Dax : thermalisme et tourisme
Notice
Station thermale réputée, Dax accueille dans ses établissements thermaux de nombreux curistes. Célèbre également pour ses fêtes patronales, la ville redouble d'efforts pour attirer les visiteurs, consciente que le tourisme constitue une deuxième source de richesse. Rencontre avec Max Moras, maire de Dax, et avec le directeur de l'office de tourisme.
Éclairage
Dax, sous-préfecture des Landes, n'est pas encore la première cité thermale de France en 1970 mais elle compte bien profiter de cette période faste, où la France est en plein essor, pour valoriser son potentiel. La ville peut s'enorgueillir, il est vrai, d'un riche passé, puisque, à l'époque romaine elle représentait la seule agglomération digne de ce nom en Aquitaine. Chef-lieu de cité des Tarbelli, elle devient tout naturellement évêché au IIIe siècle. C'est une "ville-pont" entre plusieurs pagi, une ville-marché, un point stratégique sur la route des Espagnes.
L'origine du thermalisme est aussi ancienne que la ville, comme l'atteste le toponyme émanant du syntagme latin Ad aquis, "aux eaux". Les fouilles menées depuis la fin du XIXe siècle ont d'ailleurs permis de mettre au jour de nombreuses substructions et du mobilier abondant et varié, tout l'équipement d'un castrum dont une partie des remparts d'origine est encore visible de nos jours. Témoin d'un lointain passé thermal, la source dénommée "Fontaine chaude" ou "Nèhe" [1] conserve des aménagements antiques exceptionnels dont rendent compte les différents sondages archéologiques [2], accréditant la thèse de Camille Jullian selon laquelle l'empereur Auguste, accompagné de sa fille Julia, y venait lui-même se soigner.
Huit siècles après Pierre de Saint-Paul, premier maire de Dax en 1189, Max Moras est à la tête d'un agglomération dont la population a décuplé depuis la Révolution. Elle est devenue, à la fin du XIXe siècle, un nœud ferroviaire sur l'axe Paris-Irun et Paris-Dax-Tarbes, favorisant le renouveau du thermalisme. C'est l'époque où l'hygiénisme pousse les édiles à démolir le château fort et abattre l'enceinte gallo-romaine de façon à "ouvrir" la ville. Dans l'Entre-deux-Guerres, on édifie de grands ensembles art déco, dont l'Atrium et l'hôtel Splendid construits par l'architecte girondin Roger-Henri Expert.
Aménagée pour accueillir une clientèle aisée, la ville reçoit effectivement les plus grands noms du monde politique et artistique de France et d'Europe. Mais cette époque est révolue et, dans les années 1950 il faut s'adapter. C'est un fait sur lequel insiste Max Moras : "La ville fait tous ses efforts pour faire plaisir à tous". Si, en ces années encore faciles des Trente Glorieuses, l'État-Providence assure toujours avec générosité le remboursement de soins thermaux, faisant croître de façon exponentielle la fréquentation des établissements de soins, les responsables avertis préfèrent déjà jouer ici sur deux tableaux, le thermalisme mais aussi le tourisme.
La situation privilégiée de Dax, entre Océan et Pyrénées, à une centaine de kilomètres de l'Espagne est en effet un atout majeur pour le tourisme qui, dans ces années d'aménagement de la côte aquitaine, se développe de façon parfois anarchique, dans les stations balnéaires. Dax se fait donc l'interface entre la zone côtière et l'arrière-pays dont on commence à promouvoir le patrimoine, à Arthous ou dans la Grande Lande, par exemple. D'où l'intérêt d'accentuer, à défaut de durée, la semaine des "fêtes patronales", accessibles à tous, moment privilégié où la cité "prend conscience d'elle-même".
Car la fête, à Dax, est une seconde nature. Depuis le Moyen Âge et jusqu'en 1950, ont lieu, deux fois par an, des foires aux bestiaux dans la grande tradition des comices agricoles. Prétextes à réjouissances, ces rassemblements donnent naissance à des jeux spontanés autour de vaches et taureaux [3] à l'instar de ce qui se fait de l'autre côté de la frontière, à Pampelune. Si d'aucuns assurent que l'origine du nom des Tarbelli se trouve dans la racine prélatine tarv-, « taureau », la tauromachie est effectivement à Dax, plaza de toros, plus qu'une tradition.
Et grâce à l'heureux mélange des cultures qui se croisent en ce carrefour antique, où sourd une eau bienfaisante, se pérennise la vocation de la ville devenue, à la fin du second millénaire, première cité thermale de France quand Vichy et d'autres villes d'eau s'enfoncent dans la crise ; se perpétue aussi la feria qui rassemble chaque année des milliers de hestaires [4], aux alentours du 15 août, jour de l'Assomption, et donc vraie fête patronale de la paroisse qui se trouve sous la protection de Notre Dame depuis le Moyen Âge...
[1] Nom prélatin d'une divinité bienfaisante attestée dans toute la Rhénanie (matronae Boudunneihae, Mahlinehae, matronae Veteranehae etc.)
[2] BOYRIE-FENIE, Bénédicte, Les Landes. Carte Archéologique de la Gaule, pré-inventaire archéologique publié sous la responsabilité de Michel Provost, Paris : Académie des Inscriptions et Belles Lettres, Ministère de la Culture et de la Francophonie, Ministère de l'Enseignement Supérieur et de la Recherche, 1995, 192 pages.
[3] Les jeux taurins sont attestés la première fois dans un texte de 1450 concernant les fêtes traditionnelles de la Saint-Jean, à Saint-Sever.
[4] Mot gascon, très prisé de nos jours, pour désigner un "fêtard", celui qui fait la fête (hèsta).