Rapport des experts des mines sur la catastrophe minière de Liévin
Notice
Rappel sur des images d'archives des événements de la catastrophe de Liévin le 27 décembre 1974. Une enquête a été ouverte dans laquelle les syndicats CGT, CFDT et FO se sont portés partie civile. On a attendu le rapport d'enquête du service des mines pendant 10 mois, entre temps le juge Pascal a été dessaisi. Premières réactions syndicales à ce rapport dont celle de Jean Pruvost, du Syndicat des Mineurs CFDT : "la présence de grisou dans le sang prouve qu'il y était présent". Claude Bouin, Secrétaire de l'Union Syndicale Mineurs CGT, considère que le service des mines est juge et partie et ne propose pas de suite judiciaire.
Éclairage
Moins d'un an après les tragiques événements de Liévin, l'affaire connaît ses premiers rebondissements avec la présentation des rapports d'expertise.
A la fin octobre 1975, la région Nord-Pas-de-Calais porte encore le deuil des 42 mineurs de fond qui ont péri à la suite du coup de poussière qui dévaste une galerie de la fosse 3 dite Saint-Amé du Siège 19 du groupe de Lens-Liévin, le 27 décembre 1974. Les premières minutes du reportage proposent d'ailleurs un rappel des faits sur fond d'images d'archives : la galerie était en préparation en vue d'une exploitation à venir ; la nouvelle des décès dévaste des familles entières ; une chapelle ardente est dressée à l'hôtel de ville de Liévin ; une double enquête, technique et judiciaire, est diligentée alors que le juge d'instruction Pascal est bientôt dessaisi en raison de vices de procédure invoqués par les avocats des Houillères. Il est vrai que ce "petit juge" était considéré comme (trop) partisan depuis sa conduite de l'affaire de Bruay-en-Artois, deux ans auparavant ; dans l'affaire de Liévin, il n'hésite pas à donner de sa personne (on le voit, couvert de poussière de charbon, de retour d'une inspection sur lieux mêmes de la catastrophe) et décide, le 5 juin 1975, d'inculper le directeur du siège 19 dont dépend la fosse 3bis, du motif d'homicide et blessures involontaires.
Sur le fond, les différentes parties s'opposent par rapports interposés : on en compte trois, émanant de la compagnie exploitante, des syndicats (FO, CGT et CFTD) qui se sont portés partie civile et enfin du Service des Mines, au nom du ministère de l'Industrie. C'est d'ailleurs là que le bât blesse dès lors que les Charbonnages de France, entreprise publique née de la nationalisation des compagnies minières privées en 1946, se trouve sous la tutelle de ce même ministère. Aux yeux du dernier syndicaliste interrogé, le Service des Mines est "juge et partie" et il en veut pour preuve qu'aucune suite judiciaire n'est préconisée, exonérant de fait la compagnie exploitante.
Si l'on en croit les deux derniers témoins, les charges sont pourtant accablantes : en amont de la catastrophe, on note la suppression de la vérification du site par un gazier, l'absence de grisoumétrie ou encore l'installation d'une bascule d'aérage sans autorisation ; au moment des faits, la présence de gaz semble avérée puisque les autopsies révèlent des taux particulièrement importants dans le sang, les poumons et le foie des mineurs décédés ; enfin, les arguties sur l'interprétation du terme "exploitation" donnent une image bien négative de la direction qui ne semble pas décidée à reconnaître sa responsabilité, au moins partielle, dans la catastrophe.
Reste à attendre que toute la lumière soit faite, comme l'avait solennellement promis le premier ministre Jacques Chirac lors des obsèques des victimes, et en somme que le procès se tienne.
Finalement, en 1978 la chambre d'accusation de Douai renvoit l'ingénieur responsable du siège, Augustin Coquidé, devant la chambre correctionnelle pour "maladresse, inattention et négligence". Il faudra attendre le jugement définitif encore trois ans, en 1981.