Réseaux bretons : la Charte régionale
Notice
Retour en archives sur le combat pour la reconnaissance de la langue bretonne. Récemment, la charte européenne des langues minoritaires a remis ce thème sur le devant de la scène politique. En partie signée par le gouvernement français, elle a été rejetée par le Conseil constitutionnel. Josselin de Rohan, Kofi Yamgnane et Yves Le Serre s'expriment sur le sujet.
Éclairage
Le projet de création d'un lycée d'enseignement bilingue à Carhaix qui se concrétise en 1999 est le résultat d'un processus amorcé dans les années 1970 en faveur de l'enseignement scolaire de la langue bretonne.
À partir de la IIIème République, l'enseignement obligatoire en français restreint la pratique du breton dans un cercle familial non officiel. Jusqu'à la fin des années 60, la langue bretonne demeure largement dépréciée et perçue comme la langue d'une population rurale peu instruite. Le changement de statut du breton s'opère au cours des années 70, par la reconnaissance de sa valeur. Cette mutation majeure coïncide par ailleurs avec le recul de la pratique et la baisse du nombre de locuteurs. De cette prise de conscience émerge la volonté de mettre à disposition un enseignement en breton, sur le modèle des classes Ikasto lak en langue basque.
Lors du discours de Ploërmel le 9 février 1977 de Valéry Giscard d'Estaing, alors président de la République, une charte culturelle est octroyée aux Bretons, en réaction à la demande de reconnaissance de leur identité culturelle. La charte répond à leur volonté de faire vivre la culture bretonne, notamment par le biais de l'enseignement. Une première école apparaît en septembre 1977 à Lampaul-Ploudalmézeau, rassemblant cinq élèves de maternelle autour de l'instituteur Denez Abernot, autour de la méthode par « immersion ». C'est tout un réseau d'établissements scolaires associatifs gratuits et laïques, en contrat avec l'Etat, baptisé Diwan, qui se met en place d'années en années. Des classes sont aussi créées dans l'enseignement catholique. Il est peu à peu possible de prolonger son enseignement en breton de la maternelle à la terminale, dans des établissements publics, privés laïcs en contrat avec l'état (Diwan), ou privé catholique.
Vingt ans plus tard, alors que 2000 élèves sont scolarisés dans des écoles Diwan et que les établissements sont de plus en plus nombreux, le problème de leur statut se maintient car l'on n'a toujours pas trouvé d'accord. Les établissements Diwan, confrontés au refus de prise en charge par l'Etat (qui estime l'enseignement en breton par immersion en décalage par rapport aux principes républicains), font face à des problèmes de financements et à l'incertitude constante quant à leur statut. En Mai 2001 Jack Lang signa un accord historique intégrant Diwan à l'enseignement public mais il sera rejeté par le Conseil d'Etat. Actuellement, la direction de Diwan souhaite que ces écoles - qui ont le plus souvent un statut d'établissements privés sous contrat et qui sont fortement soutenues par la Région - entrent dans un cadre semi-public.
Aujourd'hui, le breton est reconnu comme un trait culturel majeur de la Bretagne, support de traditions et d'identité qui ne doit pas disparaître. Ainsi, c'est en 1998 que la France signe la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires, qui est instaurée par le Conseil de l'Europe depuis 1992, s'engageant à protéger et promouvoir les langues régionales.
Pauline Jehannin - CERHIO – Université de Rennes 2