Le picard : une langue, une culture et des valeurs
Une langue et bien plus...
Depuis la publication en 1999 du rapport sur les langues de France proposé par Bernard Cerquiglini, le picard, aux côtés de 22 autres langues comme le breton, le corse ou le normand, est officiellement reconnu comme l'une des langues régionales de France.
S'étendant sur un territoire linguistique large comptant pas moins de cinq départements français (Aisne, Nord, Oise, Pas-de-Calais et Somme) mais aussi tout le Hainaut belge, la langue picarde dispose d'une très ancienne tradition littéraire qui fait d'elle l'une des variétés d'Oïl les plus richement dotées en œuvres poétiques, théâtrales, ou encore en chansons et en dictionnaires.
Bien plus qu'une langue, le picard est le symbole d'une culture et de traditions toujours bien vivaces, qui à travers le soutien et le travail de multiples acteurs de terrain sont non seulement défendues mais aussi diffusées auprès des jeunes générations.
La langue picarde
Le domaine linguistique du picard occupe un large territoire qui couvre une partie des départements de Picardie, Le Nord Pas-de-Calais et la région de Mons-Tournai en Belgique. Il est en régression depuis la Première Guerre mondiale. Les derniers "vrais patoisants" ruraux pour la plupart, disparaissent. A Oresmaux, un petit village de la Somme, le dernier, Ernest Pascal, a disparu en 1984. On peut l'entendre dans un document sonore (sous-titré), enregistré par P T Colleuille en 1975. Tchot d'Mmond reconnaît qu'il n'y a plus personne qui parle patois dans le village. Laurent Devime, président de l'association Tertous, explique que les locuteurs ne veulent pas dire qu'ils parlent le picard, cette pratique étant assimilée à un monde paysan, à une image négative. Mais, fait-il remarquer, dans le langage courant, il reste toujours des termes de picard qui sont utilisés dans la conversation. Des structures associatives comme les Patoisants du Ponthieu et du Vimeu, ou Ch'lanchron, maintiennent la tradition et la pratique de la langue picarde. Eugène Chivot, président des Picardisants du Ponthieu et du Vimeu, considère cette langue comme un patrimoine qui s'enrichit (il cite à ce propos l'apport de Léopold Devismes). Aimé Savary, explique qu'il y a une diversité dialectale qui n'aide pas à le compréhension de tout le monde. Eugène Chivot parle d'une "langue astucieuse" qu'on peu difficilement traduire parfois ; "pour écrire en picard, il faut penser en picard" conclut-il. Laurent Devime présente Lafleur symbole de ceux qui parlent picard. Son association, Tertous, qui regroupe 50 autres associations picardisantes milite pour une défense radicale de la culture picarde et de la langue, à la radio, la télévision, etc.
Une langue régionale en attente d'une plus grande reconnaissance
Adoptée par la convention européenne de 1992 - sous les auspices du Conseil de l'Europe -, la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires a été proposée pour protéger et promouvoir un pan du patrimoine culturel européen : les langues régionales et les langues des minorités.
Ratifiée par plusieurs pays européens tels que l'Allemagne, l'Espagne ou encore les Pays-Bas, cette charte n'est à ce jour que signée par la France. En dépit des promesses gouvernementales encore récentes, la ratification de cette charte n'est en effet pas sans soulever plusieurs problèmes idéologiques et constitutionnels jugés comme difficilement surmontables.
La langue picarde : situation après la signature de la Charte des langues régionales
La France a signé la Charte européenne qui reconnaît les langues régionales. La Charte prévoit une réhabilitation des langues régionales qui laisse présager d'une promotion du picard. Mais un rapport demande la compétence du Conseil régional en la matière, ce que refuse le conteur Laurent Devime qui souligne l'image négative qu'ont les institutions de la langue régionale. S'il est difficile d'évaluer le nombre de personnes qui parlent le picard dans l'ensemble du domaine linguistique, J M Eloy explique que ce qui fait la richesse d'une langue, c'est aussi sa littérature, et l'attachement des habitants. A suivre à l'Assemblée nationale, avec un débat sur les langues qui seront effectivement concernées.
Dans l'attente de la ratification salutaire de cette charte, la langue et la culture picardes bénéficient, depuis plusieurs décennies déjà, de soutiens multiples et variés – institutionnels ou associatifs – qui lui assurent un rayonnement toujours significatif et font d'elle un patrimoine qui continue tant bien que mal à être transmis aux jeunes générations.
