Le foot, ce n’est pas que pour les garçons !
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Résumé
L'histoire de la naissance du football féminin à Reims par France 3 Champagne-Ardenne au travers d’images d’archives et de témoignages. Une révolution autant sportive que sociale à la fin des années 1960, et surtout une aventure humaine émancipatrice.
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Date de publication du document :
01 déc. 2023
Date de diffusion :
06 juin 2019
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Contexte historique
ParProfesseur certifié d'histoire-géographie au collège François Legros de Reims
Publication : 01 déc. 2023
Le premier match de football féminin aurait eu lieu en Angleterre en 1881, terre de naissance du ballon rond. En France, il faut attendre 1917 pour une première rencontre à Paris. En 1921, une première compétition internationale entre la France et l’Angleterre réunit quelques 20 000 spectateurs en Angleterre, alors que la pratique est encore confidentielle en France. Mais très vite, le football féminin est rejeté par les instances officielles, politiques, sportives et médicales. En effet, si elle apparaît comme naturelle pour les hommes, la pratique du sport est très vigoureusement condamnée pour les femmes. Pierre de Coubertin, considéré comme l’inventeur des Jeux olympiques modernes, juge inenvisageable la présence des femmes sur les terrains de sport, sauf pour la remise des récompenses. Henri Desgrange, fondateur du journal L’Auto, ancêtre de L’Équipe, dénonce l’inconvenance de ces corps féminins montrés en public. La médecine parle des pratiques inappropriées à des corps dont la fonction première doit rester la maternité, la pratique du sport ne pouvant que menacer celle-ci. Le football, sport de plein air, de contact et de passion, est donc très éloigné de ce que la société assigne à la femme. Pour autant, d’autres sports sont perçus comme féminins, telle la gymnastique, et on assiste dès les années 1920 à la naissance de championnes sportives dont la plus connue est peut-être la tenniswoman Suzanne Lenglen.
Le Front populaire entre 1936 et 1938 favorise la pratique par toutes et tous des activités de plein air et de loisirs sans pour autant mettre l’accent sur la compétition sportive féminine. Avec le gouvernement de Vichy, la pratique sportive est encouragée, dans un but idéologique de régénération du corps des Français. Le sport est pris en charge par l’État et est confié au mouvement catholique, devenant presque une obligation pour la jeunesse. Mais, pour un régime qui voit dans la femme une mère et une épouse, le football au féminin est impensable, et il est tout simplement interdit par la loi en 1941.
Le retour à la démocratie à partir de 1944 s’accompagne d’un vaste mouvement de conquête de droits pour les femmes, qui revendiquent simplement l’égalité avec les hommes. Dès la Libération, l’égalité politique est obtenue par le droit de vote. Dans le domaine social, la fin des années 1960 est marquée par la multiplication de mesures en faveur des femmes (par exemple en matière d’accès au travail ou à la contraception). La loi Veil de 1975 fait figure à cette époque de conquête ultime avec l’inscription dans la loi du droit à disposer de son corps. Mais l’exposition de ce corps n’en reste pas moins un sujet très sensible dans une République encore très patriarcale et conservatrice…
Le contexte est cependant favorable à des progrès aussi en matière de pratique sportive des femmes. Dans de nombreux domaines, les championnes françaises se sont multipliées. Colette Besson remporte ainsi la seule médaille d’or de l’athlétisme français aux Jeux de Mexico en 1968. Si les sports individuels sont ouverts aux femmes, c’est plus difficile pour les sports collectifs, malgré des progrès au niveau européen. Le football féminin se développe dans de nombreux pays, en dehors de tout cadre institutionnel dans un premier temps. En 1968, les cours d’EPS deviennent mixtes en France. En 1970, la Fédération française de football reconnaît enfin la pratique féminine. Les femmes ont gagné le droit de jouer, mais peu est fait pour encourager cette pratique, les institutions se montrant très misogynes, peut-être plus que la société comme semble en témoigner l’exemple des Rémoises.
Éclairage média
ParProfesseur certifié d'histoire-géographie au collège François Legros de Reims
Reims accueille en 2019 des matchs de la Coupe du monde de football féminin qui se déroule en France. C’est à cette occasion que France 3 revient sur les origines du football féminin rémois quelque cinquante années auparavant. Le reportage apporte à cette histoire une dimension historique avec des images d’archives et les témoignages de deux protagonistes.
