Sophie Guillin
Oui, le Centre Bretagne, c'est une région qui est à cheval sur 3 départements, le Finistère, les Côtes d'Armor et le Morbihan.
Une région qui s'est longtemps sentie oubliée, alors c'est peut-être pour ça qu'on y voit des initiatives tout à fait étonnantes.
Un exemple, le festival des vieilles charrues, à Carhaix.
A sa création, il y a 7 ans, à peu près 50 spectateurs, pour sa dernière édition cet été, 100 000 entrées.
Alors le Centre Bretagne est-il condamné à l'exploit ?
C'est un reportage d'Aline Mortamet et des équipes de France 3 Ouest.
Annie Mortamet
Dans le rôle de l'instituteur, Rémi L'Hôpital.
Pendant quelque temps, il a quitté sa région natale.
Il est très vite revenu au pays, avec d'autres copains il organise aujourd'hui le festival musical des vieilles charrues.
Rémi L'Hôpital
On a vu par expérience que si on laissait faire les instances départementales ou régionales, bon, ben c'était pas la peine, ça n'aboutissait pas et puis il valait mieux qu'on le fasse nous-mêmes.
Annie Mortamet
Dans le rôle des élus, les deux Michel, à droite Balbot, à gauche Morvant.
En 92 ils ont ensemble créé le GALCOB, une structure qui vise à soutenir les initiatives locales sans s'arrêter aux frontières administratives ou politiques des 3 départements.
Michel Morvant
Aujourd'hui, il y a des gens qui se battent pour le développement du Centre Ouest Bretagne, et euh ne désespérons pas, on a vraiment beaucoup évolué et on est certainement sur la bonne voie.
François Le Guern
Une baguette ?
Sophie Guillin
Enfin dans le rôle du boulanger, François Le Guern, un parisien débarqué à Carhaix il y a 40 ans, mais qui a déjà intégré les questions de ce fameux mais mystérieux pays du Centre Ouest Bretagne.
François Le Guern
Le centre bon, on est un petit peu délaissés.
Il est certain que si on avait eu la [incompris] depuis 20 ans, ben, le centre se serait certainement plus développé qu'il est actuellement.
Charles Gaulle (de)
(...) Près de 250 000 tonnes.
Sophie Guillin
Février 69, toute la question de l'épanouissement du Centre Bretagne en fait se pose à ce moment là.
Le général de Gaulle à Quimper vient présenter son projet de référendum sur la régionalisation et il promet des choses.
Charles Gaulle (de)
Voici que les décisions sont prises pour que une route à 3 voies lui serve d'axe central, par Loudéac et Carhaix.
Jean Jaffrennou
Ce sont des promesses qui ont été faites, jamais tenues, et véritablement là, les gens du Centre Bretagne aujourd'hui sont, sont déçus dans ce domaine.
Ils avaient, ils avaient le droit aussi à des aménagements, ils n'ont pas eu.
Annie Mortamet
Jean Jaffrennou est aujourd'hui directeur d'une société privée de chemins de fer à qui la SNCF sous-traite la ligne Carhaix-Guigamp-Pimpol.
Il a assisté à la fermeture de toutes les petites voies ferrées, au début des travaux de la voie rapide, qui n'est toujours pas achevée.
Mais il ne baisse pas les bras et quand on lui dit rentabilité, il répond service public pour la survie du pays.
Jean Jaffrennou
C'est vrai que les services aujourd'hui, pour moi c'est un droit, y compris au Centre Bretagne et quand on parle de rentabilité pose-t-on la, la question : le métro par exemple à Paris est-il rentable ?
Au nom d'une rentabilité euh les voitures jaunes n'iraient plus dans les, dans les fermes isolées, les école seraient fermées, donc je crois qu'aujourd'hui nous avons, nous avons un droit, ici au Centre Bretagne, droit d'avoir accès aux services.
Annie Mortamet
Justement, en mai 94, énorme manifestation à Langonnet pour défendre le bureau de poste.
Plus de 1.500 personnes se sont mobilisées dans une commune qui en compte à peine 2.000.
Tout le Centre Bretagne s'est senti concerné par le risque de voir ces 4 facteurs partir de la localité.
Octobre 95, opération ville morte à Carhaix.
On vient d'apprendre que le ministère de l'Aménagement du territoire ne retenait pas le Centre Bretagne comme pays test.
Un député, Daniel Pennec, engage une grève de la faim.
Daniel Pennec
Le problème pour le Centre Bretagne c'est la reconnaissance.
Cette interdépartementalité a beaucoup de difficulté à se mettre en place.
Annie Mortamet
Et le 14 octobre, c'est une vraie victoire, les 100 000 habitants du Centre Bretagne ont fait plier Paris.
Grâce à son nouveau statut de pays test, le GALCOB aura droit à plus de subventions.
Après 30 ans de résignation, l'espoir est revenu.
Michel Balbot
Et c'est vrai que le GALCOB, en ayant structuré ses 100 000 habitants en fait a donné, a servi un peu de porte-voix, et a donné cette, cette dimension, cette dimension indispensable quand on veut se faire entendre pour créer un rapport de force.
Annie Mortamet
Il y a 2 ans le Poher hebdo s'est lancé, à cheval sur les 3 départements.
Il a déjà 10 000 lecteurs.
Les jeunes reviennent s'installer au pays et le festival des vieilles charrues prend une ampleur insoupçonnée.
Catherine Boulanger
Quand on parle de Carhaix, les gens ne disent plus euh : ben c'est quoi ça, ça se passe où, c'est même où la Bretagne ?
Les gens disent : Carhaix, ben oui bien sûr on connaît, c'est les vieilles charrues, donc c'est pour ça, ça nous pousse un petit peu, ça nous fait plaisir.
Christian Troadec
On est en train de, de remonter la pente, et puis je trouve qu'on la remonte pas mal parce que il y a une confiance dans, dans les habitants.
Ils savent que, que la vie, elle existe toujours, on n'est pas un pays qui est mort, au contraire, il y a plein de choses qui se font, donc euh, je crois que ça, ça peut que se développer encore.
Annie Mortamet
Plus de 100 000 personnes, avec de grandes figures comme Charles Trénet, MC Solaar; et même des stars internationales comme ici Johnny Clegg.
L'édition 98 a été un succès, l'association des vieilles charrues a décidé cette année de verser ses bénéfices à Diwan, toujours fidèle à son principe : vivre et travailler au pays.