Un tissu associatif très actif
Plusieurs acteurs institutionnels œuvrent à ce jour pour la défense et la promotion des valeurs picardes. Le conseil régional de Picardie, à travers notamment les nombreuses missions confiées à l'Agence pour le picard, se distingue ainsi comme un artisan essentiel de cette entreprise. Citons aussi le rôle important d'organismes universitaires tels que le « Centre d'Études Picardes (CEP) » ou le laboratoire « Linguistique Et Sociolinguistique : Contacts, Lexique, Appropriations, Politiques (LESCLAP) » de l'Université de Picardie Jules Verne, tous deux impliqués dans les activités de recherche conduites sur la langue et la littérature picarde.
Création de l'agence de langue Picarde
Les picardisants prennent en main la promotion de la langue Picarde. L'OCPR, (Office culturel régional de Picardie) dépendant du conseil régional, est remplacé par une structure indépendante, l'Agence pour le picard. Ce reportage fait un bilan de la vivacité du picard. Les éditions en picard comme les Tintin et les Astérix ont rencontré de vrais succès de librairie. A Abbeville, ils sont plusieurs à se réunir toutes les semaines pour échanger des textes. Bertrand Cuvelier, président de l'Agence, rappelle que le picard était une langue de culture, pratiquée par les universitaires au Moyen Age à Paris. L'Agence a en charge à développer les initiatives comme le festival Chés Wèpes ou encore l'enseignement. Olivier Engelaere espère que la valorisation de la langue permettra de déculpabiliser ceux qui la pratiquent.
Parallèlement à ces acteurs du monde institutionnel, de nombreuses associations militantes œuvrent elles aussi pour promouvoir le picard. Relativement nombreuses, elles couvrent un spectre très large permettant de défendre à la fois la langue, la culture, mais aussi l'identité picarde.
Depuis les plus anciennes associations militantes telles que Chti qu'i Pinse , Tertous Gadrus ou encore Fédération Insanne , le tissu associatif des picardisants s'est considérablement développé et diversifié pour représenter au mieux toute la richesse des facettes culturelles de cette langue et de son territoire. Plusieurs associations, exerçant chacune dans son domaine un rôle prépondérant, peuvent ainsi être citées.
Le théâtre Chés Cabotans d'Amiens créé en 1933 par Maurice Domon et actuellement dirigé par Françoise Rose-Auvet, assure ainsi la pérennité de la tradition du théâtre de marionnettes dont la Picardie s'est fait une spécialité au fil des siècles. À travers la figure emblématique de la marionnette « Lafleur » et de celle de ses compagnons « Sandrine », « Tchot Blaise », « Popaul Calicot » ou encore « Papa Tchutchu », ce sont les nombreuses valeurs et l'identité picardes elles-mêmes qui s'affirment.
Chés Cabotans et Lafleur
Présentation de Chés Cabotans d'Amiens, troupe de théâtre de marionnettes fondée en 1933. Jacques Auvet, définit le personnage de "Lafleur", né fin du XVIIIe début XIXe siècle, dont la devise est bien manger, bien boire, et ne rien faire". Ce théâtre de marionnettes est un théâtre populaire dans lequel transperce des revendications sociales.
La chanson en langue picarde bénéficie pour sa part du soutien de plusieurs associations telles qu'Ozyvo ou Achteure. S'appuyant sur des figures aussi emblématiques que celle de Philippe Boulfroy ou sur celles de jeunes picardisants comme David Lefevre ou Adrien Helminiak, ces associations proposent un équilibre judicieux entre la visibilisation d'un riche répertoire patrimonial et la mise en scène de la modernité musicale de cette langue.
Ozyvo association de promotion de la langue picarde
Ozyvo est une association et un groupe de musique nés pour défendre et promouvoir la langue Picarde. Après des cours de picard, ils proposent désormais un fanzine, distribué principalement dans le quartier Saint-Leu d'Amiens. Rencontre avec David Lefevre dit "Tiodave" et Adrien Helmaniak qui nous entraînent dans le quartier Saint-Leu à Amiens, à Fonsommes et Harponville dans l'Aisne chez des grands-parents qui ont donné le goût de la langue à leurs petits enfants.
