François Mitterrand à Mururoa
27 septembre 1985
05m 17s
Réf. 00068
Notice
Résumé :
Le 13 septembre 1985, François Mitterrand visite le Centre d’Expérimentation du Pacifique entouré de nombreux ministres et d’élus du Territoire. Il participe à la prise d’armes avant de visiter les nombreuses installations du site d’expérimentation français du Pacifique et de réunir le Comité de coordination du Pacifique Sud.
Type de média :
Date de diffusion :
27 septembre 1985
Source :
RFO
(Collection:
JT Polynésie
)
Personnalité(s) :
Éclairage
Alors que l’image de la France en Océanie est fortement ternie par le scandale politique et médiatique du Rainbow Warrior [voir ce document], François Mitterrand se rend le 13 septembre 1985 à Mururoa, cœur du dispositif des expérimentations nucléaires françaises. Il est le premier président de la République en exercice à se rentre tout spécialement et uniquement à Mururoa dont il visite les nombreuses installations avant d’y présider le Comité de coordination du Pacifique Sud qui réunit, pour la première fois, les ambassadeurs de la France en poste dans la région ainsi que les responsables civils et militaires en fonction dans les territoires français d’Océanie. La constitution d’un tel comité destiné à mieux articuler les politiques intérieure et extérieure de la France dans la région avait été préconisée par Régis Debray à l’issue de la mission qu’il avait effectuée en 1983 dans le Pacifique à la demande du Président. L’initiative est prolongée par la création en décembre 1985, d’un Conseil du Pacifique rapidement mis en sommeil par le gouvernement Chirac qui fait le choix, pour défendre l’image de la France dans la région, de nommer un secrétaire d’Etat chargé du Pacifique.
La réunion du Comité de coordination du Pacifique Sud à Mururoa, et ce en pleine affaire du Rainbow Warrior, est éminemment symbolique. François Mitterrand affirme ainsi fortement la légitimité de la France à procéder à des essais nucléaires et à protéger ses installations stratégiques de Polynésie française. Le chef de l’Etat affiche enfin sa détermination à maintenir le CEP en activité en dépit de critiques internationales fortes. Mais, dans la région, cette visite est vécue comme une provocation qui écorne davantage l’image de la France, qui est perçue comme arrogante et méprisante envers la région.
La réunion du Comité de coordination du Pacifique Sud à Mururoa, et ce en pleine affaire du Rainbow Warrior, est éminemment symbolique. François Mitterrand affirme ainsi fortement la légitimité de la France à procéder à des essais nucléaires et à protéger ses installations stratégiques de Polynésie française. Le chef de l’Etat affiche enfin sa détermination à maintenir le CEP en activité en dépit de critiques internationales fortes. Mais, dans la région, cette visite est vécue comme une provocation qui écorne davantage l’image de la France, qui est perçue comme arrogante et méprisante envers la région.
Sarah Mohamed-Gaillard
Transcription
(Musique)
Présentateur
Bonsoir, eh bien, voici donc cette édition spéciale qui va nous permettre de refaire le point de cette journée présidentielle sur le sol polynésien. Une journée qui s’est en fait jouée en 13 heures environ sur l’atoll de Mururoa où François Mitterrand est arrivé la nuit dernière. Il venait très précisément de Lima au Pérou et avait franchi les quelques 6800 kilomètres le séparant du centre d’expérimentation nucléaire en 4 heures de vol à bord du supersonique Concorde. Je vous propose tout d’abord de revivre cette arrivée à Mururoa.(Bruit)
Journaliste
