François Mitterrand sur l'Allemagne et sa réunification

10 décembre 1989
13m 33s
Réf. 00046

Notice

Résumé :
Lors d'un entretien télévisé le 10 décembre 1989 à l’Élysée, Mitterrand est longuement interrogé sur le destin de l’Allemagne. « Le problème de la réunification allemande est posé en permanence », dit-il, et il prend le soin d’expliquer quels sont le cadre et les conditions d’un tel processus.
Date de diffusion :
10 décembre 1989
Lieux :

Éclairage

La chute du Mur de Berlin dans la nuit du 9 au 10 novembre 1989 met à la une de l’actualité la question de la réunification allemande.

Le mot même est prononcé avec prudence, notamment lors des rencontres internationales qui vont rythmer les semaines suivantes. Le 18 novembre, un dîner informel réunit les douze pays membres de la CEE pour une discussion ouverte sur les défis qui se posent désormais à la Communauté au regard des événements qui se produisent à l’Est. La réunification allemande n’est pas à l’ordre du jour, mais on laisse les participants libres d’introduire le sujet s’ils le souhaitent. Ils ne le font pas. Cette prudence s’explique par le fait que les diplomaties préfèrent resituer les événements du 9-10 novembre dans le strict cadre des changements qui ont lieu à l’Est depuis l’avènement de la Perestroïka, plutôt que de parler d’une situation nouvelle en Europe.

C’est le chancelier Helmut Kohl qui donne l’impression de vouloir accélérer les choses quand, le 28 novembre, il présente un plan en dix points censé initier le processus de réunification. Le mot est enfin prononcé, mais son retentissement est pour l’heure plus grand chez les opinions publiques qu’auprès des chefs d’État et de gouvernement.

Les 2 et 3 décembre, George Bush et Mikhaïl Gorbatchev se retrouvent à Malte pour échanger sur la situation internationale et européenne en particulier. La réunification n’est qu’un sujet parmi d’autres : le Président américain parle de droit allemand à l’autodétermination, alors que le secrétaire général réaffirme l’existence des deux États allemands comme un fait de l’histoire. Positions destinées à bouger quelque peu dans les jours qui suivent.

Le 4 décembre, lors du sommet atlantique de Bruxelles, George Bush informe les Alliés des échanges qu'il a eus avec Gorbatchev, mais il introduit aussi le sujet de la réunification comme celui d’un processus qui doit avoir lieu dans le cadre de l’Alliance atlantique. Par contre, lors d’une rencontre entre Mitterrand et Gorbatchev à Kiev, le 6, la diplomatie soviétique se montre fortement opposée à toute idée d’une seule Allemagne, au point de vouloir entraîner les Français à adopter la même posture.

Vient enfin le sommet européen de Strasbourg, du 9 et 10 décembre 1989, où les Allemands cherchent ouvertement l’appui des Douze, encore partagés sur la question de la réunification.

Autant d’épisodes que François Mitterrand rappelle face aux journalistes qui lui demandent où l’on en est avec la « question allemande » en cette fin d’année 1989.
Ilaria Parisi

