Trois vies de femmes au fil du XXe siècle : quels changements ?
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Résumé
Le reportage du magazine du dimanche de Lorraine propose de suivre l’évolution de la condition féminine en suivant trois femmes d’une même famille. C’est l’occasion d’interroger les mutations et les permanences de nos sociétés, en les observant au travers du regard de trois générations de femmes.
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Date de publication du document :
16 nov. 2022
Date de diffusion :
07 mars 2004
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Contexte historique
ParProfesseur certifié d'histoire-géographie au collège François Legros de Reims
Le reportage se situe dans le temps long, entre les années 1920 et 2000, soit trois générations de femmes. Même si les trois femmes du reportage ne se revendiquent d’aucun féminisme, leur histoire individuelle peut se lire au travers des mouvements qui traversent la société française, sous des formes multiples, pour revendiquer une égalité politique, juridique, économique, sociale et culturelle entre les hommes et les femmes.
Josette, la grand-mère, est née au lendemain de la Première Guerre mondiale. Le conflit a été marqué par le rôle majeur des femmes à l’arrière mais la représentation nationale refuse de donner le droit de vote aux femmes. Au lendemain de la Seconde Guerre, elle a juste 20 ans quand les femmes françaises, parmi les dernières en Occident, obtiennent enfin le droit de vote, en décembre 1944, en reconnaissance de leur rôle éminent dans la Résistance et les combats pour la libération de la France. Elle se marie en 1947, quand pour la première fois une femme entre au gouvernement avec rang de Ministre. Josette a donc pu voter dès sa majorité, à l’époque à 21 ans, faisant partie de la première génération à bénéficier de ce droit civique faisant des femmes des citoyennes de plein exercice. L’égalité entre femmes et hommes, inscrite dans le préambule de la Constitution de 1946 a donc une réalité politique, même les inégalités demeurent fortes par ailleurs.
Marie-France se marie en 1970, à sa majorité. Elle est donc adolescente puis jeune adulte dans les années 60 – 70 quand les revendications des féministes se font virulentes en matière de droits civils, en particulier pour la maîtrise de son corps, autrement dit de sa sexualité. L’ancêtre du Planning familial est né en 1956 mais la question de la sexualité et plus encore de la liberté sexuelle reste un sujet tabou dans une société patriarcale et encore fortement marquée par le poids du catholicisme. Les femmes conquièrent cependant des droits fondamentaux à partir des années 1960 : liberté de gérer leurs biens propres et d’exercer une activité professionnelle sans le consentement de leur mari (1965) ; autorisation de la contraception par la loi Neuwirth en 1967 ; première loi en 1972 posant le principe d’une égalité de rémunération entre hommes et femmes… Surtout, emblématique du combat acharné des femmes pour disposer librement de leur corps, la loi Weil votée en janvier 1975 ouvre en France le droit à l’interruption volontaire de grossesse (IVG), mettant fin aux condamnations de femmes et de jeunes filles pour avoir pratiqué ou subi un avortement clandestin dans des conditions d’hygiène souvent insuffisantes et parfois mortifères.
Même si ce droit à l’IVG est régulièrement contesté, il semble aujourd’hui un acquis sur lequel il n’est guère possible de revenir en France. C’est un combat que la jeune Olivia, née au milieu des années 1970 n’a pas à mener. Par contre, d’autres combats sont ceux de son temps : il s’agît en particulier de l’égalité économique et sociale, et dans une moindre mesure peut-être de la parité en politique. Si les premières lois dans le domaine du travail datent des années 1970, la législation gonfle surtout à partir des années 80 (ministère des Droits de la Femme entre 1981 et 1986) à une époque où toutes les études montrent que les écarts de salaire à emploi égal sont de l’ordre de 25 % en faveur des hommes et que les femmes, même très qualifiées, se heurtent à un plafond de verre dans l’accès aux responsabilités économiques et politiques, c’est-à-dire au pouvoir. Si les textes se multiplient en faveur des droits des femmes, il reste que dans la pratique, ils sont peu appliqués, faute de contraintes suffisantes et que le monde politique, comme celui de l’entreprise, demeure des lieux d’expression du sexisme en 2004.