Il était une heure du matin vendredi, 13 heures, heure de Paris, quand le Concorde présidentiel s’est posé sur la piste de l’atoll de Mururoa ; ce qui en soi, constituait déjà une forme de performance puisque cette piste n’est pas précisément conçue pour recevoir ce type d’appareil. Nous sommes ici, à 1200 kilomètres de Tahiti, sur un petit atoll émergeant de quelques mètres à peine au-dessus de l’océan. La France, depuis bientôt 20 ans en a fait son site d’expérimentation nucléaire. François Mitterrand est le troisième Président de la République en exercice à visiter ce centre, après Charles de Gaulle en 1966 et Valéry Giscard d’Estaing en 1979. Mais François Mitterrand est le premier Chef de l’Etat à n’avoir fait ce déplacement que pour se rendre à Mururoa, une manière de marquer l’importance qu’il accorde à l’aspect militaire des choses quelles que soient les protestations que soulèvent dans la région les expérimentations françaises. En pleine nuit tropicale, le ciel est clément et dégagé au dessus de l’atoll lorsque le Président emprunte l’échelle de coupée suivi du Haut Commissaire de la République en Polynésie. François Mitterrand est accueilli par le Directeur des Centres d’essais nucléaires, le Général Mermet et par l’Amiral Hugues, qui commande les forces armées en Polynésie, mais aussi l’ensemble des troupes françaises dans le Pacifique. Un peloton de légionnaires est là pour rendre les honneurs puisque la légion joue un rôle prépondérant dans ce vaste chantier permanent que constitue le site d’expérimentation nucléaire. Plusieurs Ministres sont du voyage, parmi eux le Ministre de la Défense, Charles Hernu et celui des relations extérieures, Roland Dumas, Pierre Joxe, Ministre de l’Intérieur, Edgar Pisani, Ministre chargé de la Nouvelle-Calédonie et Georges Lemoine, le Secrétaire d’État aux Départements et Territoires d’Outre-Mer ont aussi suivi le Chef de l’Etat jusqu’à Mururoa. François Mitterrand, quant à lui, commence par prendre quelques heures de repos puisqu’il vient de franchir en très peu de temps près de 18000 kilomètres pour tenir une courte journée de travail.(Silence)
Journaliste
À 9 heures du matin, reposé, détendu, le Président inaugure cette journée par une prise d’armes en présence de toutes les personnalités qui se trouvent sur la base. Sont arrivés aussi à ce moment-là plusieurs élus et parlementaires locaux. Le Chef de l’Etat reconnaît peut-être quelques visages, lui qui, en avril 75, avait passé quelques jours de vacances en Polynésie, le seul Territoire Français d’Outre-Mer qui, l’année précédente, lui avait accordé une large majorité de ses suffrages lors de son premier duel présidentiel avec Valéry Giscard d’Estaing.(Musique)
Journaliste
Une fois les honneurs militaires rendus, François Mitterrand va prendre place à bord d’un hélicoptère super puma. Il survolera ainsi pendant une demi-heure le long serpent de corail de Mururoa qui a connu en 20 ans toutes les formes de tirs nucléaires. Aérien pendant les premières années, puis souterrain et aujourd’hui dans des puits forés à l’intérieur même du lagon jusqu’à plusieurs centaines de mètres de profondeur dans le socle de basalte qui constitue la base de ces îles volcaniques dont n’affleure que le sommet. Et puis, revenu sur la base vie, François Mitterrand a aussi visité les ateliers de montage et de réglage des matériels où sont notamment assemblés les containeurs pour les charges nucléaires et les câbles de transmission en fibre optique utilisés pour le contrôle des essais. Il s’est aussi intéressé aux têtes de forage en carbure de tungstène spécialement conçues par la société Schlumberger, qui les utilise également pour les forages pétroliers. Il faut noter que pour la visite des points les plus sensibles, les zones entourées du plus grand secret, le Chef de l’Etat était seulement accompagné de son chef d’Etat-major particulier, le Général Forray, et par le Ministre de la Défense Charles Hernu.(Bruit)
Journaliste
A l’issue de cette visite très détaillée, vers 10 heures du matin, le Chef de l’Etat va être rejoint par tous les ambassadeurs français en poste dans le Pacifique Sud. Les ambassadeurs qui avaient été acheminés aux premières heures de la matinée à Mururoa par un vol spécial. François Mitterrand est, lui, accompagné de tous les responsables civils et militaires des trois territoires de Polynésie, de Nouvelle-Calédonie et de Wallis et Futuna. Il ouvre alors la première réunion du comité de coordination du Pacifique Sud, une réunion au cours de laquelle le Chef de l’Etat allait réaffirmer avec gravité et fermeté les droits de la France dans la région.(Bruit)