La filière gras dans les Landes
Notice
Présentation de différents aspects de la filière gras dans les Landes : du marché au gras de Pomarez à l'exploitation d'un producteur de canards gras à Maylis sous contrat avec l'un des plus grands conserveurs français, en passant par l'obtention de l'IGP Sud-Ouest pour protéger les producteurs locaux de la concurrence étrangère.
Éclairage
L'élevage des palmipèdes gras est une tradition bien ancrée dans le sud-ouest de la France, mais, contrairement à ce que voudrait faire croire ce reportage, daté de 1996, ce que l'on engraissait c'était des oies et en petite quantité pour une production saisonnière. Á partir de 1960, sous l'impulsion de plusieurs facteurs, le canard a pris le dessus et l'oie a été abandonnée dans de nombreuses régions. Ces facteurs sont d'ordre économique général : l'élévation du niveau de vie qui a permis une certaine généralisation de la consommation de foie gras ou l'évolution de l'agriculture qui a obligé les petites exploitations à se lancer dans des activités spécialisées, ou d'ordre technique, comme le développement de la congélation qui a permis de s'affranchir des modes de conservation traditionnelle (confits) pour proposer de nouveaux produits plus faciles à stocker et à préparer comme le magret créé vers 1960 par André Daguin, restaurateur à Auch. Or, le canard présente plusieurs avantages par rapport à l'oie : gavage moins contraignant (deux fois par jour au lieu de trois) et plus court (quinze jours au lieu de trois semaines), viande plus tendre, foie moins volumineux et donc moins cher. La forte hausse de la production de palmipèdes, la rationalisation des méthodes de gavage et l'augmentation pharamineuse de la taille des élevages ont entraîné une baisse des prix et une généralisation de la consommation hors de périodes (fin d'année) et des zones traditionnelles (Alsace, Sud-Ouest).
Si bien que ce marché qui est décrit dans ce reportage comme traditionnel ne présente qu'une tradition bien récente, une quinzaine d'années tout au plus. Il met en valeur la petite production familiale, enfin relativement petite, quelques centaines de canards, destinée à de petits conserveurs régionaux, à des particuliers ou des professionnels (restaurateurs, bouchers) réalisant eux-mêmes leurs conserves. Un certain nombre des petits (et aussi moyens) producteurs pratiquent également la vente directe à la ferme, bénéficiant du développement du tourisme rural. Mais ce n'est là que la partie émergée de l'iceberg, d'ailleurs en perte de vitesse si l'on en croit l'évolution des apports au marché de Pomarez : la masse de l'activité conserve est aux mains de quelques grandes sociétés, originaires des zones traditionnelles de production (Périgord, Landes) qui, devant la forte hausse de la demande, ne pouvaient plus se contenter de s'approvisionner sur les marchés locaux. Elles mirent donc en place un réseau de gaveurs tenus par des contrats et obligés, de par les investissements qu'ils doivent consentir, à produire toujours plus à des prix tout juste rémunérateurs et qui ne peuvent qu'espérer, comme le producteur présenté dans le reportage, une hypothétique et bien improbable hausse des cours.
Il faut bien dire que cette évolution n'a pas favorisé la recherche ou le maintien de la qualité, ce qui explique la réaction des producteurs "indépendants" qui ont obtenu la création d'une IGP palmipèdes du Sud-Ouest afin de lutter contre la concurrence nationale (Vendée, Bretagne) et bientôt européenne (Hongrie).