Aménagement et urbanisme en Picardie
« Les villes ne s'y pressent pas sur un étroit espace comme sur la lisière flamande depuis Saint-Omer jusqu'à Valenciennes. » [1]
Voilà en quelques mots comment Albert Demangeon décrivait dans son ouvrage intitulé La Picardie et les régions voisines Artois-Beauvaisis-Cambrésis, publié en 1905, le semis des villes picardes. Plus d'un siècle plus tard, la Picardie reste une région présentant une densité de population moyenne à l'échelle française (100 hab./km² en 2009 contre 117 hab./km²), trois fois moins élevée que le Nord-Pas-de-Calais (329 hab./km²), neuf fois moins que l'Ile-de-France (972 hab./km²), mais presque deux fois plus forte qu'en Champagne-Ardenne (52 hab./km²). Cette moyenne régionale masque des différences significatives à l'échelle départementale - la densité de l'Oise (137 hab./km²) est près de deux fois supérieure à celle de l'Aisne (73 hab./km²) - et à l'échelle infra-départementale, en particulier dans l'Oise où les densités varient entre 204 hab./km² dans le sud-est de l'Oise et un peu plus de 100 hab./km² à l'ouest et au nord du département.
[1] Albert Demangeon, 1905, La Picardie et les régions voisines Artois-Beauvaisis-Cambrésis, Paris, Armand Colin, p. 399.
Le semis des villes reste toujours caractérisé aujourd'hui par la présence de nombreuses villes petites et moyennes. Seules deux unités urbaines comptent, en 2009, plus de 100 000 habitants : l'agglomération d'Amiens (163 072 habitants, 11 communes) et la conurbation de Creil-Nogent-sur-Oise-Montataire (116 662 habitants, 22 communes). Neuf villes moyennes comptent plus de 20 000 habitants (Beauvais, Compiègne, Chantilly et Soissons dans l'Oise ; Laon, Château-Thierry, Saint-Quentin et Tergnier dans l'Aisne ; Abbeville dans la Somme) tandis qu'une dizaine de petites villes constituent la base du réseau urbain picard. La Picardie reste ainsi une région globalement marquée par la ruralité, si on la compare aux deux grandes régions urbaines qui la bordent au nord et au sud, mais cette ruralité s'est considérablement transformée depuis le dernier quart du XXe siècle, en particulier du fait du processus de périurbanisation qui s'est développé en profondeur sur le territoire picard : seules 9% des communes picardes sont ainsi situées hors de l'influence des pôles urbains. Le processus de périurbanisation a ainsi aujourd'hui donné naissance à des territoires où rural et urbain sont inextricablement enchevêtrés , pour former de véritables « campagnes urbaines ».
Exode urbain : urbanisme consommateur de terres agricoles
Reportage sur l'exode urbain à la campagne dans les petits villages proches des grandes agglomérations. René Groussard du Centre national pour l'aménagement des structures des exploitations agricoles (CNASEA) , pense qu'il y a transformation de l'espace rural et une transformation de l'espace social. Dans un village proche d'Amiens, Mme Jeanine Sachy, explique les raisons pour lesquelles elle s'est installée à la campagne. Les agriculteurs perdent leurs terres et comme l'observe l'un d'eux, Daniel Bulot, il n'est plus possible d'avoir certaines activités, comme l'ouverture d'une porcherie.
Même si le caractère rural perdure, la Picardie offre, malgré tout, une riche gamme des formes et des modalités de l'urbanisme en France et de ses évolutions, du familistère de Godin à Guise, dont la construction commence dans les années 1850, au projet métropolitain Amiens 2030. Cette palette d'opérations ou de projets est assez représentative des inflexions, voire des ruptures, des pratiques et des politiques d'aménagement en France. Ce large éventail ne s'explique pas tant par la forte urbanisation de la région que par quatre séries de facteurs : les nécessités urbaines et urbanistiques liées aux effets des guerres au XXe siècle, la proximité de la région parisienne, les modalités du développement économique et de la croissance urbaine dans les années 1950-1960, le déploiement de politiques d'aménagement régional et des politiques urbaines à partir des années 1960.