Le premier CD de chansons en picard de l'association Achteure
Chés piéds din l'ieu, pi'ch né in l'air, c'est le titre du CD du groupe picard Achteure, un album avec 15 titres en langue régionale. Portrait de groupe, lors d'une répétition à domicile. Les chansons vont de "Nou Somme" (les pieds dans l'eau), à une chanson sur le projet d'aéroport dans le Santerre (Le nez en l'air). Philippe Boulfroy, président de l'association Achteure et chanteur , en profite pour déclamer sa revendication politique à propos de la langue Picarde : pour qu'elle soit enseignée à l'école.
La littérature picarde, l'une des plus anciennes traditions littéraires de France, s'affirme depuis plusieurs siècles déjà sous la plume d'auteurs aussi célèbres qu'Eugène Chivot, Armel Depoilly, Jules Mousseron, Gaston Vasseur, ou encore plus récemment Jacques Dulphy, Pierre Ivart ou Jean-Luc Vigneux. Elle se trouve défendue avec succès par des associations comme Ch'lanchron, laquelle s'attache tout autant à la diffusion des œuvres de la tradition qu'à la promotion des œuvres modernes, y compris en proposant Éch picard din chl'intarnéte (le picard sur internet).
Les 30 ans de Ch'lanchron
L'association Ch'lanchron fête ses 30 ans. Rétrospective à partir d'archives. Jacques Dulphy, fondateur se remémore la création du "pissenlit" (ch'lanchron) qui est "monteu à graines". Une publication tous les trois mois avec des centaines d'auteurs "d'éch Vimeu, d'éch Ponthieu et pi d'eute pért". Pour Jean Luc Vigneux , le premier éditorial est toujours d'actualité. Le reportage se termine en chanson, en picard.
Une activité lexicographique exemplaire
À côté de ces différentes productions artistiques, s'affirme une importante activité de création de ressources lexicales. De toutes les langues régionales de France, la langue picarde est en effet celle qui possède sans doute le plus grand nombre de répertoires destinés au recensement des mots de la langue, qu'ils soient désignés sous le terme de « lexique », « glossaire », « vocabulaire » ou encore « dictionnaire ». Initiée au XVIIe siècle, cette tradition lexicographique a la particularité de ne pas disposer d'ouvrage constituant une référence pour l'ensemble du domaine linguistique et se perpétue encore aujourd'hui avec des initiatives telles que la publication de l' Amassoér, Dictionnaire picard-français français-picard de Marie-Madeleine Duquef et celle du Dictionnaire général du picard de Jean-Marie Braillon.
Un dictionnaire franco-picard de Marie-Madeleine Duquef
L'Amassoér le dictionnaire français-picard agrémenté d'anecdotes populaires et rédigé par une habitante du quartier Saint-Leu, d'Amiens, Marie-Madeleine Duquef, vient d'être réédité. L'auteure précise que ce n'est pas DU picard qu'il s'agit,mais du picard de Saint-Leu. Philippe Leleux, libraire, en est l'éditeur. Il apprécie dans ce dictionnaire la contextualisation des mots par des histoires.
Un travail de recensement critique de ce patrimoine lexicographique picard est actuellement en cours de réalisation au sein du Laboratoire de recherche « Linguistique et Sociolinguistique : Contacts, Lexique, Appropriations, Politiques (LESCLAP) » de l'Université de Picardie Jules Verne.
Enseigner et diffuser la langue
L'une des missions les plus difficiles mais certainement les plus essentielles concerne l'enseignement de la langue et de la culture picardes. Alors que la situation n'est malheureusement plus celle connue il y a plusieurs décennies déjà - par exemple, l'utilisation du dispositif pédagogique des 10 % (voir ci-dessous) -, plusieurs acteurs œuvrent pour faire entrer le picard dans le milieu scolaire. C'est notamment le cas des associations Ozyvo et Achteure déjà mentionnées plus haut, mais aussi d'autres initiatives conduites par exemple par l'Agence pour le picard ou par l'association Tertous Gadrus de Jean-Pierre Semblat, créateur de l'école en picard « Perluète » et organisateur depuis 1983 d'un « Chertificat d'études picard ».
L'utilisation des 1o% pédagogiques pour parler picard au CES de Moreuil
Au CES de Moreuil on utilise les 10% pédagogiques (10% de l'horaire consacré à la mise en place de projets non liés aux programmes) à l'expression en picard. Les élèves sont d'origine rurale et l'on parle encore picard dans les familles et certains d'entre eux sont plus à l'aise pour parler de leur environnement en picard plutôt qu'en français.