Transcription

Alain Duhamel
Est-ce que vous avez le sentiment maintenant, après ce Conseil européen, que le, l’obsession maintenant chez les Allemands de la question de la réunification ne va pas se trouver sans arrêt, à chaque étape, mois après mois, devant les problèmes européens ?
François Mitterrand
Mais le problème de la réunification allemande est posé en permanence.
Alain Duhamel
Il l’est plus maintenant qu’il ne l’a été il y a six mois.
François Mitterrand
Sans aucun doute, sans aucun doute. Peut-être voulez-vous qu’on s’arrête quelques instants pour savoir quelle décision a été prise à Strasbourg ?
Alain Duhamel
Absolument.
François Mitterrand
Parce qu’il faut quand même que nos, nos auditeurs sachent de quoi on parle.
Jean-Pierre Elkabbach
Mais vous savez qu’on a beaucoup parlé de Strasbourg, parce que c’était une réunion importante, en particulier ce problème de la réunification, l’unité allemande…
François Mitterrand
Ce n’était, non, ce n’était pas à l’ordre du jour, ce n’est pas directement la seule compétence de la Communauté. Mais avouez que c’est un élément de, d’une certaine envergure...
Jean-Pierre Elkabbach
Persistant !
François Mitterrand
Et qu'on ne peut pas imaginer douze pays de l’Europe, là, sans qu’ils en parlent, ça les regarde, d’autant plus qu’ils sont partie prenante à l’équilibre européen.
Christine Ockrent
Mais justement, Monsieur le Président, on a l’impression que l’Allemagne Fédérale a réussi, de son point de vue, à obtenir un blanc-seing communautaire pour sa réunification, et en contrepartie, dans cette déclaration, il n’est fait, nulle part mention des frontières et singulièrement, de la frontière orientale.
François Mitterrand
Non, non, non, c’est un peu simple ce que vous dites, c’est un peu simple...
Christine Ockrent
Mais c’est comme ça que les gens réagissent !
François Mitterrand
Vous dites ça pour me provoquer, je sais bien que vous êtes au courant des choses; mais elles ne se sont pas posées comme ça du tout ! D’ailleurs, j’ai le texte ici, hein ...
Christine Ockrent
Oui, mais pour les Français qui ont parfois mauvais souvenir...
François Mitterrand
Vous pouvez voir cette feuille arrachée, je l’ai arrachée du document officiel, enfin, du document officiel dont j’avais à donner connaissance, à la presse. Le document véritablement officiel, lui….
Jean-Pierre Elkabbach
Alors justement ?
François Mitterrand
Bon, mais ça, c’est la pièce originale, et j’ai cerné le paragraphe important; qu’est-ce qu’il dit ? Nous recherchons le renforcement d’un État de paix en Europe dans lequel le peuple allemand retrouvera son unité à travers une libre autodétermination. Ce processus, notez bien chaque phrase, elle est importante, permettez-moi de le souligner. Ce processus doit se réaliser démocratiquement et pacifiquement. Ce sont les deux termes que j’ai employés dès le 2 novembre ou 3 novembre de cette année à l’issue du Conseil européen de Bonn, lorsque j’ai fait une conférence de presse, en compagnie du Chancelier Kohl, ça a été la première question d’ailleurs qu’on m’a posée. Démocratiquement et pacifiquement, dans le respect des accords et traités, ainsi que de tous les principes définis dans l’acte final d’Helsinki, qui comporte le respect des frontières; Christine Ockrent !
Christine Ockrent
Oui, Monsieur le Président mais comme ça, les Français…
François Mitterrand
Heureusement que je peux le dire, parce qu’on aurait pu croire le contraire tout à l’heure. Dans un contexte, ça continue, dans un contexte de dialogue, et de coopération Est-Ouest, facteur de paix. Dernière phrase, il doit se situer dans la perspective de l’intégration européenne, je n’ai pas dit communautaire, européenne. Ce qui veut dire que ce n’est pas la première fois que c’est, que la première formule, c’est-à-dire, "celle du peuple allemand retrouvera son unité à travers une libre autodétermination", il y a déjà plusieurs documents internationaux qui portent cette phrase, notamment la décision de la réunion de l’OTAN, qui s’était tenue à Bruxelles…