Un « entre deux » de transit...
« Région d'entre deux » [2], entourée par deux régions urbaines et métropolitaines, l'Ile-de-France, région-capitale qui fait partie du club très restreint des villes mondiales, et le Nord-Pas-de-Calais, situé dans la mégalopole européenne , parfois appelée « banane bleue » , qui s'étend du bassin de Londres à la région milanaise, la Picardie est traversée par plusieurs grands corridors européens de transport, très fréquentés, voire saturés : la LGV Nord Europe reliant Paris à Londres (par le service Eurostar) ou à la Belgique et aux Pays-Bas (par le service Thalys) longe, pendant une très grande partie de sa traversée du territoire régional, l'autoroute A1, section de la route européenne E15 (Inverness-Algésiras). Malgré la présence de nombreux échangeurs autoroutiers et la construction, de haute lutte, de la gare TGV de Haute Picardie, ces axes de transport fonctionnent essentiellement comme des itinéraires de transit.
[2] Conseil Régional de Picardie, 2009, * Picardie Objectif 2030. Schéma Régional d'Aménagement et de Développement Durable du Territoire *, Amiens, p. 8.
La gare TGV Haute Picardie a accueilli 3 millions de passagers
La gare TGV Haute Picardie a fêté son 3 millionième passager, accueilli en fanfare et petits fours. Cependant les voyageurs interrogés se plaignent de cette gare au milieu de nulle part, à 45 minutes d'Amiens et sans places de parking. Pour la SNCF, la gare inaugurée en 1994 semble avoir trouvé sa vitesse de croisière. Pourtant, cette "gare des betteraves", construite loin d'Amiens a fait l'objet de polémiques qui, pour Dominique Vastel, directeur régional SNCF, n'ont plus raison d'être: 380 000 passagers y passent chaque année, le hall de gare va être refait, le parking agrandi, et une nouvelle destination (Strasbourg) est prévue pour 2007.
La fréquentation – et parfois la surfréquentation – de ces axes majeurs sur le plan français et européen a conduit les pouvoirs publics à imaginer puis à réaliser de nouvelles infrastructures devant à la fois soulager ces axes et améliorer l'accessibilité de certains territoires. Tel est le cas de l'autoroute A16, « l'Européenne », qui, en reliant la banlieue nord de l'agglomération parisienne à la frontière belge via Beauvais, Amiens et Abbeville, a permis de désenclaver la Picardie Maritime. Toutefois, la consultation des différents schémas directeurs autoroutiers ou ferroviaires [3] élaborés depuis 35 ans souligne combien les infrastructures actuellement en fonctionnement ne correspondent qu'à une partie des projets planifiés de construction.
Quoi de neuf depuis l'ouverture de l'autoroute A16 ?
La rubrique du JT Picardie Quoi de neuf depuis? a dressé un bilan de l'autoroute A16. En 15 ans d'existence, elle a largement contribué au développement touristique de la côte Picarde et de la Côte d'Opale. Les touristes étrangers représentent 30 % de la clientèle en Picardie et l'A16 a désenclavé une bonne partie du Nord Ouest de la France. Le tourisme n'est pas le seul secteur à en bénéficier, dans L'Oise, c'est un moteur économique, il a permis le développement de l'aéroport low cost de Beauvais. Seule critique dorénavant : le prix des péages.
La Baie de Somme touristique
Reportage qui nous explique et nous montre les atouts à la fois économiques et touristiques de la Baie de Somme. Les "locaux" y pratiquent la chasse au cercueil ou vivent de la pêche comme au Crotoy. Anne-Marie Goales du comité départemental du tourisme explique qu'il est pratiqué un tourisme familial qui est attiré avant tout par l'espace et la nature. Seul bémol au tableau la pollution des plages. Mais la Baie de Somme c'est aussi les prés-salés, les phoques, les bouchots et salicornes...
[3] On citera, par exemple, en ce qui concerne les infrastructures routières, le schéma directeur autoroutier de 1971, le programme autoroutier de 1977, les schémas directeurs de 1986, 1988 et 1992 ; pour le chemin de fer, on citera notamment le schéma directeur national des liaisons ferroviaires à grande vitesse de 1991 ou encore le Schéma National des Infrastructures de Transport (SNIT) de 2011, révisé en 2013.
