Dom Juan de Molière et Athalie de Racine, mis en scène par Roger Planchon au TNP de Villeurbanne
Notice
Roger Planchon propose avec ces deux pièces une réflexion sur la religion : Athalie montre les extrémités totalitaires auxquelles peuvent venir certains défenseurs de la foi, tandis que Dom Juan présente une figure d'athéisme qui interroge les religieux comme les athées. Extraits de la fin d'Athalie (acte V, scènes 6 et 8) et de la scène 3 de l'acte I de Dom Juan.
- Dom Juan ( Molière - Auteur / Roger Planchon - Mise en scène)
- Athalie (Jean Racine - Auteur / Roger Planchon - Mise en scène)
Éclairage
Tandis que Dom Juan donne à voir le châtiment d'un athée cruel mais à la grandeur ambiguë, l'Athalie de Racine réaffirme avec force l'autorité de la religion et sa place centrale dans l'exercice du pouvoir. Si la première peut être vue comme subversive, notamment par son recours aux effets comiques et au spectaculaire des machines, la seconde est en revanche une tragédie biblique écrite à l'intention des jeunes filles pensionnaires de l'école de Saint-Cyr par un Racine soucieux de retrouver une respectabilité morale auprès des autorités jansénistes. Mais dans les deux cas, malgré un éloignement revendiqué (l'Espagne pour Dom Juan, l'Israël biblique pour Athalie), le sujet de la pièce renvoie à l'actualité religieuse complexe et agitée de la seconde moitié du dix-septième siècle, où le catholicisme encore blessé par les guerres de religion s'impose dans toutes les sphères de la société.
Si Roger Planchon choisit en 1980 de présenter les deux pièces en un même spectacle, c'est bien pour faire apparaître ce sujet commun d'une religion qui devient instrument et symbole du pouvoir. Pour Planchon, Athalie est une pièce de propagande totalitariste qui se serait retournée contre elle-même, faisant apparaître la folie de sa conquête du pouvoir ; la scénographie est dominée par une lourde coupole figurant la surveillance du Vatican, tandis que les jeunes filles du chœur vivent leur existence couventine entre leurs interventions. Le rideau tombe sur une scène presque vide où demeure un cercueil. Le décor reste le même pour Dom Juan, dont le rôle-titre devient chez Planchon un révolté en lutte contre le dogmatisme et l'hypocrisie de son temps : le propos est encore de dénoncer la domination d'une religion devenue tentaculaire, mais cette fois par le biais d'un martyr du blasphème qui défie le pouvoir religieux avec héroïsme.