Les Castors Landais
Notice
Initiée par Charles Lamarque-Cando, alors député des Landes, la coopérative de construction Les Castors Landais permet aux familles de condition modeste d'accéder à la propriété de pavillons individuels à loyer modéré, dès le début des années 1950. Un demi siècle plus tard, Les Castors Landais construisent toujours, tout en s'adaptant aux besoins des nouvelles générations.
Éclairage
La décennie qui suit la fin de la Seconde Guerre mondiale est marquée, en France, par une natalité forte, phénomène plus connu sous l'appellation de baby-boom. Ce fait, conjugué aux destructions subies par bon nombre de villes, à l'exode rural, et à la vétusté d'une grande partie du parc immobilier dépourvu de tout confort, explique que l'une des préoccupations majeures de tous les décideurs soit la reconstruction. Ce n'est donc pas le hasard si, en 1952, Bouygues fonde une société de travaux publics dont on sait quel sera le destin et si, le 14 octobre de la même année, on inaugure à Marseille, la "cité radieuse" conçue par l'architecte Le Corbusier [1].
En ce début des années 1950, partout la question du logement se pose et devient une priorité. À Mont-de-Marsan, Charles Lamarque-Cando, maire de la ville de 1962 à 1983, n'est pas en reste et n'a de cesse d'améliorer la qualité de vie de ses administrés. Né, selon ses propres termes, "dans une famille humble et de vieille tradition républicaine", il est animé d'une philosophie sociale qui le mène à concevoir un programme original visant à ce que "le travailleur puisse accéder à la propriété au moindre prix". Ce projet prend la forme d'une coopérative de construction de maisons familiales, Les Castors Landais. L'emblème est bien choisi : le castor est un animal indépendant, lié aux milieux humides, qui construit lui-même son gîte, quitte à détourner par l'édification de barrages de branches le lit d'un cours d'eau.
Ainsi, dès 1953, évitant les "barres" de plusieurs étages si prisées à cette époque, émerge, à Saint-Pierre-du-Mont, commune limitrophe de la préfecture, tout un îlot de maisons-témoins, aux dimensions confortables, rationnelles, construites sur un plan identique. Une vraie révolution, au sens strict du terme, en cette période que l'on peut considérer comme un tournant économique majeur. Le succès ne se fait pas attendre et bientôt se construit au nord-ouest de Mont-de-Marsan le quartier Barbe d'or, dans le prolongement d'une parcelle nommée Bourg neuf , de bon augure : 500 maisons, une ville dans la ville, avec une église à l'architecture innovante, un centre commercial, des terrains de sport, un lycée et un centre culturel : une réussite mise en exergue par les chiffres qui annoncent aujourd'hui 3000 "castors" dans l'agglomération, abritant quelque 10 000 personnes, soit le tiers de la population montoise. On comprend dès lors que ce petit pavillon de ville "appartienne au patrimoine architectural et social de la cité".
Ce mode d'accession à la propriété était et demeure adapté à la population majoritaire locale : des classes moyennes employées essentiellement dans le secteur tertiaire. Aussi le "castor" a-t-il séduit d'autres municipalités au même profil socio-économique.
Si, à Mont-de-Marsan, les constructions de Barbe d'Or et celles de la dernière génération, établies à la périphérie, "relookés", adaptées aux besoins d'une clientèle jeune, comptent désormais 10 000 âmes - soit 30 % de la population totale - ce sont 6000 maisons individuelles qui se comptent dans l'ensemble du département aujourd'hui.
Le 20 mai 2011, le journal Sud-Ouest consacrait précisément un article au succès rencontré par un nouveau projet de l'agglomération montoise, au lieu-dit Biscarosse. Le principe est immuable : la "coop" des "Castors" s'occupe de la gestion de l'opération en amont ; chaque famille choisit un lot via une société civile immobilière dont le capital est détenu par la coopérative, mais aussi par l'amicale des Castors Landais, association loi 1901, créée en 1970 pour venir en aide aux ménages en difficulté.
Plus qu'aménager, entrer dans une maison de ce type, c'est aussi adhérer à une vaste famille où la solidarité n'est pas un vain mot. En effet, 58 ans après la pose de la première pierre à Saint-Pierre-du-Mont, derrière la construction des "castors" landais, transparaît toujours en filigrane la démarche sociale et humaniste de Charles Lamarque-Cando, disparu en 1989.
[1] Charles-Édouard Jeannerte-Gris, dit Le Corbusier (1887-1965) est un architecte et urbaniste qui bouleverse, après la guerre, le concept de l'habitat collectif. Il est l'inventeur de l'Unité d'habitation, un concept qui prévoit, dans un même ensemble, tous les équipements collectifs nécessaires à la vie.