... sous influence parisienne
Le tracé de ces infrastructures de transport et un certain nombre de politiques d'aménagement ne peuvent se comprendre qu'à l'échelle de l'ensemble du Bassin parisien et en fonction des logiques d'accès à la région métropolitaine de Paris.
L'aménagement des voies de communication en Picardie
La Picardie commence petit à petit à exister au delà des frontières linguistiques. Il faut maintenant trouver des cohérences entre différentes parties. A l'OREAP, Marc Leroy présente sur une carte de la Région, l'aménagement du territoire et les problèmes liés aux moyens de transport (l'autoroute A1 traverse sans desservir la région), le A4 et le A26 ne concernent qu'une petite partie de l'Aisne. Le A16 intéresse l'ouest et il y aura le A35 qui traversera d'ouest en est. Il faut combiner avec la SNCF (à réétudier pour les liaisons transversales). Dans le sud il faut se desserrer de la région parisienne. La vallée de l'Oise est à aménager et la côte picarde qui est la façade maritime doit intéresser toute la Picardie. Un schéma d'aménagement régional va faire la synthèse de tous ces projets.
Cette influence de la région-capitale peut aussi se traduire par différents projets d'installation de grands équipements, notamment d'infrastructures de transport, qui ont pu faire long feu, comme le soulignent les discussions, débats et conflits autour de l'implantation du troisième aéroport parisien. L'abandon d'un tel projet et la montée en puissance des compagnies aérienne low cost ont, en revanche, conduit au développement d'équipements existants, comme l'aéroport de Beauvais, devenu de facto le troisième aéroport « parisien ».
Bilan et perspectives de l'aéroport de Beauvais
Bilan et perspectives de l'aéroport de Beauvais-Tillé qui voit passer 200 000 passagers par an essentiellement en charters. L'idée serait de transformer Tillé en aéroport complémentaire de ceux du Bourget et de Roissy. Pour M Dupont de la CCI Beauvais, cet aéroport doit être multiservices et peut être complémentaire de Roissy. Déjà les investisseurs s'intéressent à cette opportunité.
Enfin, l'attractivité économique de l'agglomération parisienne se manifeste aussi par l'importance des migrations pendulaires à partir de la Picardie en direction de la région-capitale, hier comme aujourd'hui. Si la Picardie est soumise à ces attractions externes multiples, l'influence francilienne n'a cessé de s'accentuer, en particulier dans le sud de l'Oise et de l'Aisne que certains auteurs ont qualifié de « Picardie circumparisienne » [4]. La régionalisation, menée depuis le milieu des années 1950, qui a cherché à asseoir le rôle et la place d'Amiens sur le territoire régional n'a pas pu totalement bouleverser ces dynamiques centrifuges.
Les picards dans les trains de banlieue
Dans le Sud de la Picardie, l'attraction parisienne est nette : à partir de Creil, Compiègne, Beauvais, les trains de banlieue emmènent ceux qui travaillent sur Paris. Beaucoup sont venus habiter en Picardie et petit à petit les centres d'intérêt se sont réorientés sur la Picardie. Reportage et interviews des voyageurs dans l'un de ces trains.
Bilan de la régionalisation des TER
Depuis le 1er janvier 2002, les conseils régionaux sont chargés de gérer les TER. Bilan de cette régionalisation dans un reportage où l'on suit un picard de Crépy qui utilise quotidiennement le TER pour se rendre sur Paris. Les retards, sont, comme avant, importants. Lionel Toussaint, président de l'association des usagers du Paris-Laon, dénonce les problèmes de matériel, cependant la situation s'est améliorée avec la régionalisation. Le conseil régional a acheté de nouveaux matériels et, comme le souligne Jacques Goolen, son directeur régional, la SNCF a désormais des contraintes financières si les objectifs ne sont pas respectés.
[4] Pierre Flatrès (dir.), 1980, Atlas de la France moderne. Nord et Picardie, Paris, Flammarion.
