La patrimonialisation de la ligne Maginot
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Après avoir rappelé l'histoire de la ligne Maginot, ce reportage évoque son inscription dans le patrimoine. Si des parties réhabilitées, comme le fort de Hackenberg, sont déjà ouvertes au public, d'autres sont actuellement restaurées par des bénévoles au nom du devoir de mémoire.
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Date de publication du document :
11 mai 2021
Date de diffusion :
30 mai 2013
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La ligne Maginot désigne les fortifications construites par la France à ses frontières entre 1928 et 1940. L’expression recouvre deux types de défenses. Il y a d’abord celui évoqué dans le reportage, consistant en une série d’ouvrages modernes et imposants édifiés entre 1928 et 1938. On trouve ensuite celui composé de bâtiments moins importants, construits à partir de 1935.
La ligne, du nom du ministre de la Guerre André Maginot, est une œuvre colossale : 465 km de fortifications ayant nécessité 1,2 millions de m3 de béton et 150 000 tonnes d’acier. Les plus gros bâtiments sont de véritables complexes. En surface, on trouve des installations en béton armé, destinées à accueillir l’artillerie. Sous terre, accessibles par des puits et des monte-charges, on rencontre des infrastructures diverses, allant des dortoirs aux arsenaux, des réservoirs d’eau aux magasins de vivres, sans oublier les centrales électriques et de ventilation. Si la ligne Maginot est imposante à l’extérieur, sous le sol, elle offre un véritable labyrinthe, avec ses puits et ses galeries, dont certaines ont été creusées à 100 mètres de profondeur. Devenue le symbole d’une stratégie dépassée en raison de la rapidité de la Défaite de 1940 (l’armée française est battue en six semaines), la ligne Maginot était pourtant à sa création une concentration de modernité.
La construction de cet ensemble de fortifications s’inscrit dans le contexte de l’après-guerre. La France a été « saignée » par l’hécatombe de la Grande Guerre (près d’1,4 millions de soldats tués). La société française est en outre travaillée par la peur d’un renouveau de la puissance militaire allemande. En dépit de la limitation de l’armée allemande à 100 000 hommes, malgré l’occupation de la Rhénanie jusqu’en 1935, l’état-major et le personnel politique ont conscience que le potentiel industriel et démographique de l’Allemagne est resté intact. Par ailleurs, l’isolationnisme des Etats-Unis, perceptible dès le refus du Sénat de ratifier le Traité de Versailles en 1920, montre que la France ne peut compter sur la sécurité collective pour garantir ses frontières. Cette situation incite donc le pouvoir politique et les militaires à créer une vaste ligne fortifiée, afin d’assurer une protection des frontières, de ralentir la progression ennemie et de permettre la mobilisation sereine de l’armée française en vue d’une contre-offensive. Les travaux commencent dès 1928, deux ans avant que la première loi d’attribution des crédits ne soit votée au Parlement. En 1935, les régions de Metz et de la Lauter sont fortifiées, de même que les rives du Rhin, ainsi que les cols des Alpes. L’arrivée d’Hitler au pouvoir en 1933 déclenche une nouvelle phase de constructions. Entre 1934 et 1938, les secteurs entre Bitche et la Sarre et entre Montmédy et Sedan sont ainsi fortifiés, sans toutefois avoir la puissance des éléments de la première tranche.
Contrairement à une légende tenace, en dépit de ses défauts (pas de défense anti-aérienne, mobilisation d’effectifs importants, sans oublier les « trous » dans la ligne fortifiée comme les Ardennes réputées impénétrables aux chars), tous les forts de la ligne ne sont pas pris à revers par les armées allemandes. Certains ont été abandonnés sur ordre (secteur de Montmédy), tandis que d’autres ont résisté aux attaques ennemies jusqu’à l’armistice, aussi bien au nord-est que dans les Alpes. Réutilisées par les troupes allemandes de 1940 à 1944 puis par les forces américaines ensuite, ces fortifications ne sont pas abandonnées par l’armée française après 1945. Celle-ci entreprend des travaux de reconstitution, voire de modernisation des éléments fortifiés, ce qui explique le bon état de certains ouvrages et le fonctionnement des équipements électriques. Ce n’est qu’en 1967 que tout entretien est définitivement interrompu. La modernisation de l’armée et le rapprochement avec l’Allemagne de l’Ouest (traité de l’Elysée signé en 1963) rendent obsolètes des fortifications frontalières. Dès lors, la ligne Maginot entre dans une logique de patrimonialisation. Des ouvrages deviennent des musées, tandis que des associations de bénévoles entreprennent de restaurer des parties oubliées de ce vaste complexe défensif. Parallèlement, les travaux historiques (Jean-Pierre Richardot, Julian Jackson et plus récemment Rémy Porte) ont rendu justice aux combattants de l’armée de 1940. Le mythe d’une armée en débâcle, sans avoir combattu, a ainsi été démenti, y compris pour ceux de la ligne Maginot. Peu à peu, elle acquiert une charge patrimoniale forte en devenant un lieu de mémoire.
