Papeterie de Tartas : l'histoire d'un combat syndical réussi
Notice
A l'occasion de la parution du livre Les Fumées de la Papète de Tartas, retour sur le combat syndical qui a mobilisé pendant quatre mois, en 1994, population locale, associations et élus, et qui a abouti au maintien de l'activité de la Cellulose du Pin de Tartas, suite à son rachat par le groupe canadien Cascades et Tembec.
Éclairage
L'histoire de la papeterie de Tartas a été profondément marquée par le mouvement social de 1994. C'était le combat de toute une région qui avait permis le rachat de l'usine par le groupe canadien Cascades et Tembec. Paru dix ans plus tard, un livre, Les Fumées de la Papète de Tartas, relate les épisodes de cet affrontement afin que la lutte de la "Papète" ne soit pas oubliée.
Lorsqu'en janvier 1994 Saint-Gobain, alors propriétaire de la Cellulose du Pin, avait annoncé la fermeture de l'usine, ce fut ressenti comme une véritable catastrophe pour le bassin industriel de Tartas. Selon la direction, cette décision était motivée par l'absence de rentabilité du site au moment même où l'industrie papetière était en pleine récession.
Les motifs invoqués étaient nombreux : marché en surcapacité, taille insuffisante pour être compétitive face à des concurrents quatre fois plus importants (résultant des difficultés à s'approvisionner dans le massif landais), procédés de fabrication dépassés etc. Il aurait été nécessaire d'investir lourdement pour les faire évoluer mais devant le montant des pertes, la direction refusa : en 1993, la Cellulose du Pin avait perdu 150 millions de francs pour un volume d'activité de 400 millions.
La disparition de la papeterie aurait eu de lourdes conséquences pour le département : aux 300 emplois sur site s'ajoutait la dépendance du millier d'exploitants sylvicoles, bûcherons et transporteurs qui l'approvisionnaient. En absorbant près du quart des ressources du massif forestier landais dans le domaine du bois d'industrie (déchets de scieries et coupes d'éclaircies), la fermeture de l'usine aurait eu un effet dévastateur sur l'équilibre de la filière bois.
Cet ensemble de critères explique la levée de boucliers qui se dressa alors contre ce projet. Élus, habitants et employés de la papeterie avaient fait pression pour le maintien de l'activité industrielle et la revente du site.
Le conflit dura quatre mois et un grand nombre d'actions furent entreprises : manifestations dans la région et à Paris, grèves ponctuelles, retenue de la direction pour faire pression sur Saint-Gobain etc. Mais ce fut surtout l'élaboration d'une expertise sur la viabilité de l'usine qui allait permettre son rachat : celle-ci prouva que Saint-Gobain avait sous-évalué la rentabilité du site alors que celui-ci était économiquement viable.
Grâce à la détermination des manifestants, la papeterie fut finalement revendue à un franc symbolique aux canadiens Cascades et Tembec. Mieux encore, ceux-ci acquirent l'usine sans ses dettes, et avec un plan d'accompagnement à la retraite d'une partie des employés. N'ayant à supporter ni les amortissements ni les frais financiers - et grâce à un véritable boom de la pâte absorbante "fluff" après plusieurs années de baisse - les nouveaux acquéreurs parvinrent à redresser l'usine.
Quel en est le bilan dix ans plus tard ? Sur l'usine, il est impressionnant : 130 millions d'euros d'autofinancement on été dégagés, tandis que 45 millions ont été investis pour un résultat net de près de 35 millions. Quant aux emplois, la papeterie n'est jamais descendue au-dessous de 259 salariés. Et en 2004 elle comptait 310 personnes, soit 13 de plus qu'en 1994.