On notera que ces combats pour l’égalité réelle n’ont toujours pas abouti de nos jours, et qu’un autre combat a pris une place importante dans le débat public, celui des violences multiformes faites aux femmes.
Éclairage média
ParProfesseur certifié d'histoire-géographie au collège François Legros de Reims
Le Mag du dimanche de France 3 Lorraine offre un reportage sur l’évolution de la condition féminine, à la veille de la journée de la femme du 8 mars 2004. Il interroge, au travers trois témoignages successifs, les avancées vécues par les femmes, l’amélioration réelle de leurs conditions de vie en tant que femme, mais aussi les blocages. Plusieurs approches sont possibles au travers des thèmes abordés par les trois femmes.
Chacune évoque son parcours scolaire et étudiant. On a donc une histoire de l'École qui se dessine depuis les années 1930. On y apprend ainsi que Josette a connu l’enseignement primaire et le cours complémentaire, aboutissant au fameux Certificat d’études marquant la fin de l’école obligatoire. Elle a cependant eu la possibilité d’apprendre la sténodactylographie donc le métier de secrétaire. Elle devient, et c’est un parcours tout à fait exceptionnel, institutrice sur le tard. Sa fille Marie-France a vécu le CES, le collège d’enseignement supérieur des années 1960, en fait le collège-lycée, parfois loin de la maison ; elle a ensuite intégré l’Ecole normale et apprit le métier d’institutrice de sa mère, devenant finalement directrice d’école. Seule Olivia est allée à l’université, en médecine, à la suite d’un parcours scolaire qui est celui de l’Ecole actuelle, soit le collège unique mis en place par la réforme Haby en 1975 (tous les élèves accèdent pour la première fois au collège) puis le lycée (elle fait partie de la génération 80 % d’une classe d’âge au bac
). On voit donc l’élévation progressive du niveau de formation et une promotion sociale. Mais Olivia a réorienté ses études, plus pour vivre de sa passion que pour assurer son avenir professionnel, acceptant par là même une vie professionnelle plus précaire, symptomatique de sa génération.
Cette précarité explique peut-être qu’Olivia ne semble ni mariée ni maman. À 28 ans, cette double singularité la distingue très clairement de sa grand-mère et de sa mère. En effet, la première est mariée à 23 ans et mère de cinq enfants dix ans plus tard ; la seconde se marie à 21 ans et a trois enfants. On a là une double évolution : le mariage a fortement reculé au profit du célibat et d’autres formes d’union (le PACS notamment), le mariage étant lui-même plus tardif. Ce changement accompagne celui de la maternité, marqué par un recul de l’âge à la première naissance et une réduction forte du nombre d’enfants par femme (tombé sous les 2 depuis dès les années 1970). Cette forte baisse de l’indice de fécondité s’explique par de multiples facteurs sociaux et culturels mais aussi par l’essor de la contraception, dont Josette regrette l’absence …
Josette a eu, sa fille en témoigne clairement, l’existence difficile de bien des femmes de son temps, d’autant que les soucis de santé de son mari, en une période où les assurances sociales sont réduites, l’obligent à mener de front la vie double vie de mère de famille et d’institutrice. Marie-France souligne ainsi l’absence de loisirs de sa mère et Josette insiste tout particulièrement sur la corvée de la lessive, avec 5 enfants. Si la période qui débute en 1945 est celle d’une amélioration rapide des conditions de vie, sa diffusion se fait progressivement de la ville vers les campagnes et des classes supérieures vers les classes populaires. Pour les femmes, la révolution du travail domestique tient dans l’équipement des ménages en électroménager, en particulier la machine à laver, possédée par seulement 8 % des Françaises en 1054 et 65 % en 1974. Les femmes y ont ainsi des corvées moins pénibles mais dégagent aussi du temps qui amène nombre d’entre elles sur le marché du travail. Il faut remarquer que Marie-France a conscience du changement lié à l’équipement de la maison pour sa vie de femme, alors que pour sa fille, ses équipements ne font pas question car ils ont toujours été présents.
En conclusion, il serait peut-être intéressant de se demander laquelle des trois femmes a l’existence la plus agréable.
Transcription
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