Éclairage média
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Dans son introduction au reportage, David Pujadas rappelle l'évolution mémorielle de la ligne Maginot. Hier symbole de la Débâcle de 1940, avec une armée défaite en six semaines, elle est devenue aujourd'hui un lieu touristique et un élément du patrimoine national. Certains de ses éléments sont d’ailleurs classés ou inscrits à l’inventaire des monuments historiques, tel l’ouvrage d’artillerie du Simserhof en Moselle. L'émission met ainsi l’accent sur le processus de patrimonialisation dont ont bénéficié certaines parties de la ligne. Le reportage débute par un plan large sur la frontière allemande, qui rappelle la fonction première de cet ensemble fortifié. La caméra se fixe ensuite sur une casemate vue de loin que l'on discerne mal dans la végétation. Un plan rapproché permet d'en observer l'aspect et le fonctionnement. Des images d'archives, en noir et blanc, montrent d'abord l'extérieur puis l'intérieur des fortifications, tandis qu'une voix-off précise les raisons stratégiques de la construction. Une carte détaille alors le tracé de la ligne Maginot qui courait de la Meuse à la Suisse. Après cette infographie, le reportage filme un groupe de touristes s'apprêtant à visiter le fort de Hackenberg. Ces derniers, sur un train d'époque, parcourent les tunnels du fort en présence d'un guide. Ce dernier, Claude Poesy, membre de l'association du fort du Hackenberg, donne des éléments d'explication sur cet ouvrage de la ligne Maginot. L'alternance image d'archive/image actuelle sur les cuisines, avec les explications de Claude Poesy, permet de saisir non seulement la modernité des installations fonctionnant à l'électricité, soulignée par un plan sur les groupes électrogènes, mais aussi le travail de restauration entrepris par les membres de l'association. Des touristes donnent ensuite leurs sentiments sur leur visite. Suivent alors des images d'archives allemandes, en noir et blanc illustrant la percée allemande de la Meuse en mai 1940, tandis qu'un voix-off explique que les soldats français encerclés se sont rendus sans combattre. Reddition montrée à l'écran par un extrait d'un film de l'armée allemande. Il convient toutefois de préciser que cette situation n’a pas concerné l’ensemble des forts de la ligne Maginot.
Dans sa seconde partie, le reportage s'intéresse à un fort situé en pleine forêt. Abandonné puis pillé, il connaît une réhabilitation entreprise par des lycéens bénévoles, membres de l'association "La Lorraine à travers les siècles". L’investissement de ces bénévoles souligne que la valorisation d’un patrimoine n’appartient pas qu’à l’Etat ou aux collectivités territoriales. Elle peut être prise en charge par d’autres acteurs, comme ici par des élèves du secondaire. Un adhérent de cette structure, Kevin Bressan, explique le travail entrepris, tandis qu'un plan large montre l'espace dégagé par les efforts de ses camarades. Ces lycéens, que l'on voit travailler au débroussaillage du fort, expliquent à l'écran leur travail qu'ils inscrivent dans un devoir de mémoire. La caméra pénètre ensuite à l'intérieur du bâtiment et s'attarde sur des graffitis de soldats français mis en valeur par le travail de ces bénévoles. Un plan sur la salle des filtres suit, tandis que Kevin Bressan explique la fonction des machines aperçues, destinées à neutraliser les effets d'une attaque ennemie au gaz. Enfin, des lycéens sont montrés en train de restaurer l'infirmerie et les cuisines tandis que la journaliste explique leur ambition : ouvrir à terme le fort aux visites du public. Un dernier plan montre un membre de cette association marchant dans un des couloirs souterrains de l'ouvrage.
Transcription
(Cliquez sur le texte pour positionner la vidéo)
David Pujadas
Un voyage maintenant.Un voyage à la découverte d’un patrimoine méconnu, et c’est aussi un bond en arrière dans l’histoire.Que reste-t-il de la fameuse ligne Maginot ?Cette barrière gigantesque et réputée inviolable avait été érigée après la première guerre mondiale pour éviter une nouvelle invasion allemande, on sait ce qu’il en a été finalement.Elle a longtemps incarné la honte de la défaite, puis elle a été réhabilitée aujourd’hui, c’est devenu une attraction touristique.Florence Griffon, Mathieu Renier.
