Le Centre Dramatique de l'Ouest fête ses cinquante ans
Notice
A l'occasion des 50 ans de la Comédie de l'Ouest, Guy Parigot évoque l'histoire de la CDO. Troupe itinérante, elle a initié la décentralisation culturelle dans l'Ouest, et, a participé à la mise en place de la Maison de la culture de Rennes.
Éclairage
Dès l'Entre-Deux-Guerres se dessine chez quelques-uns (voir par exemple le rapport de Charles Dullin) l'idée de décentralisation des arts dramatiques. Mais, c'est bien après la Deuxième Guerre mondiale que celle-ci va devenir effective. S'appuyant sur les réflexions et les expériences durant la guerre, notamment celle de "Jeunes France" sous Vichy, Jeanne Laurent, tout juste nommée sous directrice des spectacles et de la musique à la Direction Générale des Arts et des Lettres, va mener à bien la décentralisation théâtrale, aidée et inspirée des embryons d'activités théâtrales existant déjà hors de Paris. Entre 1947 et 1951, cinq Centres Dramatiques vont être crées et devenir les symboles d'une décentralisation réussie. A Strasbourg, le tout récent Centre Dramatique de l'Est sert de modèle et d'impulsion pour le reste de la France. Toulouse et Saint Etienne suivent la marche. Viennent ensuite la Provence et l'Ouest.
A Rennes, le projet est porté par une troupe amateur "les Jeunes Comédiens". Il faut souligner ici la forte tradition de théâtre amateur existant depuis longtemps en Bretagne, notamment grâce aux patronages, laïcs ou religieux. Malgré son statut d'amateur, la troupe est fortement structurée et joue beaucoup. En effet, depuis la constitution de la troupe en 1940 par un avocat passionné de théâtre, Jean-Louis Bertrand, "les Jeunes Comédiens" tournent leurs créations dans quelques villes de Bretagne, dans des conditions peu enviables, mais comblant un vide théâtral bien réel. Ils se présentent même à Paris lors des concours "Jeunes Compagnies", conçu pour repérer de nouveaux "talents". Ils vont y briller, puisqu'ils remportent le deuxième prix en 1946 puis le premier prix en 1947. Cette bonne connaissance du terrain breton, et donc aussi de ses carences, la fidélisation en quelques années d'un public, ainsi que cette toute nouvelle reconnaissance nationale destinent la troupe amateur à porter la décentralisation théâtrale pour l'Ouest. La professionnalisation d'une partie de la troupe est décidée.
La rencontre entre Hubert Gignoux et Guy Parigot, qui se côtoient lors de stages de formation qu'anime le premier, est décisive. Ils proposent ensemble un projet à Jeanne Laurent, qui les appuiera ensuite auprès de la municipalité, leur permettant ainsi d'obtenir différentes subventions (étatique et municipale), indispensables au fonctionnement d'une future institution théâtrale. En novembre 1949, sous la direction d'Hubert Gignoux, naît alors le Centre Dramatique de l'Ouest, ayant pour mission la création de spectacles de théâtre et leur diffusion dans le grand Ouest. En ce sens, la venue du parisien Hubert Gignoux laisse penser que le CDO s'apparente d'abord à une déconcentration théâtrale avant d'être une décentralisation effective. Cependant, dans un contexte où l'art lyrique et les tournées parisiennes privées (pas toujours de très bonnes qualités) dominent, le CDO offre une nouvelle perspective artistique en Bretagne.
Bibliographie :
Nathalie Ribet, Aux origines du Théâtre National de Bretagne, la décentralisation dans l'Ouest de 1943 à 1963, Paris, L'Harmattan, 2000.