Justin Godart

17 décembre 1971
03m 07s
Réf. 00368

Notice

Résumé :

Le musée Gadagne organise une exposition sur Justin Godart, dont la carrière politique a été extrêmement importante et en particulier à Lyon. L'archéologue Amable Audin évoque ses souvenirs avec ce grand personnage.

Date de diffusion :
17 décembre 1971
Source :
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Lieux :

Éclairage

En 1971, Rhône-Alpes Actualités annonce une exposition présentée à Lyon sur Justin Godart, personnalité lyonnaise de premier plan, défenseur de l'histoire et des traditions de la ville

Justin Godart est né dans le quartier des Brotteaux, à Lyon (6e). Il fait des études au petit séminaire de l'Argentière, puis au lycée Ampère à Lyon. Après avoir préparé une thèse en droit sur « L'ouvrier en soie », en 1901, il s'inscrit au barreau de Lyon et devient avocat et maître de conférence à l'université. Il épouse la fille d'un professeur de droit, Émile Cohendy, conseiller municipal et franc-maçon.

Militant fidèle au parti radical-socialiste, Justin Godart est élu adjoint au maire de Lyon dans la municipalité Augagneur en 1904. Il est ensuite député radical-socialiste de Lyon de 1906 à 1926, puis sénateur radical-socialiste du Rhône de 1926 à 1940. Justin Godart est parallèlement sous-secrétaire d'état à la santé militaire pendant la Première Guerre mondiale (1915-1920), ministre du Travail, de l'Hygiène, de l'Assistance et de la Prévoyance sociales (1924-1925) et ministre de la Santé publique (juin 1932-décembre 1932). Tout au long de sa carrière politique, Justin Godart a soutenu de nombreuses « causes ». Il s'engage particulièrement pour la défense des populations défavorisées dans une démarche où imposer l'hygiène est pour lui nécessité et source de progrès social. Son action pour les minorités (sociales, ethniques ou physiques) se traduit aussi bien par l'assistance aux malades (lutte contre le cancer, pour la défense des diminués physiques, création de la Fondation Foch...) que par un travail juridique et politique en faveur des lois sociales sur le travail. Il lutte toute sa vie contre la xénophobie, l'antisémitisme et le racisme. Il devient président de l'OSE (Œuvre de Secours aux Enfants) de 1933 aux années 1950. Le 10 juillet 1940, Justin Godart est l'un des 80 parlementaires qui refusent de voter les pleins pouvoirs à Pétain. Il s'engage alors dans la Résistance. Retiré dans le Beaujolais, il organise un réseau actif de résistance et préside le comité directeur de la zone sud du Front national de Libération, organisation de résistance de gauche. Il diffuse deux journaux clandestins : Le Patriote et Le Patriote Beaujolais. Avec son épouse Louise, ils abritent chez eux des Juifs tout en dissimulant dans le jardin de leur maison de Pommiers (Rhône) l'argent servant aux actions pour sauver d'autres Juifs. Pendant l'Occupation, il aida à la constitution, en 1943 à Grenoble, du Centre de Documentation juive auquel il apporta dès sa création son généreux concours. À la Libération, il devient un bref moment (1944-1945) maire de Lyon, en attendant le retour de déportation de son ami Édouard Herriot. Il soutient le combat d'Ho Chi Minh et des Vietnamiens pour leur indépendance dès 1946. Jusqu'à son décès en 1956, il préside le Comité français de défense des immigrés, et le Mouvement contre le racisme, l'antisémitisme et pour la paix.

L'émission du 17 décembre 1971 ne parle absolument pas des aspects de l'action politique de Justin Godart, dans la Résistance ni de son aide aux Juifs pourchassés et traqués. Il est vrai qu'à cette date le génocide des Juifs n'était pas au centre de l'histoire de la Seconde Guerre mondiale. La période est même qualifiée curieusement par Amable Audin de « coupure avec la ville de Lyon » dont Justin Godart s'est effectivement éloigné pour mener son action dans la Résistance. En revanche des anecdotes de peu d'importance sont relatées. Sans doute parce qu'une autre des facettes de Justin Godart était de s'intéresser à l'histoire de Lyon, aux ouvriers en soie, en particulier au mouvement associatif et coopératif et d'avoir contribué à ce que certains appellent la « lyonnitude » ; mais chez lui ce sentiment d'appartenance n'était pas refermé sur les traditions et sur lui-même, mais ouvert sur l'extérieur et les plus démunis. En 2004, il reçoit, à titre posthume, la médaille des Justes attribuée à celles et ceux qui ont aidé les Juifs pendant la Seconde Guerre mondiale et le régime de Vichy. Une rue de la Croix-Rousse à Lyon porte son nom depuis longtemps et une place Justin Godart a été inaugurée à Paris, le 10 juin 2006.