Villes et urbanisme en Picardie : expérimentations et reconstructions
Si l'urbaniste et architecte Gaston Bardet date l'apparition du terme urbanisme dans la langue française des années 1910, la critique de la société industrielle donne lieu à des expérimentations urbanistiques dès le dernier tiers du XIXe siècle : à Guise, par exemple, le familistère édifié sous la houlette de Jean-Baptiste Godin fait partie de ces premières réalisations marquantes de l'histoire et des théories de l'urbanisme . Les deux conflits mondiaux qui ont fortement touché les villes picardes, en particulier Amiens, ont également conduit à la mise en œuvre de politiques d'aménagement urbain.
Le familistère de Godin : l'utopie réalisée
Jean-Baptiste Godin créé à Guise une industrie de fabrication d'appareils de chauffage en fonte - le poêle Godin- et regroupe son personnel dans un lieu coopérative qu'il appelle le familistère. A sa mort en 1888, il lègue ses usines et le familistères à ses ouvriers en co-propriété. Autour de l'architecte Pierre Riboulet, Annick Osmont, sociologue, Anatole Kopp, architecte , Jean- Louis Veiret, architecte, et M Migrenne bibliothécaire à Guise, décrivent l'organisation de ce lieu encore habité, qui possédait magasins d'alimentation, des bains, une piscine, des crèches, des écoles, une bibliothèque, un théâtre.
A l'échelle française, la logique des reconstructions qui débutent à l'issue de la Première Guerre mondiale correspond globalement à des propositions architecturales et urbanistiques aboutissant à reconstruire le tissu urbain détruit à l'identique ou presque. C'est le cas à Amiens où le plan proposé par Louis Duthoit, puis modifié par la municipalité, n'a que très marginalement modifié la structure de la ville. En revanche, après les nombreuses destructions de la Seconde Guerre mondiale (la ville d'Amiens est détruite à 41%, son centre-ville aux trois quarts [5]), le processus de reconstruction qui dure un peu plus d'une quinzaine d'années (des premiers plans et du premier projet élaboré en octobre 1940 à l'ouverture de la gare en 1957) propose une transformation beaucoup plus profonde du centre-ville : nouvelle voirie, remembrement parcellaire, ambition monumentale sont alors au rendez-vous. Cependant, les premiers projets élaborés sont au fur et à mesure modifiés, en particulier en 1947 puis en 1949, et intègrent différentes propositions architecturales, dont celle d'Auguste Perret concernant le quartier de la gare.
Max Lejeune visite les chantiers de la reconstruction à Amiens et assiste à la fête du bouquet
Dans ce document muet, Max Lejeune, secrétaire d'État aux Forces armées, visite les chantiers de la reconstruction dans le centre d'Amiens. Il est entouré de plusieurs personnalités dont Maurice Vast, maire d'Amiens. Après la cérémonie de la montée d'un bouquet remis à un ouvrier en haut d'un immeuble en construction, M. Vast, prononce un discours sur une petite tribune, place René Goblet.
La reconstruction d'Amiens : la tour et la gare Perret
C'est dès 1940 après les bombardements qu'Auguste Perret a ébauché les premiers projets de reconstruction de la gare d'Amiens. Les travaux ne débutent qu'en 1945 avec le projet ministériel d'aménagement du quartier gare. Les fondations de la tour ne débutent qu'en juillet 1949. Marion Tournon-Branly, élève de Perret, évoque le travail de conception de l'architecte à partir des volumes. Elle est achevée en 1952, mais Perret ne verra pas les travaux de la gare qui dureront de 1955 à 1958. Pour Etienne Tricaud, architecte de la SNCF, la gare de Perret est un premier pôle d'échange multimodal en faisant en sorte que le hall d'accueil soit au dessus du niveau des trains pour avoir une passerelle qui déverse l'ensemble des quais mais aussi la gare des bus.
[5] Collectif, 2013, Amiens. Histoire d'une ville, Amiens, SCEREN/ CRDP de l'académie d'Amiens.
