Archéologie des épaves du littoral héraultais
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Résumé
Le Musée de l’Éphèbe d’Agde abrite un patrimoine archéologique subaquatique exceptionnel. Les épaves et les objets retrouvés sous la mer nécessitent un travail de recherche considérable qui va permettre, en croisant des disciplines comme l‘archéologie, la géographie et l’histoire, de les replacer dans leur contexte et de les identifier.
Date de publication du document :
21 déc. 2022
Date de diffusion :
31 oct. 2009
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Contexte historique
ParIngénieure d’études au Département des recherches archéologiques subaquatiques et sous-marines (ministère chargé de la Culture), rattachée au CNRS, UMR 5140, Université Paul Valéry Montpellier 3
Odile Bérard-Azzouz, conservatrice du Musée de l’Éphèbe, insiste sur l’importance du contexte archéologique dans lequel s’insère le mobilier découvert au cours des fouilles. En effet un site pillé doit être comparé à un livre dont on a arraché les pages. Le véritable intérêt d’un vestige archéologique est perçu à travers sa fonction et l’histoire qu’il raconte dans sa relation aux objets qui l’entourent. Le contenu des épaves est précieux car il nous fournit des informations uniques sur la composition des cargaisons, reflet de la diversité et du haut degré de technicité du commerce maritime dans l’Antiquité, insoupçonné jusque-là.
Un inventaire des biens culturels maritimes (BCM) du littoral de l’Hérault, financé par l’État, la région Languedoc-Roussillon (aujourd’hui Occitanie) et le Département, a débuté en 2009 et s’est achevé en 2012. Ce programme a permis de relocaliser des sites archéologiques découverts dès les années cinquante et dont la position exacte était en passe d’être perdue. En effet, les amers (repères fixes et visibles de loin : clochers, tours, châteaux d’eau, antennes de télévision, etc., situés sur la côte et qui servent à repérer précisément un emplacement en mer) sont aujourd’hui masqués par les constructions récentes et doivent être remplacés par des coordonnées acquises au moyen de GPS.
L’occupation des littoraux est également à l’origine de modifications sensibles du paysage qui se ressentent d’autant plus qu’elles affectent une côte basse et sableuse. Une élévation du niveau de la mer Méditerranée, inférieure à 25 cm au cours des 1500 dernières années, provoque telle qu’elle est actuellement estimée, un recul du trait de côte de plusieurs dizaines de mètres. Inversement, sur d’autres secteurs comme celui de l’Espiguette par exemple, on relève au contraire une forte accrétion, la terre progressant alors sur la mer. C’est ainsi que des épaves de navires peuvent aujourd’hui se retrouver sous la plage alors que des sites d’habitat peuvent être ennoyés.
La carte des épaves du littoral de l’Hérault, de l’Antiquité à nos jours, révèle des concentrations de naufrages localisées préférentiellement devant les embouchures des fleuves et des graus, actuelles ou plus anciennes. L’emplacement des anciens graus est reconnu grâce à la toponymie ou en utilisant des cartes et des plans dont les levés peuvent remonter jusqu’au XVIIIe siècle, comme la carte de Cassini. Des cartes antérieures sont souvent inutilisables car trop imprécises. On observe alors que les Anciens privilégiaient, chaque fois que cela était possible, la navigation endolagunaire (à l’intérieur d’une lagune). Par exemple, dans l’Antiquité, une véritable mer intérieure s’étendait du Rhône à La Gardiole et permettait une navigation à l’abri de la houle du large grâce au cordon littoral, comme l’atteste encore la chronique de l’évêché de Maguelone durant le haut Moyen Âge. Pour les périodes plus récentes, moderne et contemporaine, les recherches en archives, tout particulièrement aux Archives départementales de l’Hérault, permettent d’identifier nombre de naufrages et de connaître la suite de l’histoire, le devenir des marins et des passagers ainsi que les tentatives de récupération des cargaisons.
Bibliographie
- Antoine Golf, Louis Haesslé, Le redoutable, funeste et dangereux Golfe du Lion : récits des naufrages de 1670 à 1899. Editions CLERSMAR, 2007.
- Marie-Pierre Jézégou, « Les paysages littoraux, fluviaux et lagunaires des alentours d’Agde, de l’âge du Fer à l’Antiquité, au regard des vestiges archéologiques » dans Benoît Devillers, Pau Olmos Belloch, Père Castanyer (dir.) Les paysages littoraux. Évolution et risque d’érosion du patrimoine, Méditerranée n°133, 2021, pp. 53-66.
Transcription
(Cliquez sur le texte pour positionner la vidéo)
Odile Bérard-Azzouz
Si l'on découvre au fond de l’eau un objet archéologique, il n’appartient pas à la personne qui le découvre, il appartient à tous, à tout le monde.Et la loi protège ce patrimoine sous-marin et il est fait pour être étudié, que le contexte soit étudié.C’est pour cette raison qu’on dit aux gens "laissez-le en place et allez le déclarer aux Affaires maritimes" parce qu’il faut étudier le contexte, il faut comprendre l’objet.Un objet tout seul n’a pas de valeur, enfin beaucoup moins de valeur qu’un objet avec tout un contexte.Si on sait qu’il n'y a qu’une amphore on ne sait pas ce qu’il y a autour, alors si on sait qu’il y a une épave chargée c’est très important.
