Les projets de Balladur et de Lamour pour le littoral
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Philippe Lamour exprime le besoin de réaliser de nouvelles stations balnéaires sur le littoral du Languedoc-Roussillon. Jean Balladur, architecte en chef du projet de La Grande-Motte, explique la conception « d’unité touristique » et insiste sur la nécessité de créer des équipements modernes pour les jeunes générations.
Date de publication du document :
21 déc. 2022
Date de diffusion :
02 août 1964
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Contexte historique
ParProfesseur émérite de géographie
Comment se représenter le Languedoc-Roussillon au début des années 1960, alors que la DATAR, mandatée par le premier ministre du Général de Gaulle, a stimulé la création de la Mission Racine pour aménager le littoral de la région ? On la sait sous-industrialisée, fortement marquée par les concurrences urbaines et largement dépendante de son vignoble de masse. Elle accueille nombre de rapatriés d’Afrique du Nord qui enrichissent un solde migratoire positif, car c’est une région qui répond bien aux sollicitations de l’héliotropisme. Longtemps marquée par l’exode rural, elle connait une inversion des tendances et Montpellier s’affirme comme capitale attractive, notamment grâce à son université. Le département de l’Hérault s’individualise par une croissance démographique et économique reconnue, que le premier chantier du littoral, La Grande-Motte, va en quelque sorte accélérer tant en termes d’emplois que d’image. La politique du département est alors conduite par Jean Bène, certes ardent défenseur de la viticulture régionale, mais aussi président de l’Entente interdépartementale pour la démoustication (EID) du littoral méditerranéen, de la Société d'aménagement du département de l'Hérault (SADH) et membre actif de la CNABRL ainsi que de la Mission interministérielle Racine. Rien d’étonnant que La Grande-Motte, dont le port est en travaux dès 1965, soit souhaitée exemplaire : figure d’un projet global d’aménagement et de renversement de l’image du littoral. Car celui-ci, tourné vers des pratiques populaires locales qui en définissent l’occupation, souffre d’une absence d’aménagements cohérents. L’État espagnol a lancé sur la Costa Brava voisine un vaste plan de modernisation des stations touristiques qui attirent les touristes de l’Europe du Nord traversant en nombre le Languedoc-Roussillon sans s’y arrêter.
Philippe Lamour, président de la Compagnie nationale d’aménagement du Bas-Rhône Languedoc (CNABRL) qui a pour objectif l’irrigation du Gard et de l’Hérault viticoles, souligne l’intérêt que représentent la Mission, pour une région en mal de tourisme organisé, et les apports d’eau, pour les stations en devenir. La CNABRL est une réussite technique, économique et sociale qui sert de modèle et ouvre la voie à une transformation déterminante de territoires en attente d’aménagement. Le littoral, de la Pointe de l’Espiguette au Cap Cerbère, est un espace souvent qualifié de vierge, mais doté d’un riche potentiel de développement. Les bourgeonnements d’installations de loisirs et de tourisme sur le front de mer, des cabanes et du camping sauvage, pratiques alors courantes, l’ont enlaidi. La médiocrité de certaines réalisations impose une modernisation de ses structures.
Ce territoire demeure organisé en un réseau de villages et de petits ports de pêche qui prétendent s’afficher « stations balnéaires » sans en avoir réellement les capacités. Les héritages patrimoniaux jouxtent des espaces de nature que l’on se plaît à définir comme abandonnés et désertiques. Ils justifient la volonté nationale d’aménager cette côte rectiligne, essentiellement sableuse, de respecter et d’enrichir ses lieux de vie, d’honorer ses héritages. Face à ce que le discours officiel décrit comme une banlieue balnéaire, le projet de la Mission dévoile le souci de personnaliser des stations nouvelles au sein de six Unités touristiques (U.T) afin que cette côte ne ressemble à aucune autre et qu’elle puisse ainsi affirmer son identité. La séduction doit être de règle, le conformisme évité, les usages de la mer et du sable offerts au plus grand nombre et surtout à la jeunesse dont on dit alors connaître le goût du sport, de la nature, de la mer et de la solitude. Jean Balladur, architecte en chef de la station nouvelle de La Grande-Motte, insiste sur l’harmonie indispensable que la station doit transmettre, la beauté et l’esthétique étant essentielles. Sans oublier que le littoral doit compter quelque 500 000 lits touristiques indispensables à l’accueil de plus d’un million de touristes. Ces volumes définissent clairement l’ampleur de la tâche et l’échelle des stations. Vingt ans, c’est le temps que se donne la Mission Racine pour réussir ce pari impossible de construire sept stations pilotes dont La Grande-Motte et le Cap-d’Agde en Hérault, Port-Camargue dans le Gard, Gruissan et Port-Leucate sur le littoral audois, Port-Barcarès et Saint-Cyprien dans les Pyrénées-Orientales, chacune sous l’autorité d’un architecte en chef. Jean Balladur et Jean Le Couteur auront respectivement la responsabilité de La Grande-Motte et du Cap-d’Agde alors que les villes héraultaises peinent à définir leur urbanisme hors les chantiers des ZUP (Zones à Urbaniser par Priorité) lancés à la même période [1]. Quelques années plus tard, en 1974, La Grande-Motte devient commune et porte d’entrée de la Petite Camargue, celle de l’étang de l’Or.
[1] Les ZUP, décret de 1958, premiers chantiers en 1962-1963 à Montpellier-Paillade et Béziers-Devèze, en 1969 pour Sète-Barrou
Bibliographie
- Pierre Racine, Mission impossible ? L’aménagement touristique du littoral Languedoc-Roussillon, Midi Libre, 1980, 293 p.
- Claude Prelorenzo, Antoine Picon, L'aventure du balnéaire : La Grande-Motte de Jean Balladur, éditions Parenthèse, 1999, 150 p.
- Philippe Lamour, 60 millions de français, Buchet Chastel, 1967, 307 p.
- 60 millions de français, émission télévisée présentée par Philippe Lamour, RTF-ORTF, 1964-1969
- Philippe Lamour, Le second souffle pour le Languedoc - [S.l.] : [s.n.], [s.d.]. Disponible aux Archives départementales de l'Hérault (cote BRA 10366)
Transcription
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