Serge July
En mai dernier, en mai dernier.
François Mitterrand
Je crois au mois de mai, voilà, au mois de mai dernier... Donc ce n’est pas la première fois. Mais à Bruxelles, il n’y avait pas la suite; à Strasbourg, il y a la suite; qui implique que, si l'on peut comprendre et admettre, c’est légitime, que les Allemands aient envie et besoin, aient la volonté de se réunir, ceux des deux États allemands - République Fédérale et République Démocratique Allemande; l’Est et l’Ouest -, il n’empêche que l’équilibre, le nouvel équilibre allemand ne peut pas se faire au détriment de l’équilibre de l’Europe. On doit préserver toutes les chances de la paix, et le respect des frontières est un principe essentiel. On s’est étonné dans la presse de ce que, lors du sommet Européen du 18 novembre, à l’Élysée, on n’ait pas fait état de l’unification allemande. Mais moi, j’ai dit, on n’en a pas parlé, mais j’ai posé la question, dès le début de la conférence. Et j’ai demandé à mes collègues, je leur ai dit, de quoi voulez-vous qu’on parle, voulez-vous qu’on parle de, et j’ai énuméré... Et il m’a été répondu, ce n’est pas la peine de parler du respect des frontières, cela va de soi. Cela vaut encore mieux en le disant.
Alain Duhamel
Monsieur le Président...
Jean-Pierre Elkabbach
Serge July, Alain Duhamel.
Serge July
Au rythme, quand même, où vont les événements, en particulier en Allemagne de l’Est, et le fait qu’il y ait une élection législative en Allemagne au mois de décembre, le 11 décembre prochain. Est-ce que quand même, enfin, 90, est-ce que vous ne pensez pas que les deux opinions publiques peuvent finalement, par un jeu d’enchaînement, imposer une réunification de fait de l’Allemagne indépendamment des précautions qui ont été prises par les quatre alliés vainqueurs de 1945, par les traités internationaux ?
François Mitterrand
C’est tout à fait possible; qu’ils le décident ! Ils devront, à ce moment-là, tenir compte des traités, ils devront tenir compte des voisins, du voisinage. Ils devront tenir compte aussi d’un certain nombre de rapports qui se sont déterminés surtout entre ces pays, et l’Union Soviétique. Moi, je ne suis pas le maître du monde, le maître du monde qui décide de l’ordre…
Jean-Pierre Elkabbach
C’est qui ?
François Mitterrand
de l’univers, malgré ce que j’entends dire, malgré…
Jean-Pierre Elkabbach
Il y en a un ?
François Mitterrand
Il n’y en a pas. Mais malgré ce que j’entends dire dans des émissions plaisantes, n’est-ce pas ? Non...
Jean-Pierre Elkabbach
Il n’y en a plus.
François Mitterrand
Je ne suis pas celui qui détermine les mouvements des peuples !
Jean-Pierre Elkabbach
Ah, dommage !
François Mitterrand
J’ai dit... Dommage je vous remercie... Mais ça serait peut-être été un excès d’ambition. Ce que je veux dire simplement - et j’aurais bien des soucis - c’est que s’il y a des forces de ce type qui se décident, il faudra les regarder en face; mais il faut aussi que nos amis allemands tiennent compte du fait qu’il a existé une guerre mondiale. Et cette guerre mondiale a dessiné une certaine configuration de l’Europe. On réclame la démocratie, et la paix, on demande aussi que les frontières de l’Europe fixées à cette époque, ne soient pas bouleversées, parce que l’ouverture de ce débat, vous savez bien, vous connaissez la carte de l’Europe, il y en a beaucoup d’autres... Qu’arrivera-t-il par exemple des provinces; Poméranie, Silésie, Mazurie, et même un bout de Prusse Orientale, qui est devenue soviétique... Et les autres, les trois premières que j’ai citées qui sont devenues polonaises, qu’en adviendra-t-il ? Il est bien clair que la frontière Oder-Neisse qui est la frontière entre la Pologne et l’Allemagne de l’Est doit rester intangible. Enfin.. Et puis, il y a la contagion, vous connaissez le débat entre la Roumanie et la Hongrie sur la Transylvanie. Est-ce que je dois vous parler de la Moldavie ?
Jean-Pierre Elkabbach
Non, non, mais ça fait partie de l’ensemble et  du jeu...
François Mitterrand
