Commentateur
L'Iliouchine 18 de monsieur Kossyguine a quitté Moscou alors qu'il y faisait encore nuit, c'est à 11 heures, heure de Paris, qu'atterrit à Orly cet appareil, du même type que celui à bord duquel le Général de Gaulle avait effectué ses déplacements, en URSS, il y a 6 mois.
Aux côtés du Président du Conseil soviétique, salué comme un Chef d'Etat par une salve de 101 coups de canon, sa fille Ludmilla, dont le mari est membre du conseil pour la science, monsieur Andreï Gromyko, ministre des affaires étrangères, monsieur Vladimir [Kirilin] qui est Vice-Président du Conseil et aussi chef de la commission pour la science et la technologie.
Les images de l'arrivée à Orly sont transmises, en direct, à Moscou par l'intermédiaire du satellite Molniya 1.
La speakerine de la télévision soviétique a présenté ces images comme celles d'un événement d'une grande importance.
Les allocutions qui vont être prononcées, dans le salon d'honneur d'Orly, vont souligner cette importance.
Charles de Gaulle
Auparavant, deux fillettes, filles du personnel de l'ambassade soviétique, qui ont revêtu l'uniforme rouge et blanc des pionniers, deux fillettes remettent au Général de Gaulle et à monsieur Kossyguine, des gerbes de bienvenue, et ce sont aussi les présentations d'usage.
Monsieur le Président, vous êtes en France le très bienvenu. Sans doute, dans la vive satisfaction que nous avons à vous recevoir, la considération que nous inspire votre valeur, joue-t-elle un rôle considérable.
Car on connaît bien et on estime beaucoup ici vos grandes et multiples capacités.
Mais aussi, vous êtes un éminent dirigeant de l'Union soviétique, accompagné par des personnalités, telles que celles qui vous entourent, et c'est pour cela également, que votre visite suscite chez nous un très cordial intérêt.
Car le peuple français n'a rien oublié de la part qui fut prise, la part magnifique qui fut prise, par le peuple et par l'armée, russes dans la victoire commune qui assura son propre destin, et il se rend compte aujourd'hui, de l'extraordinaire effort déployé par votre pays, pour mettre pacifiquement en oeuvre toutes ces ressources, matérielles et humaines.
Il se trouve enfin, que votre présence marque d'un éclat dont nous ne pouvons que vous féliciter, la coopération qui s'organise entre nos Etats, pour le bien de nos deux peuples, et en même temps, pour l'équilibre, le progrès et la paix du monde.
C'est dire, Monsieur le Président, de quel coeur la France vous accueille aujourd'hui. Vive l'Union Soviétique !
Alexis Kossyguine
[russe]
Traducteur
Monsieur le Président de la République, Général de Gaulle, je tiens à vous remercier sincèrement et cordialement des bonnes paroles que vous avez bien voulues prononcer à l'adresse de notre pays et de notre peuple.
Alexis Kossyguine
[russe]
Traducteur
L'été dernier, Moscou vous disait : au revoir monsieur le Président, ainsi qu'aux personnalités de votre suite, au terme de votre visite en Union soviétique, visite couronnée de succès.
A la suite des entretiens de Moscou, la compréhension mutuelle s'est étendue et s'est renforcée entre les deux pays sur le plan international.
En parlant des résultats de cette visite, nous avons dit alors, qu'elle a permis d'ouvrir une nouvelle page, dans l'histoire des relations entre l'URSS et la France.
Aujourd'hui, cinq mois après, commence, à Paris cette fois-ci, de nouvelles rencontres et de nouveaux entretiens soviéto-français.
Ce fait signifie d'abord que les deux parties sont animées d'une ferme volonté de ne pas se contenter des résultats déjà obtenus, résultats bons et utiles, mais d'oeuvrer davantage pour promouvoir l'entente et l'amitié entre l'Union Soviétique et la France.
Cela signifie encore que, nos deux pays, guidés de leurs intérêts nationaux, suivent une voie commune et en même temps indépendante pour chacun d'eux, voie de la coopération tendant à consolider la sécurité des peuples soviétique et français, la sécurité européenne et internationale.