Ateliers en picard pour des élèves de Pont Sainte-Maxence
A Pont-Sainte-Maxence, la bibliothèque Reine Philiberte a mis en place, en collaboration avec l'éducation nationale, des ateliers picards pour les élèves de CM 1 et CM 2. Les ateliers sont animés par Jean-Pierre Semblat de Tertous Gadrus . Alexandra Bussière enseignante, et Christiane Mecozzi, directrice de la bibliothèque, soulignent le succès de ces initiatives tant auprès des enfants que des parents.
Signalons également l'existence de cours de langue et de littérature picardes dispensés au sein de l'Université de Picardie Jules Verne, permettant non seulement aux étudiants de la région de découvrir ou de redécouvrir une partie de leur patrimoine, mais permettant aussi de faire connaître cette langue et cette culture à de nombreux étudiants en provenance d'autres pays.
La question de l'enseignement des langues régionales, et notamment du picard, est une question qui soulève des enjeux véritables et illustre une réelle demande, ainsi que l'atteste l'existence de différentes méthodes d'apprentissage de la langue picarde. La plus ancienne est celle publiée en 1988 par Paul Mahieu et baptisée Si t'es d'ichi parle comme ichi . Plusieurs ouvrages sont ensuite parus chez l'éditeur Assimil : Chtimi * de poche, Picard de poche* et Parle-moi « Chti », toutes prises en charge par Alain Dawson et respectivement éditées en 2002, 2003 et 2006.
La Picardie linguistique en Belgique
Philippe Dessaint, depuis la maison de la culture de Tournai, aborde avec Paul Mahieu le domaine linguistique picard qui s'étend jusqu'au Hainaut Belge. A Tournai, une section s'occupe de sauvegarder et promouvoir le picard. Le domaine de l'édition, en particulier de la poésie est très vivant. Une méthode d'apprentissage Le Picard en 50 leçons "Si t'es d'ichi parle comme ichi" remporte aussi un grand succès.
Une méthode Assimil pour parler en picard
Les éditions Omnivox ont édité Eche pikar bél é rade une sorte de "Méthode Assimil" pour apprendre le picard accompagnée de deux cassettes enregistrées par Jacques Auvet et Françoise Rose de Ches Cabotans. Le dialecte choisi est celui de l'amiénois ; René Debrie, l'auteur, s'en explique. Henri Fulton, l'éditeur qui a déjà édité des méthodes en langues régionales, distribuera la méthode en France et à l'étranger.
À ces méthodes de langue s'ajoutent plusieurs publications de l'éditeur Bonneton recensant des expressions et dictons des différentes zones linguistiques picardes : Le parler du Nord Pas-de-Calais publié en 2006 par Fernand Carton et Denise Poulet, mais aussi Expressions et dictons du Nord Pas-de-Calais, publié également par Fernand Carton en 2007, ou enfin Expressions et dictons de Picardie, publié en 2008 par Jean-Marie Braillon.
Éditer la langue picarde
La question de l'édition en langue picarde est importante et montre là aussi une vitalité évidente de cette variété linguistique de France. Différents acteurs du monde éditorial œuvrent en effet pour la publication de chefs-d'œuvre de la littérature ou de textes de picardisants modernes, comme la maison d'édition La librairie du Labyrinthe de Philippe Leleu, l'association Ch'Lanchron , ou encore la maison d'édition Engelaere Editions. Mentionnons aussi l'activité éditoriale du « Centre d'études Picardes » hébergé par l'Université de Picardie Jules Verne et qui diffuse depuis plusieurs années un nombre important de textes littéraires mais aussi techniques (grammaires, dictionnaires, lexiques) sur la langue picarde.
Portrait d'une amoureuse de la langue Picarde : Marie-Madeleine Duquef
Portrait de Marie-Madeleine Duquef, figure incontournable à Amiens. Après avoir mis le picard du quartier Saint-Leu en dictionnaires, elle publie un livre de contes et comptines, Min tchot leu, accompagnés d'un CD avec les chansons du livre, illustré par Caroline Flamant. Ces deux femmes séparées par trois générations ont été réunies par un autre défenseur des langues régionales, l'éditeur amiénois Philippe Leleux.