Michelle Zancarini

Transcription

Journaliste
Adjoint au maire de Lyon au début du siècle, député de Lyon en 1906, vice-président de la Chambre en 1914, sous-secrétaire d’Etat à la guerre, les documents exposés au musée Gadagne racontent un peu l’histoire de Justin Godart, qui a été, également, ministre du travail en 1924, sénateur puis ministre de la santé en 1932. Ses adversaires disaient de lui, « Nous ne sommes pas toujours d’accord avec Godart, mais il est toujours du parti des honnêtes gens ». Et à Lyon, bien sûr, Justin Godart a forgé sa carrière et de solides amitiés. Monsieur Amable Audin, vous avez, sans doute, vu plus d’une fois le balcon de cet hôtel de ville, monsieur Justin Godart, vous avez bien connu ?
Audin Amable
Oui, je l’ai beaucoup connu. J’étais, à ce moment là, très jeune. Et je me souviens, à la suite des élections de 1922, il est apparu sur ce balcon, et j’étais tout à fait dans les arrières plans. Enfin, j’étais derrière lui tout de même. Alors, c’est un souvenir qu'il est assez émouvant de rappeler maintenant.
Journaliste
Alors, quel homme était-il ?
Audin Amable
Ah ! C’était un homme extraordinaire. J’ai eu l’occasion de rencontrer pas mal de personnage très marquant, mais lui, il a une figure, une physionomie tout à fait spéciale. C’était un homme d’un dynamisme étonnant et d’une gaieté absolument, qui vous emportait. Je me souviens qu’il avait un très grand rire quand il arrivait chez nous, où il venait très souvent. Chaque fois qu’il venait à lire ou à faire une petite visite à la maison. Et il avait toujours une bonne histoire à raconter, une chose intéressante à montrer, et surtout, des documents extraordinaires qu’il trouvait à Paris, je ne sais pas comment. Je me souviens, en particulier, et cela montre bien sa facilité de découverte, il avait trouvé sur les quais, à Paris, une petite gravure, un petit dessin au crayon qui ne paraissait, qui ne semblait pas grand-chose. Et il avait identifié ce dessin comme la tête …, le dessin de la tête de Chalier après sa décapitation. Et il était dans une joie à nous montrer ce dessin et de l’avoir identifier. Et c’est d’autant plus émouvant, c’est que le musée Gadagne, et peut-être même sa collection, possédait le couteau … ce que je vous raconte n’est pas très drôle, mais enfin … c’est un …, tout de même un épisode, le couteau qui avait décapité Chalier, et que vous trouvez dans la même vitrine, maintenant, réunis, dans la salle de Justin Godart.
Journaliste
Alors, le nom de Justin Godart est, évidemment, très attaché à l’histoire de Lyon ?
Audin Amable
Oui, et à plusieurs titres. Il a été maire, comme vous le savez, il a été député, il a été sénateur du Rhône, … enfin, quoi que n’étant pas de famille lyonnaise, mais né à Lyon, il a toujours été très attaché à Lyon. Ses premiers travaux ont été faits sur les ouvriers en soie lyonnais. Et c’est cela, je crois, qui l’a lancé dans cette carrière sociale qui s’est terminée au ministère du travail. Et je me souviens, en effet, avoir été le voir au ministère du travail, à Paris, rue de Sèvres, et c’est encore des souvenirs assez amusants que j’ai conservés.
Journaliste
Pendant les heures sombres de l’occupation, il a, je crois, joué un rôle important au sein de la résistance ?
Audin Amable
Oui ! Alors, à ce moment là, il n’était pas à Lyon. Il y a eu une petite coupure. La guerre a constitué pour …, entre lui et nous, une coupure. Mais je l’ai retrouvé quand il est revenu à Lyon et nous avons renoué une vieille, une vieille amitié. Car, je l’ai connu, moi, étant enfant. Il était ami et tout à fait contemporain de mon père. Ils n’avaient que quelques semaines de différence. Et je ne sais pas à quelle date remonte leur amitié mais elle était très ancienne. Et c’est, pour moi, c’est un ami de toujours.