Alexis Kossyguine
[russe]
Traducteur
Des périodes caractérisées par un certain vide dans les relations franco-soviétiques, quelles qu'en soit les origines, deviennent l'apanage du passé, puisque, loin d'être une règle, elles constituaient une exception pour nos deux pays et les relations entre nos deux peuples.
L'évolution des évènements en Europe, et au-delà de ses limites, ne fait que prouver d'une façon de plus en plus convaincante, l'utilité et la bienfaisance du rapprochement soviéto-français qui exerce une grande influence positive sur la vie internationale.
En même temps, ce rapprochement n'est pas dirigé contre quelque pays que ce soit, ni ne menace aucun intérêt légitime.
Alexis Kossyguine
[russe]
Traducteur
C'est inspiré d'un désir profond de faire avancer et de consolider ce qui a été obtenu, au cours des pourparlers, entre les dirigeants soviétiques et le Président de la République française, que nous avons répondu, avec gratitude, à l'aimable invitation du Général de Gaulle, de visiter la France, en visite d'amitié.
Alexis Kossyguine
[russe]
Traducteur
Que le grand peuple de ce grand pays soit persuadé que les salutations et les bons voeux que nous sommes chargés de transmettre au Président et au gouvernement de la République française, à toutes les Françaises et à tous les Français, traduisent bien la volonté et l'espoir de l'Union soviétique, ainsi que du peuple soviétique, votre ami sincère.
Puisse l'entente, entre l'Union Soviétique et la France, devenir toujours plus cordiale, l'amitié entre le peuple soviétique et français, toujours plus solide, et la coopération s'étendre à des domaines toujours nouveaux.
Je vous remercie de votre accueil chaleureux sur le sol français.
Commentateur
Le cortège a quitté Orly et a très rapidement gagné Paris. Nous retrouvons ici monsieur Kossyguine au côté du Général de Gaulle et saluant les parisiens qui l'applaudissent, Boulevard Saint Michel.
C'est au ministère des affaires étrangères que monsieur Kossyguine résidera, pendant son séjour à Paris, et nous arrivons, précisément avec lui, au Quai d'Orsay.
Quai d'Orsay dont monsieur Kossyguine gravit les marches, toujours accompagné du Général de Gaulle.
Etape suivante : l'Arc de Triomphe de l'Etoile. Cette fois, monsieur Kossyguine est au côté de monsieur Georges Pompidou, Premier Ministre, en remontant les Champs-Elysées, où flottent les drapeaux soviétiques et français, sous un ciel gris mais lumineux.
Assistent à la cérémonie, du côté français, messieurs Messmer, ministre des armées, et Sanguinetti, ministre des anciens combattants.
Assisté de deux officiers généraux soviétiques, monsieur Kossyguine dépose une gerbe cravatée aux couleurs de son pays sur la tombe de notre soldat inconnu.
La matinée s'achève avec cette cérémonie, la seule cérémonie publique à laquelle participera monsieur Kossyguine pendant son séjour à Paris.
Et nous voici au Palais de l'Elysée, où le Général de Gaulle offre un déjeuner intime en l'honneur du Président du Conseil soviétique.
Un instant après monsieur Kossyguine, c'est la fille du Président du conseil soviétique, madame [Gvichiani] qui arrive, accompagnée de madame Olivier Wormser, épouse de l'ambassadeur de France à Moscou.
Et côté jardin, sur le grand perron de l'Elysée, selon la tradition la plus éprouvée, quelques minutes de pose, pour les photographes et les cameramen, avant de passer dans la salle à manger de l'Elysée.
La suite de la journée se déroulera selon la tradition également avec la présentation des chefs de mission diplomatique, au Quai d'Orsay.
Ils sont tous là, bien sûr, les ambassadeurs, y compris, vous le verrez dans 15 secondes, l'ambassadeur de Chine.
Après quoi, monsieur Kossyguine reprendra le chemin de l'Elysée, et c'est ici qu'on entrera, si je puis dire, dans le vif du sujet, avec un entretien, en tête-à-tête, entre le Général de Gaulle et monsieur Kossyguine.
Entretien assurément important car il s'est prolongé, pendant près de deux heures, ce qui indique bien que du côté français comme du côté soviétique, on attache une haute signification à ce voyage.