Mais ça les intéresse là-bas !
Christine Ockrent
Bien sûr !
Jean-Pierre Elkabbach
Alain Duhamel.
François Mitterrand
Il y a des conflits de frontières partout.
Christine Ockrent
L’Europe des nationalités du XIXe ?
Alain Duhamel
Monsieur le Président, la question qu’au fond, les Français se posent maintenant, parce qu’ils ne connaissent pas toujours tous les détails de la carte européenne, ce qu’elle était et ce qu’elle devient...
François Mitterrand
Mais moi vous m'interrogez, je vous réponds.
Alain Duhamel
Mais la question que les Français se posent aujourd’hui, c’est; au fond, est-ce qu’il faut qu’on se prépare à accueillir bientôt l’Allemagne de l’Est dans la Communauté Européenne d’une manière ou d’une autre, et surtout, cette Allemagne qui va, de toute évidence, se renforcer, qu’est-ce que ça va changer pour l’avenir de l’Europe ? Est-ce que ça ne va pas complètement bouleverser le fonctionnement de l’Europe telle que voilà, c’est ça...? Est-ce qu’on doit en avoir peur ou pas ?
François Mitterrand
Non, c’est beaucoup de choses à la fois... Là. D’abord, pour l’instant, il y a deux États. Si, en effet, les élections dans les deux pays bousculent les intentions des dirigeants, puisque les dirigeants de l’Allemagne de l’Est ont déjà dit qu’ils ne voulaient pas de réunification, mais voilà...
Christine Ockrent
Ils l'ont répété aujourd’hui.
François Mitterrand
Ça change, oui, c’est ça…
Jean-Pierre Elkabbach
Mais les dirigeants changent si souvent...
François Mitterrand
Permettez-moi de vous dire que, de vous rappeler que j’irai en Allemagne de l’Est...
Serge July
Vous confirmez les dates, Monsieur le Président ?
François Mitterrand
Le 20 décembre, et pour l’instant, je n’ai pas de raison de, bon, le 20 décembre. Mais, allant en Allemagne de l’Est, c’est que j’ai répondu à une invitation. Quelle invitation ? Celle de Monsieur Honecker. Bon. Donc j’ai répondu à Monsieur Honecker, et ben oui, j’irai, j’ai consulté le Chancelier Kohl, qui m’a dit, vous ferez bien d’y aller.
Jean-Pierre Elkabbach
Mais je voudrais aller avant vous ?
François Mitterrand
Non, il faut…
Serge July
Ce n’était pas le même, c’était à l’époque Krenz.
François Mitterrand
Non, non, les choses ne se sont pas posées comme cela, parce que voilà, le mur était encore apparemment solide. Donc, j’ai consulté le Chancelier Kohl, il m’a dit, mais c’est une très bonne chose, j’ai reçu la confirmation de l’invitation et puis, exit Monsieur Honecker, est arrivé Monsieur Krenz, qui m’a aussitôt confirmé l’invitation. Aucune raison de me dédire, surtout qu’il y a avait une évolution qui, à mon avis, était heureuse en Allemagne de l’Est, alors j’ai dit oui... Et puis, Monsieur Krenz, exit à son tour... Bon, alors j’attends de savoir ce que les nouveaux responsables ont l’intention de faire. Je crois que leur sentiment est plutôt favorable à ce type de rencontres. Alors, vous me dites, est-ce que, car je n’oublie pas vos questions, est-ce que ça va nous amener à faire entrer l’Allemagne de l’Est dans la Communauté ? La question n’est pas posée. Je crois que ça va amener les deux États allemands, avant tout bouleversement de caractère populaire, s’il se produit, cela amènerait les deux États allemands à une série d’accords inter-États qui iront, depuis la multiplication des accords commerciaux, économiques de toute sorte, de passages, des frontières, ça existait déjà, mais enfin, ce serait très renforcé, jusqu’à des formes confédératives, voilà ce qui est probable, le reste l’est moins.
Serge July
Et est-ce que c’est une bonne chose ou une mauvaise chose ?
Alain Duhamel
Oui, c’est ça...
Christine Ockrent
Est-ce qu’il faut en avoir peur ?
François Mitterrand
Alors j’ai déjà répondu, avoir peur, là, Monsieur Elkabbach, on n’a pas le droit d’avoir peur d’événements qui en soi sont heureux. Enfin, de quoi on va se plaindre ? Ça fait combien d’années qu’on réclame qu’un peu de liberté, beaucoup, passe par-là, elle passe, alors naturellement, elle dérange, mais enfin, il faut l’aborder carrément ...! La liberté et nous, on se connaît ! Evidemment, la liberté, c’est un peu, ça bouscule, sinon, non, moi, je n’en ai pas peur. Mais naturellement, il faudra s’adapter à cette situation nouvelle.