Villes et urbanisme en Picardie : croissance urbaine et grands ensembles
L'agglomération amiénoise connaît une forte croissance économique et démographique à partir des années 1950 jusque dans les années 1970 : sa population passe alors de 105 912 habitants (recensement de 1954) à 156 340 habitants (recensement de 1975). Ce développement engendre une croissance urbaine qui se manifeste par la construction de nouveaux quartiers, à la périphérie de la ville existante, sous la forme de « grands ensembles ». Si l'urbaniste Maurice Rotival est le premier à utiliser l'expression « grand ensemble » [6] dès l'entre-deux-guerres, il n'existe pas de définition stricte de ces nouveaux quartiers. En France, il est possible de différencier trois grandes phases de construction des grands ensembles : la première génération correspond au début des années 1950 et aux premières lois cherchant à favoriser la construction de logements ; on citera, en particulier, la loi du 21 juillet 1950 qui vise cet objectif par la mise en place de systèmes de primes et de prêts à long terme et le plan Courant de 1953. Si l'arsenal législatif, réglementaire et opérationnel en faveur de la construction de logements collectifs en grand nombre se met en place au début de la décennie 1950, les premiers grands ensembles ne bénéficient pas encore d'une « boîte à outils » très bien pourvue. En revanche, tel n'est pas le cas de la seconde génération (celle des ZUP ) des années 1960, ni de la troisième (où les ZUP ont laissé place aux ZAC – Zones d'Aménagement Concerté) qui bénéficient de nombreux dispositifs opérationnels. A Amiens, le quartier d'Etouvie rend compte des évolutions entre les deux premières générations, tandis que la ZUP d'Amiens-Nord s'inscrit dans les logiques de la deuxième phase de construction des grands ensembles.
Le futur centre commercial d'Amiens Etouvie
Reportage à Etouvie, quartier neuf d'Amiens qui, avec ses 5000 habitants, ne possède pas ou peu de commerces. C'est pourquoi un centre commercial est en cours de réalisation. Il aura fallu attendre 20 ans. Des habitants témoignent des difficultés pour se ravitailler. Un responsable (des HLM ?) avoue qu'ils ont été dépassés par l'extension de ce quartier.
Les grands ensembles ne correspondent pas à une forme urbaine spécifiquement française, mais ils connaissent un portée particulière si l'on se fonde sur le nombre de mises en chantier : entre la fin des années 1950 et le milieu des années 1970, plus de 200 grands ensembles ont en effet été construits en France par l'intermédiaire des outils opérationnels de la ZUP ou de la ZAC [7]. L'ampleur de ce phénomène s'explique par la conjonction d'un système d'acteurs organisé autour d'un Etat centralisé et planificateur, d'outils d'aménagement opérationnels, d'une industrialisation massive de la production de logements, de l'attrait pour l'architecture moderne chez les décideurs et d'un contexte de besoins urgents en matière de logements plus confortables destinés aux classes moyennes, alors en pleine expansion dans la France des Trente Glorieuses.
[6] Maurice Rotival, 1935, « Les grands ensembles », L'Architecture d'aujourd'hui, vol. 1, n°6, pp. 57-72.
[7] Béatrice Giblin (dir.), 2009, Dictionnaire des banlieues, Paris, Larousse.
Villes et urbanisme en Picardie : politique de la ville et rénovation urbaine
Des critiques sur les défauts de conception et de réalisation des grands ensembles se font toutefois jour assez rapidement, dès le début des années 1960, c'est-à-dire au moment même où ces quartiers sont en train d'être édifiés. La circulaire du 21 mars 1973 relative aux formes d'urbanisation dites « grands ensembles » et à la lutte contre la ségrégation sociale par l'habitat (circulaire dite « barres et tours » ou encore « Guichard ») limite la construction d'ensembles de plus de 2000 logements, ce qui signifie la fin annoncée de la construction des grands ensembles, une fois achevés les programmes en cours de construction. Dès le milieu des années 1970, les défauts et les dysfonctionnements se manifestent d'autant plus clairement que la crise économique les souligne et les aggrave. Se mettent alors en place les premières initiatives qui vont déboucher sur la définition d'une politique en faveur des quartiers sensibles : la « politique de la ville ». Les vicissitudes de la politique de la ville depuis ses débuts et ses incessants changements depuis une quarantaine d'années débouchent sur diverses solutions dont la démolition et la démolition/reconstruction d'immeubles construits seulement quelques décennies auparavant.