Armel Depoilly, auteur picard
Laurent Devime qui produisait pour FR3 un magazine mensuel sur la culture picarde, avait consacré une émission à Armel Depoilly dit A D ed Dergny, ancien marister (instituteur), vice-président de la Société de la Linguistique Picarde, écrivain... qu'il avait rencontré chez lui à Dergnies dans le Vimeu. Dans cet extrait il dit un de ses poèmes en picard (sous-titré en français) dans lequel il évoque le travail des serruriers du Vimeu. Dans l'entretient qui suit avec Laurent Devime, il rappelle la maxime de Gaston Vasseur - "pour bien écrire en picard il faut penseu en picard"- et évoque son travail d'écriture.
Citons également le travail incontournable de l'Agence pour le picard qui non seulement a mis en place un concours littéraire en picard pour les élèves, organise chaque année le « Prix de la littérature picarde », mais propose également une activité de traduction qui connaît un succès véritable.
Les éditions en langue picarde les plus importantes de ces dernières années concernent le genre de la bande dessinée, puisque les éditeurs Casterman et René ont respectivement décidé de traduire dans différentes langues régionales les aventures des « personnaches ed bindes à dessins Tintin * pis Astérix* ». Avec le corse, le picard est la variété linguistique qui a connu le plus grand succès lors de ces initiatives éditoriales de traduction. Plusieurs albums des aventures de Tintin ont ainsi été traduits : Les Pinderleots de l'Castafiore (1980), El' Trésor du Rouche Rackham (2005), El' Sécrét d'la Licorne (2005), Ch'Cailleu d'étoéle (2007) et El Crape as Pinches d'Or (2013)). Par ailleurs, sous la responsabilité d'Alain Dawson, Jacques Dulphy et Jean-Luc Vigneux, ce ne sont pas moins de trois albums d'Astérix qui ont déjà été traduits, à savoir Astérix i rinte à l'école, (2004), Ch'village copè in II (2007) et Astérix pi Obélix is ont leus ages – Ch'live in dor (2010). Ces succès éditoriaux illustrent toute la vitalité de la langue picarde et l'intérêt que celle-ci suscite, bien au-delà des seules frontières administratives de la Picardie.
Traduction d'un Tintin en picard : "Les Bijoux de la Castafiore"
Les éditions Casterman à Tournai ont édité un Tintin en picard tournaisien. Le succès a été immédiat : 10 000 exemplaires écoulés en trois jours. Lucien Jardez, président du Cabaret wallon de Tournai explique comment les noms des personnages ont été traduits. Son objectif a été d'être le plus picard possible tout en restant compréhensible au plus grand nombre.
Un troisième album d'Astérix traduit en picard
Rencontre dans le Ponthieu avec deux des traducteurs du troisième album d'Astérix en langue picarde, Jean Luc Vigneux et Jacques Dulphy. Ils expliquent qu'au fur et à mesure des albums, la traduction s'est enrichie, en particulier pour les onomatopées.
Se réunir autour de la langue et de la culture picardes
Au-delà des différentes formes de promotion et de défense de la langue évoquées jusqu'ici, faire vivre la langue picarde c'est aussi organiser des festivals qui assurent la promotion de toutes les valeurs de la « picarditude ». En ce sens, l'organisation récurrente du festival picard « Chés Wepès » est exemplaire. Elle permet en effet à tous, petits et grands, de profiter depuis plusieurs années déjà d'un rendez-vous pérenne et donc d'un lieu de rencontre privilégié pour partager la langue et la culture picardes.
Festival Chés Wèpes sur la côte Picarde
Le festival Chés Wèpes se déroule au Crotoy. Ce festival en langue picarde, très populaire, sillonne la côte picarde et propose des contes, des chansons et des jeux picards, dans une ambiance très familiale. Laurent Devime présente ses marionnettes, Adrien Helminiak d'Ozyvo interprète ses chansons, d'autres jouent aux quilles ou au jeu du cailleu. Jean-Marie François raconte la légende de Gargantua qui a creusé la baie de Somme. Le public estival apprécie.
Lors de chacune de ses éditions, ce festival, qui se déplace dans toute la région, réunit les différents acteurs de la vie artistique picarde, proposant ainsi au public des spectacles musicaux, des animations théâtrales, ou encore des lectures de contes, illustrant ainsi toute la modernité de la langue.