Jean-Pierre Elkabbach
Mais on entend bien, c’est formidable qu’à l’Est, ils gagnent leur liberté, mais si l’Est est plus libre, il ne faut pas pour autant que l’Ouest soit plus menacé et moins sûr !
François Mitterrand
Voilà pourquoi, à Strasbourg, nous avons ajouté à l’expression déjà adoptée au mois de mai, lors de la réunion de l’OTAN, quelque chose d’indispensable sur le respect des frontières et sur les accords d’Helsinki. Donc, on fait le tour là, comme ça, et on arrive au même résultat. On a pris des précautions et ces précautions, il n’y a aucune raison qu’elles ne soient pas respectées, quoi qu’il se passe, du côté du peuple allemand, ou des peuples séparés aujourd’hui, par la création de deux États allemands.
Alain Duhamel
Mais on a l’impression qu’il va y avoir forcément, quoi qui se passe, quel que soit le rythme, une Allemagne de plus en plus puissante au sein de la Communauté dans laquelle on se trouve, donc c’est un fait nouveau.
François Mitterrand
De plus en plus puissante, oui, enfin, elle est déjà puissante.
Alain Duhamel
Elle l’est déjà et elle le sera encore plus.
François Mitterrand
C’est un fait nouveau, enfin, les Allemands, on sait qu’ils existent, hein !
Alain Duhamel
Oui, mais enfin, depuis trois mois, on le sait encore plus qu’on ne se le rappelait….
François Mitterrand
Mais enfin, personne ne pouvait penser que cela serait éternel, d’ailleurs, quels sont les traités qui sont restés éternels ?
Jean-Pierre Elkabbach
Si l’Allemagne fera une….
François Mitterrand
À Helsinki, on a prévu aussi, à Helsinki, ce n’était pas moi, mais il y a longtemps, on avait prévu plusieurs secteurs dans lesquels l’accord entre l’Est et l’Ouest s’appliquerait : l’économie mais aussi la liberté, les droits de l’homme. Et en même temps, il a été prévu que bon, les frontières, c’est immuable, c’est très joli de décider, on ne va pas dresser des barrières de papier, un mur de papier à la place de l’autre, hein ! Bon. Donc on a prévu qu’il pouvait y avoir démocratiquement, par accord mutuel, des mutations et des modifications. On les abordera quand elles se proposeront. Ce que je sais, c’est que le projet que je défends partout devant le visage nouveau de l’Europe tourne autour de trois termes. D’abord, liberté, liberté, droit de l’homme, c’est ça, liberté. Le deuxième, la paix, rien ne doit venir aujourd’hui gêner la marche vers la paix entamée depuis les premiers accords sur le désarmement. Troisièmement, solidarité, l’Est et l’Ouest doivent se diriger en commun vers l’objectif Europe : voilà ma politique !
Jean-Pierre Elkabbach
Et vous pensez que dans la mémoire, l’Allemagne reste l’Allemagne. Si elle a une place prépondérante, est-ce qu’il y a une solution de rechange pour…
François Mitterrand
Prépondérante, qu’est-ce que ça veut dire ? Il y a plus d’Allemands démographiquement, bien que leur natalité soit très faible, il y a plus d’Allemands que de Français.
Jean-Pierre Elkabbach
Mais ma question, Monsieur le Président, n'est pas là...…
François Mitterrand
Mais les Français sont quand même nombreux et ça représente une grande histoire, on n’a pas de complexe d’infériorité.
Jean-Pierre Elkabbach
Est-ce qu’il y a une alternative, vous vous entendez si bien avec Monsieur Gorbatchev, on peut penser à une alliance privilégiée avec les Soviétiques, ou avec les Anglais...
François Mitterrand
Mais nous avons, alliance privilégiée, nous avons une très bonne entente et c'est pas si mal que ça. Ce n’est pas si mal que ça qu’avec l’Union Soviétique, il y ait un terrain de confiance. Et c’est vrai que Monsieur Gorbatchev montre à l’égard de la France une sorte de sollicitude qui tient au fait qu’il se souvient naturellement, il se souvient que la Russie et la France ont, à travers les siècles, servi de point d’équilibre dans de graves moments de l’histoire.