Florence Griffond
Les collines à l’horizon, c’est l’Allemagne, et juste devant la ligne Maginot.Une ligne presque invisible composée d’ouvrages d’artillerie tous les 6 kilomètres, des canons, des mitrailleuses, actionnés par des hommes cachés sous la terre et à l’abri de l’ennemi.Il fallait à tout prix éviter de répéter l’enfer des tranchées de 14-18.La ligne Maginot devait être une barrière infranchissable de la Meuse à la Suisse.Voici aujourd’hui l’un des plus importants vestiges de cette ligne de défense, le fort du Hackenberg, 33 000 visiteurs chaque année.Ici, les touristes empruntent un train d’époque pour remonter dans le temps et découvrir un gigantesque labyrinthe.
Claude Poesy
C’est 10 kilomètres de galeries, 19 blocs, et sur ces 19 blocs il y a 15 blocs de combats, 2 blocs d’observation, 2 blocs d’entrée, tous reliés par une galerie souterraine plus ou moins enterrée à 30 mètres sous terre.
Florence Griffond
Au Hackenberg, dès 1935, 1 600 soldats se tiennent prêts en cas d’invasion de l’Allemagne.Tout était prévu pour tenir un siège de 3 mois sans jamais sortir à la surface.
Claude Poesy
Ces cuisines de troupe sont hyper modernes pour 1935.Ce sont des marmites en inox, conçues à cette époque-là, alors que l’inox n’est apparu dans le civil français qu’en 1953.
Florence Griffond
Tout fonctionnait à l’électricité, le train, les 200 radiateurs, les moteurs des pièces d’artillerie.Les groupes électrogènes fonctionnent encore aujourd’hui.
Inconnue
Même Alsacienne, je connaissais sans connaître et j’étais impressionnée, vraiment impressionnée.
Inconnu 1
Je suis époustouflé, franchement, ces longueurs de tunnel.On parle du métro parisien, c’est un peu ça.
Florence Griffond
Mais ce fleuron de l’armée française n’a jamais arrêté l’ennemi.Le 13 mai 1940, Hitler attaque la France, il contourne la ligne Maginot en passant par la Belgique.Après l’armistice, les soldats français, contraints et forcés, remontent à la surface.La plupart se rendent sans même avoir combattu.Une page de notre histoire peu glorieuse et peu connue.De nombreux vestiges ont été abandonnés comme ce fort en pleine forêt jusqu’à ce que des jeunes de la région le découvrent en 2011 et décident de le réhabiliter.
Kevin Bressan
Le premier jour, on est arrivé ici, on ne le voyait pas de là où on est.C’était vraiment la forêt du haut des escaliers jusqu’en bas, les escaliers aussi ils étaient recouverts de terre.
Florence Griffond
Ces lycéens se sont investis d’un devoir de mémoire.Ils coupent les arbres, débroussaillent, charrient la terre.Ils viennent ici après les cours et les week-ends.
Kevin Bressan
Au départ on ne connaissait vraiment rien de rien à la ligne Maginot, puis depuis maintenant on a plein de connaissances sur tout…
François Winzenrieth
La passion, elle prend le dessus, on apprend plein de choses tous les jours.
Florence Griffond
Ce petit fort inauguré en 1932 recèle encore des trésors, comme ces dessins de soldats, les lycéens les ont nettoyés avec les moyens du bord.
Kevin Bressan
Quand on l’a découvert, c’était des toiles d’araignées partout, des araignées par centaine.Puis, il n’y avait pas d’éclairage, il n’y avait rien du tout parce que tout a été volé.Donc, les travaux du début, ils ont débuté avec de bougies, des lampes de poche.C’était vraiment pendant plusieurs mois, on a fait comme ça, avec les moyens qu’on avait.
Florence Griffond
Ici, 150 soldats ont, eux aussi, attendu l’invasion allemande.
Kevin Bressan
Ça, c’est la salle des filtres, vous dites aussi salle de neutralisation.Donc là on voit les filtres de l’époque.Ça servait à, si le fort il était gazé, l’air passait dans ces tuyaux, et elle rentrait dans ces filtres et après une fois qu’elle était propre elle était redistribuée dans le fort.
Florence Griffond
Kevin et ses copains ont déjà repeint quelques murs et s’attaquent maintenant à la restauration de l’infirmerie ou de la cuisine.Leur rêve, ouvrir un jour ce lieu aux touristes pour que la ligne Maginot retrouve toute sa place dans le patrimoine français.
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