(Musique)
Isabelle Bris
Au musée de l’Éphèbe du Cap d’Agde, toutes les collections proviennent de la mer ou du fleuve.C’est le seul musée en France à être exclusivement consacré à l’archéologie sous-marine.La plupart des pièces exposées ont été trouvées par des plongeurs amateurs, certaines sont des œuvres d’art inestimables, comme cet étrange Éros aux yeux d’argent, ou cette statue d’Enfant royal.
(Musique)
Odile Bérard-Azzouz
On a discuté longuement sur cet enfant et on pencherait pour Césarion, le fils de Cléopâtre et de César.Il y a une enquête qui continue, jamais les enquêtes sont classées.Regardez l’Éphèbe, on a mis au moins vingt ans pour vraiment dire c’est bien une représentation d’Alexandre Le Grand.Donc bon, de fil en aiguille et de nouvelles découvertes, la recherche chemine toujours dans un sens donc on ne classe pas ces affaires-là.
Isabelle Bris
Retour à terre pour un autre voyage, dans le passé cette fois, car pour faire parler une épave, il faut connaître le contexte historique et géographique de son naufrage.
Marie-Pierre Jézégou
En couplant nos travaux proprement archéologiques avec l’enquête géographique en amont, eh bien il faudra essayer de comprendre pourquoi nous avons des accumulations d’épaves sur certains secteurs du littoral plutôt que sur d’autres.Mettre ces accumulations d’épaves en relation avec de probables embouchures de fleuves ou de probables chenaux de communication avec les étangs.Puisqu’on sait qu’aussi bien dans l’Antiquité qu’au Moyen Âge on préférait naviguer dans les étangs et qu’on pouvait aller de Narbonne en Arles par la voie des étangs.Et qu’on ne sortait en mer que lorsque c’était absolument nécessaire.Et à l’inverse, les étangs, la rive intérieure des étangs, étaient densément habités et il fallait approvisionner ces populations avec des bateaux qui venaient de la mer puisqu’ils venaient de l’Afrique du Nord, venaient de Rome, venaient de Marseille.Et donc ces navires, l’endroit le plus dangereux pour eux c’était l’approche de la côte et le moment où il fallait prendre ou l’embouchure du fleuve ou le chenal qui permettait d’accéder au port lagunaire loin à l’intérieur de la lagune.
Isabelle Bris
Première étape, l’ordinateur d’Akim.Ce géographe étudie le mouvement du littoral.
Marie-Pierre Jézégou
Est-ce que ça se voit ça sur tes cartes anciennes ?Ça peut être une autre question.
Akim Rakroki
Le problème, parce qu’il y a toujours un problème, c’est que ces cartes ne sont pas, ça ne date pas d’hier, c'est le cas de le dire, elles datent du XIXe siècle et parfois du XVIIe.
Marie-Pierre Jézégou
XVIIIe ou du XVIIe.
Akim Rakroki
Et du coup les procédés de lever n’étaient pas justes mais ça générait beaucoup d’erreurs.
Marie-Pierre Jézégou
N’étaient pas les mêmes qu’aujourd’hui et donc pas exacts.Moi, j’aimerais beaucoup voir ce qui se passe du côté de l’Espiguette.
Akim Rakroki
Alors par exemple du côté de l’Espiguette, alors on a eu ça.En grossissant.On a 3300 mètres de progression.
Marie-Pierre Jézégou
La côte a avancé sur la mer de 3 kilomètres.
Akim Rakroki
3, 300 kilomètres à peu près.
(Musique)
Isabelle Bris
Un bateau qui a coulé à l’embouchure d’un fleuve il y a plusieurs siècles peut donc aujourd’hui se situer loin en mer ou au contraire à l’intérieur des terres.De quoi compliquer la tâche de l’équipe du DRASSM, chargée de retrouver et d’expertiser une centaine de sites sous-marins le long du littoral héraultais.Sur ces 113 épaves, seules celles qui sont en rouge ont été repérées de manière précise.L’emplacement des autres en jaune est plus ou moins bien déterminé, beaucoup d’entre elles sont même en passe d’être perdues.
(Musique)
Isabelle Bris
Une fois ces épaves retrouvées, il faudra raconter leur histoire.Direction les archives municipales de Frontignan, à la recherche d’indices.
Laurence Serra
Ça va être un travail énorme, il y en a pour au moins 10, 10 ans minimum de travail en sachant que pour les épaves antiques c’est plus compliqué puisque évidemment on a peu de traces écrites.Mais par contre pour les épaves contemporaines on va pouvoir se régaler à retrouver et identifier, mettre un nom sur de simples morceaux de bois, voilà.Donc ça va être vraiment super.
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