Alexandre Soljenitsyne en Vendée

26 septembre 1993
02m 11s
Réf. 00110

Notice

Résumé :
L'inauguration du Mémorial des Guerres de Vendée a eu lieu en présence de Philippe de Villiers et d'Alexandre Soljenitsyne qui ont, ensemble, dévoilé une plaque commémorative. Outre un spectacle musical, Philippe de Villiers a appelé, dans un discours, la République à être celle de tous ses citoyens et Alexandre Soljenitsyne a, lui, évoqué les antagonismes de la Révolution française.
Date de diffusion :
26 septembre 1993
Source :

Éclairage

La venue d’Alexandre Soljenitsyne, en septembre 1993, pour l’inauguration du mémorial aux Lucs-sur-Boulogne marque la commémoration du bicentenaire des guerres de Vendée en élargissant la résistance à la Révolution française aux refus du principe même de Révolution.
L’écrivain russe, né en 1918 et mort en 2008, est l’auteur d’une œuvre importante, récompensée par le prix Nobel de littérature en 1970. Il y dénonce le système soviétique, depuis son livre paru en 1962, Une journée d'Ivan Denissovitch, jusqu’à  la version russe de L'Archipel du Goulag qui paraît à Paris en 1973, ouvrage qui avait entraîné son exil en Europe puis aux Etats-Unis. Après les bouleversements politiques de Russie, il peut y retourner en 1994, où il est accueilli et reconnu par l’Etat russe.
Son discours aux Lucs représente un événement puisque, à propos de la guerre de Vendée, il affirme très fortement ses convictions. Répondant au président du Conseil général Philippe de Villiers qui a invoqué la République, « mère de tous ses fils », et insisté sur sa grandeur quand elle « est la République de toutes les mémoires », le dissident russe récuse radicalement la Révolution française et sa devise, Liberté, Egalité et Fraternité, l’estimant impossible et contradictoire en ses termes.
Jean-Clément Martin

Transcription

Evelyne Garcia-Jousset
Il y avait foule au mémoriel des Lucs-sur-Boulogne lorsque Alexandre Soljenitsyne et Philippe de Villiers ont dévoilé la stèle de granit sur laquelle était gravé que ce 25 septembre 1993, ils avaient ensemble ouvert le chemin de la mémoire des Lucs-sur-Boulogne. Un geste symbolique, comme tous ceux effectués en Vendée par le plus célèbre des dissidents russes, qui, pour l’occasion, avait même revêtu le costume qu’il portait le jour où il reçut le Prix Nobel de la Paix. Sur scène, un spectacle musical donné par l’Orchestre de Saint-Pétersbourg, la soprano Katia Ricciarelli, un millier de choristes, un texte historique d’Alain Decaux et des discours.
Philippe (de) Villiers
La Vendée n’est pas convoquée comme témoin à charge contre les institutions. Je le dis avec mon coeur de Français, avec mon coeur de Vendéen, la République est grande quand elle est la mère de tous ses fils. La République est grande quand elle est la République de toutes les mémoires.
Evelyne Garcia-Jousset
Alexandre Soljenitsyne, refusant toute interview, avait dit : Écoutez mon discours des Lucs, je n’aurais rien à ajouter. De fait, le message a été clair, aucune révolution n’a régénéré la nature humaine, et le Prix Nobel de la Paix est allé plus loin.
Alexandre Soljenitsyne
La Révolution Française s’est déroulée au nom d’un slogan intrinsèquement contradictoire et irréalisable, Liberté, Égalité, Fraternité. Mais dans la vie sociale, Liberté et Égalité tendent à s’exclure mutuellement, sont antagoniques l’une de l’autre. Car la Liberté détruit l’égalité sociale, c’est même là un des rôles de la Liberté, tandis que l’Égalité restreint la Liberté ; car autrement, on ne saurait y atteindre.
Evelyne Garcia-Jousset
Une conférence de presse improvisée en fin de soirée, anecdotique plus qu’informative, aura permis de découvrir un Soljenitsyne un peu plus disert et toujours provocateur, refusant d’aborder la situation en Russie. La Russie où il retournera bientôt pour un ultime rendez-vous avec l’histoire.