Jules Verne au Crotoy
Notice
On suit dans ce magazine des spécialistes de Jules Verne venus en Picardie sur les traces de l'écrivain en baie de Somme. A Saint-Valery, ils ont pris le petit train pour Le Crotoy. Nous découvrons au fur et à mesure comment la baie de Somme a marqué les romans de Jules Verne en particulier 20 000 Lieues sous les mer. Piero Gondolo della Riva, de la Société Jules Verne, rappelle les échanges de l'auteur avec son éditeur à propos du capitaine Nemo, un héros pas moral. Jean-Paul Dekiss, directeur du Centre international Jules Verne, souligne l'inventivité du roman avec le Nautilus. Le périple se termine à Mers-les-Bains où le groupe reconstitue la scène d'une photo célèbre de l'écrivain sur la plage.
Éclairage
Ces images ont été diffusées à la télévision en Mars 2005, lors du centenaire de la mort de Jules Verne. On nous montre des membres des Sociétés Jules Verne venues de plusieurs contrées (États-Unis, Israël, Pays-Bas etc...) se recueillir sur les traces de l'écrivain, prenant le petit train de la Baie de Somme à Saint-Valery jusqu'au Crotoy, admirant la maison occupée par la famille Verne dans le petit port de pêche. Les Verne qui ont d'abord vécu à Paris, après leur mariage en 1857, ont passé leurs vacances au Crotoy à partir de 1865, puis s'y sont installés toute l'année dès 1869 jusqu'en 1873 où ils ont déménagé vers Amiens, ville originaire d'Honorine de Viane l'épouse de l'écrivain, s'installant alors au 44 Boulevard Longueville. Il semble que le premier séjour de la famille en Baie de Somme ait eu pour raison la santé fragile du jeune Michel né en 1861. On remarque encore aujourd'hui que la maison du Crotoy, demeurée telle quelle avec sa façade blanche à un étage et ses volets verts, a pour caractéristique de n'être pas dans l'alignement de la rue mais légèrement en retrait et regardant vers le port dans la direction de l'est. On peut imaginer Jules Verne y concevant et écrivant deux de ses plus célèbres romans Vingt Mille Lieues sous les Mers (1870) et L'Île Mystérieuse (1874). Cependant, le romancier qui a fait l'acquisition en 1868 d'un caboteur le St Michel et l'a fait transformer et équiper en studio d'écriture, préfère être conduit au large par des pêcheurs locaux et écrire en pleine mer. "Mobilis in mobili", telle sera la devise de son héros, le capitaine Nemo. Comme Victor Hugo à Guernesey, l'écrivain que Jules Verne admire le plus depuis l'adolescence et qui vient de publier en 1866 les Travailleurs de la Mer, composé en exil dans l'île de Guernesey, le romancier amiénois exalte l'isolement et l'indépendance (jusqu'à la misanthropie dans le cas de Nemo) que procure l'océan. Les Voyages Extraordinaires qu'il s'est engagé à composer dans les vingt années suivantes par contrat avec l'éditeur Pierre-Jules Hetzel fondateur en 1864 du Magasin d'Éducation et de récréation l'amènent à voyager pour son plaisir, certes, mais aussi pour nourrir son imagination. Nantais d'origine (il est né dans l'Île Feydeau à Nantes), descendant par sa mère Sophie Allote de la Fuÿe d'une lignée d'armateurs écossais, neveu du bourlingueur Prudence Allote qui a nourri son enfance d'histoires de mer, Verne a senti très tôt l'appel du large. Bien avant d'acquérir le St Michel I, il a voyagé vers l'Écosse et la Norvège en 1859, puis s'est embarqué deux ans plus tard à Liverpool avec son frère Paul à bord du Great Eastern vers les Etats-Unis. Le succès de Cinq semaines en ballon (1862) qui lui fait signer son contrat avec Hetzel va lui permettre de poursuivre ses rêves maritimes. Il achète le St Michel II en 1874, l'année où il fait paraître Le Tour du monde en 80 jours. Puis fait l'acquisition du St Michel III en 1878, changeant pour la circonstance de port d'attache, passant du Crotoy au Tréport. À bord de ce dernier voilier dont il finira par se séparer en 1886, il entreprendra d'imposantes croisières vers l'Écosse et l'Irlande (1879) la Mer du Nord, la Hollande, le Danemark (1881) mais surtout les rives de la Mer Méditerranée (1884) voyage au cours duquel il rencontrera le Bey de Tunis ainsi que le Pape Leon XIII à Rome. La sédentarité forcée où le contraindra l'attentat perpétré par son neveu Gaston et les conséquences sur sa santé le feront s'intéresser in fine à la municipalité amiénoise. Il entrera au conseil municipal en 1888, s'occupant entre autres du dossier du Cirque dont il saluera l'inauguration en 1889. Le parcours jusqu'à la gloire de ce fils d'avoué, étudiant en droit passionné de théâtre, auteur de plusieurs pièces jouées grâce aux Dumas père et fils, mais aussi d'opérettes à la mode Offenbach, à deux doigts de prendre la direction du Théâtre Lyrique avant de soumettre un premier manuscrit à Hetzel, ressemble à une véritable navigation. Jules Verne est aujourd'hui encore, si l'on en croit les statistiques de 2011, l'écrivain français le plus traduit dans le monde.