Le Médecin malgré lui : Dario Fo à la Comédie-Française
Notice
En 1990, l'auteur, acteur et metteur en scène italien Dario Fo est invité à la Comédie-Française pour monter Le Médecin malgré lui et Le Médecin volant de Molière. Le journal télévisé d'Antenne 2 interroge à cette occasion l'acteur Richard Fontana.
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Éclairage
Prix Nobel de littérature sept ans plus tard, en 1997, Dario Fo est l'un des dramaturges italiens les plus importants de la seconde moitié du XXe siècle. Egalement acteur, scénographe, il incarne l'homme « total » de théâtre qui utilise le rire pour dénoncer la sclérose des systèmes (politique et institutionnel) italiens. Cet empêcheur de tourner en rond va puiser dans les formes anciennes – tant textuelles que scéniques – pour son théâtre engagé et citoyen : la farce et la commedia dell'arte.
En 1990, l'administrateur de la Comédie-Française Antoine Vitez demande à ce réinventeur de la farce de mettre en scène deux courtes pièces de Molières, empreintes de traditions farcesques. Molière, qui partage avec les comédiens italiens la salle du Petit-Bourbon pendant deux ans (1658-1660), écrit et joue à l'époque des pièces courtes, des farces inspirées des spectacles des comédiens italiens et des canevas de la Commedia dell'arte. Ainsi a-t-on trace d'un Turffaldino (Arlecchino) medico volante, qui préexiste au médecin volant. Si Le médecin malgré lui est une œuvre de la maturité, contemporaine du Misanthrope, elle n'en porte pas moins l'héritage farcesque de la première. Antoine Vitez fait ainsi se rencontrer deux auteurs sur leur terrain commun de prédilection et renouvelle, dans une certaine mesure, la rencontre de la troupe de Molière (dont est issue la Comédie-Française) avec le théâtre italien.
Renouvelant la mise en scène de ces classiques de la farce, Dario Fo réincorpore ce qui est de l'ordre du spectacle de foire : acrobaties, jonglage... (« Quand il met en scène Molière, il met en scène le théâtre », nous dit Valeria Tasca dans sa préface du Gai savoir de l'acteur de Dario Fo.) Le corps de l'acteur devient à la fois aérien et terrien : il s'envole au bout d'une échelle, monte dans les cintres par un câble, mais en même temps s'ancre fortement sur la scène, dans l'exécution de gags scatologiques ou dans des scènes de bastonnades, typiques de la farce. Le témoignage des acteurs est clair : Dario Fo exige des comédiens un engagement physique très intense. C'est dans cet engagement qu'il fonde le rythme de la pièce, qui doit être soutenu et véritablement emporter le spectateur, le ravir au sens le plus fort du terme. Cette mise en scène si exigeante physiquement envers l'acteur, n'est pas sans rappeler la commedia dell'arte et ses lazzi, ses moments laissés au pouvoir d'improvisation comique et à la virtuosité physique de l'acteur. Dario Fo a su laisser une liberté créatrice à l'acteur : Dominique Rozan, jouant dans Le Médecin Volant, affirme qu'avec Dario Fo « l'acteur redevient créateur et n'est pas seulement un exécutant ».