L’histoire aurait pu mal débuter pour les femmes éprises de football en 1968, à une époque où le ballon rond se conjugue exclusivement au masculin comme le montrent les plans où l’on voit les tribunes du stade. Le foot est une affaire d’hommes. C’est d’ailleurs pour proposer une animation exotique avant une compétition masculine que le journal local L’Union propose un match féminin. Et surprise, des femmes âgées de 15 à 30 ans répondent présentes et offrent un spectacle sportif inespéré si l’on en croit le premier entraîneur de l’équipe.
Le reportage entrecroise images d’archives montrant l’équipe du Football Club Féminin de Reims (future section du Stade de Reims) en match et à l’entraînement, et témoignages de deux acteurs majeurs de cette aventure d’une dizaine d’années. Le premier est l'entraîneur Richard Gaud ; la seconde est la gardienne et capitaine de l’équipe Ghislaine Royer-Souef. Ces deux témoins apportent deux regards différents sur cette histoire : celui d’un homme qui voit arriver des femmes dans son sport et celui d’une femme qui, avec ses copines, a cherché sa place et vécu une aventure sportive, sociale et personnelle.
À deux, ils font le récit d’une histoire qui a accéléré le développement du football féminin en France. Les joueuses enchaînent les matchs amicaux jusqu’à la création par la Fédération française d’une section féminine et de compétitions officielles, le club obtenant à la fin des années 1970 plusieurs titres de champion de France. Les Rémoises contribuent largement à la création d’une équipe de France féminine, fournissant entraîneur et majorité des joueuses. Elles participent à des compétitions à New York, au Mexique, en Indonésie jusqu’au titre non-officiel de championnes du monde en 1978 à Taïwan. C’est donc une épopée qui est ici relatée.
Ce reportage peut permettre d’alimenter une riche réflexion en classe. On pourrait d’abord replacer cette histoire dans une histoire plus large du féminisme et de la conquête des droits des femmes à la fin des années 1960, début des années 1970. Le sport, à cette époque comme aujourd’hui au travers des conflits liés aux rémunérations des sportives, offre aussi la possibilité d’aborder la question du genre et de son assignation. Ici, le reportage y fait plusieurs fois allusion, au travers de l’attitude des spectateurs ou des conditions d’entraînement des joueuses. On notera au passage que la sportive, qui témoigne avec distance et humour, ne parle par de féminisme mais simplement de la volonté de vivre une passion. Il faut aussi observer le rôle des hommes dans cette conquête féminine : Pierre Geoffroy est celui qui a rendu possible cette aventure par son engagement personnel et son entregent de journaliste.
Le reportage propose aussi un regard sur le corps féminin. Les images d’archives montrent les joueuses à l’entraînement notamment, et ces images méritent d’être questionnées sur la façon de filmer le corps de ces jeunes femmes qui ont choisi un sport d’hommes
. Le cameraman (un homme suppose-t-on) filme-t-il des sportives en plein exercice ou des corps féminins ? Certains plans interrogent, montrant parfois plus le corps que le ballon. On pourrait sûrement comparer ces images à celles de joueuses actuelles et questionner la façon de montrer le corps des femmes. Enfin, le reportage pourrait permettre d’évoquer la fonction émancipatrice du sport, qui permet ici à un groupe de jeunes femmes de connaître une expérience qui dépasse ce que leurs origines sociales auraient peut-être pu leur permettre de vivre.
Transcription
(Cliquez sur le texte pour positionner la vidéo)
Valérie Alexandre
Pendant des décennies, la pratique du football a strictement été interdite aux femmes et notamment sous le régime de Vichy.Il a fallu attendre 1968 et la volonté folle de jeunes Rémoises pour voir rouler le ballon, ce nouveau ballon rond sous des pieds féminins.Les filles du stade de Reims sont considérées comme les pionnières du foot au féminin. Leur histoire tout de suite avec Céline Lang et Cécile Banasik.
(Musique)
Céline Lang
Tout a commencé par une irrépressible envie d’avoir un ballon entre les pieds.
Ghislaine Royer-Souef
On n’était pas pionnières dans notre tête, on voulait jouer au foot.C’était un pur bonheur pour nous.
