Situées en un point critique entre le cap Finisterre de Galice et le Finistère breton, les plages gasconnes sont effectivement très exposées car les courants marins, dans un mouvement centrifuge, y ramènent bon nombre de déchets rejetés en haute mer. Les plans POLMAR doivent donc pouvoir faire face aux situations les plus critiques, à tout moment, ce qui explique la nécessité de stocker du matériel performant et de former du personnel à son utilisation.
Les deux décennies qui suivent les essais menés le long de l'Estacada de Capbreton corroborent malheureusement ces craintes. Elles démontrent que l'ampleur croissante des pollutions rend dérisoire ce genre de moyens : limiter la progression de déchets dans un goulet est chose relativement aisée ; gérer la fusion de milliers de tonnes d'éléments polluants aux laisses de mer naturelles sur le sable fin et à vaste échelle, s'avère plus complexe. C'est la raison pour laquelle les moyens ont été démultipliés et les stratégies adaptées, entre 1992 et 2002, après les pollutions majeures de l'Aegian Sea, de l'Erika, de l'Ievoli Sun et surtout du Prestige.
Après les expériences-pilotes de 1987 et les accidents qui se sont effectivement succédés, POLMAR constitue, dans chaque zone sensible, des PC chargés de coordonner les opérations dans les plus brefs délais et dans une chaîne hiérarchisée d'évaluation et de décision ; il élargit aussi sa gamme de matériel spécialisé. Ainsi, dans les centres de stockage métropolitains (Dunkerque, Le Havre, Brest, Saint-Nazaire, Le Verdon, Sète, Marseille, Ajaccio et Paris) aux barrages flottants devenus "classiques" s'ajoute tout un arsenal spécialisé : écrémeuses, barges récupératrices, pompes, nettoyeurs à haute pression, réservoirs souples, matériel de raclage et cribleuses, groupes électrogènes, etc. Bientôt le Nautile, sous-marin de poche de l'IFREMER lancé en 1984 et utilisé pour plonger à de grandes profondeurs, vient s'ajouter à cette panoplie, opérant en cas de force majeure comme lors du colmatage des brèches ouvertes dans les flancs du Prestige qui laissent échapper, durant l'hiver 2002-2003, quelque 70 000 tonnes de fuel au large de la Corogne.
À Capbreton, seul port de la côte landaise, on a donc raison de s'inquiéter et de prévoir. Une "marée noire" aurait des incidences sur l'économie reposant sur la pêche et le tourisme ; elle constituerait un désastre pour l'avifaune et l'écosystème fragile et préservé, fait de dunes de sable recélant des espèces végétales parfois en voie de disparition. Deux décennies plus tard, les conclusions sur l'efficacité du barrage flottant "filmé par la télévision" semblent effectivement bien dérisoires...