François Mitterrand à Prague

09 décembre 1988
01m 41s
Réf. 00072

Notice

Résumé :
Deuxième et dernière journée de la visite officielle du Président François Mitterrand à Prague.
Date de diffusion :
09 décembre 1988
Source :
FR3 (Collection: Soir 3 )

Éclairage

Après sa réélection en mai 1988, François Mitterrand s’engage dans une tournée de voyages en Europe de l’Est. Il s’agit d’une offensive diplomatique du président qui dispose de nouveau de l’ensemble des leviers de la politique étrangère, après la période de cohabitation. Cette opération vise à répondre au volontarisme de la République fédérale allemande. Il s’agit de concurrencer sa place de principal partenaire occidental des pays de « l’autre Europe ».

Cette nouvelle politique à l’Est de la France, menée notamment sous l’égide de Roland Dumas, le ministre des Affaires étrangères, entend notamment accompagner les changements politiques et démocratiques en cours, alors qu’à la fin de l’année 1988 certaines sociétés des pays de l’Europe communiste semblent en ébullition. Les deux premiers pays sélectionnés pour accueillir la visite du président ne sont cependant pas les plus réputés pour leur ouverture alors que l’Europe de l’Est s’engage dans la glasnost et la perestroïka promues par M. Gorbatchev en URSS.

François Mitterrand commence par se rendre en Tchécoslovaquie les 8 et 9 décembre 1988. C’est la première visite d’un chef d’État français dans ce pays. Il reçoit notamment à l’ambassade des opposants au régime pour un petit-déjeuner le 9 au matin. Y participe notamment, assis à sa gauche, le dramaturge tchèque Vaclav Havel, incarnation de la dissidence intellectuelle en Europe de l’Est. L’instigateur de la Charte 77 pour la défense des droits de l’homme exprimait pourtant, quelques jours avant la visite, ses craintes que ce voyage ne conforte le régime autoritaire de Gustav Husak. C’est ce que traduisent également les propos de Petr Uhl, intellectuel proche de Havel interrogé dans le reportage.

Pour parer à ces critiques, Mitterrand se montre offensif sur la question des libertés lors du dîner officiel devant Husak et Milos Jakes, le secrétaire général du parti. Il cite également le « Printemps de Prague », période de libéralisation du régime sous l’égide de Dubček, réprimée dans le sang en août 1968 par les chars soviétiques.

L’après-midi suivant le rendez-vous avec les intellectuels, il se rend à Bratislava où il rencontre des étudiants triés sur le volet par le régime dans une atmosphère convenue, ce qui contraste avec la visite en Bulgarie et sa parole étudiante libérée qui intervient un mois plus tard (voir François Mitterrand en Bulgarie).
Arthur Delaporte

Transcription

Présentateur
Les droits de l’homme, ce fut également le thème essentiel de la deuxième et dernière journée de la visite officielle du Président de la République Française en Tchécoslovaquie. Une deuxième journée au cours de laquelle Monsieur François Mitterrand a notamment rencontré huit opposants au régime, Philippe Peaster.
Philippe Peaster
Petit-déjeuner privé à l’allure très officielle pour une conversation de plus d’une heure du Président Mitterrand avec huit opposants tchécoslovaques, la première dans ce pays entre un Chef d’Etat et l’opposition. Quant à la question de l’opportunité de cette visite en Tchécoslovaquie et l’éventuelle caution qu’elle apporterait au régime, réponse d’un des principaux intéressés.
Intervenant
Je la juge très positive mais je crains bien que ce ne soit que temporaire. Alors, euh, que c’est un geste et après, tout va tourner peut-être dans le vieux rail, c’est-à-dire la diplomatie française très timide, pas du tout intransigeante, très secrète. Nous voulons la publicité pour les, pour les droits de l’homme, pour les initiatives indépendantes parce que c’est la seule chose qui est valable.
Philippe Peaster
Une publicité que François Mitterrand a voulu donner par avance, dès hier soir, lors d’un toast en plein dîner officiel, petite phrase prononcée sous les yeux des principaux artisans de la normalisation de la Tchécoslovaquie après l’écrasement du Printemps de Prague.
François Mitterrand
Vous n’ignorez pas l’écho considérable que suscita en France ce qui fut appelé le Printemps de Prague et le prestige moral qui s’attacha chez nous aux actes et aux personnes qui, à nos yeux, illustraient les valeurs auxquelles nous croyons ; et que nous célébrerons solennellement à l’occasion du bicentenaire de la déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789, droit de s’exprimer, de s’associer, d’aller et de venir.