Accordant une place importante aux sports et aux jeux traditionnels, ce festival permet aussi aux visiteurs de s'initier à quelques activités traditionnelles telles que « l'assiette picarde », « la table à grenouille » ou bien encore les « javelots picards ».
Moment incontournable de visibilisation des pratiques linguistiques et culturelles, le festival « Chés Wepès » permet de renfoncer le lien nécessaire entre toutes les générations de picards, un lien indispensable pour l'avenir de la langue et de la culture.
Références bibliographiques
- DARRAS Jacques (dir.), PICOCHE Jacqueline, DEBRIE René, IVART Pierre, La Forêt Invisible. Au nord de la littérature française, le picard. Anthologie de la littérature du nord de la France depuis le Moyen Âge jusqu'à nos jours, Éditions Trois Cailloux, Amiens, 476 p., 1985
- DAWSON, Alain, « L'écrivain picardisant aime son dictionnaire (lui non plus) », in Rey, Christophe & Philippe Reynès, eds. Dictionnaires, norme(s) et sociolinguistique, Paris, L'harmattan, 2012, coll.: Carnets d'atelier de sociolinguistique, pp. 85-100.
- ELOY Jean-Michel, La constitution du picard. Une approche de la notion de langue . (en co-édition avec la Bibliothèque des Cahiers de l'Institut de Linguistique de Louvain, éd. Peeters), 259 p., 1997.
- ELOY Jean-Michel (éd.), Des langues collatérales. Problèmes linguistiques, sociolinguistiques et glottopolitiques de la proximité linguistique, Actes du Colloque international d'Amiens (30-11-2003) - Coédition L'Harmattan – CEP, 2 vol. 2004.
Dictionnaires ouvrages lexicographiques :
- BRAILLON, Jean-Marie, 2001, Dictionnaire général français-picard, Tome I, éditions F.I.P.Q.
- BRAILLON, Jean-Marie, 2002, Dictionnaire général français-picard, Tome II, éditions F.I.P.Q.
- BRAILLON, Jean-Marie, 2003, Dictionnaire général français-picard, Tome II, éditions F.I.P.Q.
- BRAILLON, Jean-Marie, Expressions et dictons de Picardie, 2008, Bonneton
- CARTON, Fernand, POULET, Denise, 2006, Le parler du Nord Pas-de-Calais, Bonneton.
- CARTON, Fernand, Expressions et dictons du Nord Pas-de-Calais, 2007, Bonneton.
- CERQUIGLINI, Bernard, Les Langues de la France, Rapport au Ministre de l'Éducation nationale, 1999.
- DAWSON, Alain. Le chtimi de poche parler picard du Nord et du Pas-de-Calais, 2002, Assimil.
- DAWSON, Alain, Picard de poche, 2010, Assimil.
- DAWSON, Alain, Parle-moi "Chti", 2006, Assimil.
- DUQUEF, Marie-Madeleine, Amassoér, dictionnaire picard-français et français-picard, Amiens, 2005, librairie du Labyrinthe.
- MAHIEU, Paul, Si t'es d'ichi parle comme ichi. 50 leçons à son aise, 1988,Maison de la culture de Tournai.
Bandes dessinées en picard :
- Hergé, Les avintures de Tintin . Les pinderleots de l'Castafiore, traduction de Lucien Jardez. Tournai, Éditions Casterman, 1980.
- Hergé, El' Sécrét d'la Licorne, 2005, Editions Casterman.
- Hergé, El' Trésor du Rouche Rackham, 2005, Editions Casterman.
- Hergé, Ch'Cailleu d'étoéle, 2007, Editions Casterman.
- Hergé, El Crape as Pinches d'Or, 2013, Editions Casterman.
- René Goscinny et Albert Uderzo, Astérix i tinte à l'école. Quatore tchots racontages à Astérix . Traduit en picard par Alain Dawson, Jacques Dulphy et Jean-Luc Vigneux. Paris, Les Éditions Albert René, 2004.
- René Goscinny et Albert Uderzo. Ch'village copè in II . Traduit en picard par Alain Dawson, Jacques Dulphy et Jean-Luc Vigneux. Paris, Les Éditions Albert René, 2007.
- René Goscinny et Albert Uderzo, Astérix pi Obélix is ont leus ages. Ch'live in dor . Traduit en picard par Alain Dawson, Jacques Dulphy et Jean-Luc Vigneux. Paris, Les Éditions Albert René, 2009.