Les derniers habitants de la barre d'immeubles Chardin à Amiens
Enquête sur la destruction d'un premier immeuble dans le quartier nord d'Amiens dont la construction remonte au tout début des années soixante. Cette opération n'est que le début d'un vaste programme d'amélioration de l'habitat et surtout des conditions de vie dans les zones dites "sensibles". Tout cela s'inscrit dans le cadre du grand projet de ville. En un an, plus de 400 logements vont disparaître. Mais pour les habitants interrogés, avant de penser à l'avenir, c'est d'abord, la fin d'une époque.
Si l'agglomération amiénoise a connu une forte croissance durant vingt-cinq ans, c'est également le cas de l'agglomération creilloise. En effet, si l'on compare cette dernière aux unités urbaines de même taille (unités urbaines de 50 000 à 100 000 habitants), celle-ci fait partie de celles qui ont connu la plus forte croissance démographique (+55% entre les recensements de 1954 et de 1975). Comme d'autres villes situées à moins de 100 kilomètres de Paris (Mantes ou Melun par exemple), Creil et sa région ont bénéficié de la croissance et de l'extension de l'agglomération parisienne, de la décentralisation industrielle puis du desserrement francilien, ce qui a impliqué de nombreuses transformations du tissu urbain existant et la construction de grands ensembles. Comme l'agglomération d'Amiens, l'agglomération creilloise se trouve confrontée à des problèmes de même nature concernant ces quartiers d'urbanisation récente.
L'urbanisme à Creil
Reportage à Creil, une ville en pleine expansion. Deux opérations d'urbanisme sont en cours : la rénovation du centre ville avec l'église classée Saint-Médard qui a été intégrée dans le nouveau quartier, et la ZAC du Moulin sur le plateau de Creil. Mise en œuvre par l'Office de HLM, Celle-ci bénéficie d'une architecture innovante et de décorations réalisées par des artistes. L'un d'eux témoigne sur les réactions des habitants à propos de son travail de sculpture.
Comme le souligne le cas creillois, les politiques urbaines ne se sont pas uniquement focalisées sur les espaces périphériques non bâtis ; elles ont également cherché à transformer les espaces déjà urbanisés. Si les années 1950 sont, à Amiens, des années de reconstruction et de construction des premiers grands ensembles, il faut attendre le milieu des années 1970 pour que s'engage le processus de rénovation/réhabilitation du quartier ancien de Saint-Leu.
Enquête sur la future rénovation du quartier Saint-Leu à Amiens
Daniel Bilalian (qui fait ici sa première apparition à la télévision), présente les projets de réhabilitation du quartier Saint-Leu à Amiens. Quartier historique et ouvrier de la capitale Picarde, Saint-Leu, constitué d'îlots autour de canaux dérivés de la Somme au pied de la cathédrale, n'a pas été rénové depuis l'après-guerre.
Quinze ans plus tard, à la fin des années 1980, c'est le centre-ville d'Amiens dans son ensemble qui connaît différents aménagements qui, d'une manière générale, cherchent à transformer l'image de la ville et à valoriser son potentiel patrimonial et touristique : piétonnisation des principales artères commerçantes en deux phases, réaménagement du quartier de la cathédrale, transformation du quartier de la gare, projet Citadelle.
Bibliographie
- Albert Demangeon, 1905, La Picardie et les régions voisines Artois-Beauvaisis-Cambrésis, Paris, Armand Colin
- Pierre Flatrès (dir.), 1980, Atlas de la France moderne. Nord et Picardie, Paris, Flammarion.
- Collectif, 2013, Amiens. Histoire d'une ville, Amiens, SCEREN/ CRDP de l'académie d'Amiens.
- Maurice Rotival, 1935, « Les grands ensembles », L'Architecture d'aujourd'hui, vol. 1, n°6, pp. 57-72.
- Béatrice Giblin (dir.), 2009, Dictionnaire des banlieues, Paris, Larousse.