Céline Lang
Et tout s’est concrétisé grâce à L’Union, qui recherchait des filles pour jouer au ballon.Objectif, monter une attraction insolite pour le tournoi du journal.
Richard Gaud
On a aussitôt fait une annonce en page sportive.Et puis, au bout de 8 jours, on avait 15 jeunes filles qui se sont présentées à l’entraînement.
Céline Lang
Parmi ces 15 jeunes filles, Ghislaine Royer-Souef, 15 ans à l’époque, et des envies plein les jambes.Comme toutes ses camarades, déjà sportives accomplies, de quoi surprendre les deux journalistes de L’Union, Pierre Geoffroy et Richard Gaud, à l’origine du projet.
Richard Gaud
C’était des sportives, ce n’était pas... ce n'était pas ce qu’on aurait pu appeler du "pousse-ballon".Quand vous prenez vraiment des débutants, ils tapent dans le ballon et il n’y a pas de technique, mais là vraiment, en deux matchs c’était vraiment une révélation.
(Musique)
Ghislaine Royer-Souef
J’étais la petite sœur, et j’étais toujours derrière mes frères, parce qu’il y avait un terrain de football à 50 mètres de chez moi.Donc en ce temps-là il n’y avait pas le tennis, on ne pouvait pas y aller.C’était des sports co ou de l’athlétisme pour les filles.Donc voilà.
Céline Lang
Les filles ont donc gagné ces deux premiers matchs de septembre 68 après un mois seulement d’entraînement.Impossible pour les joueuses ensuite de rentrer chez elles, elles ont voulu continuer, alors que quelques années auparavant la pratique du foot était encore strictement interdite aux femmes.Pierre Geoffroy et Richard Gaud les ont soutenues et ça n’a pas toujours été évident.
Ghislaine Royer-Souef
Déjà d’avoir des terrains, ce n’était pas toujours facile, parce que c’était pris par les hommes. Et on allait, bon, on allait courir à la Sablière, et à la fin il y avait un terrain, ce n’était pas un terrain de foot, c’était un terrain avec des cailloux, et on s’entraînait là-dessus.
Céline Lang
La Fédération française de football non plus ne veut pas de ces femmes qui, pourtant, remportent victoire sur victoire.Pendant deux ans, elles jouent donc sans licence. Finalement la première compétition officielle se tient en 1975, sept ans après les premiers dribles des filles du stade de Reims.
Ghislaine Royer-Souef
Ah ben, le public, il nous encourageait, et puis il nous disait "ah !, puis elle arrive à faire ci !, et puis elle arrive à faire ça !"Ils étaient un peu surpris du savoir qu’on avait, parce qu’ils ne s’imaginaient pas que des femmes sachent jouer au ballon.
Richard Gaud
Ils étaient intéressés mais pas du tout goguenards.C’était… on pouvait s’attendre au pire.Bon, il y avait bien 2, 3 quolibets qui surgissaient, mais enfin, non, ça se passait très bien.
Céline Lang
Dans les années qui suivent, les pionnières rémoises poursuivent leur chemin et investissent l’équipe de France féminine.Elles disputent des matchs internationaux et une coupe du monde au Mexique, des tournées de rêve pour des jeunes filles qui n’auraient jamais osé l’espérer.
Ghislaine Royer-Souef
En 68, personne ne prenait l’avion comme on le prenait, c’était fait pour les hommes d’affaires.Nous, on prenait l’avion, on traversait, on est allées aux États-Unis, au Mexique, à Taïwan, en Indonésie, on a parcouru le monde.C’était formidable. J’étais d’une fratrie de cinq personnes, mes parents n’avaient pas les moyens.Mon père était horticulteur, ce n’était pas facile, mes parents n’auraient pas pu assumer.
Céline Lang
Les joueuses du stade de Reims restent en haut de l’affiche pendant presque dix ans. Puis l’équipe s’étiole, la section féminine disparait dans les années 80.Les femmes continueront à se battre pour jouer au foot, mais sur un terrain déjà bien défriché par les pionnières rémoises.
Richard Gaud
Les filles, oui, c’est les pionnières, c’est vraiment... c'est elles qui ont vraiment lancé le truc.
Ghislaine Royer-Souef
On a eu la chance d’être les meilleures au bon moment, c’est tout.Vous cherchez le succès, vous ne l’obtenez pas, et nous on ne l’a pas cherché, on l’a eu.
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