La Résistance dans les Vosges et sa répression en 1944
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À partir du débarquement de Normandie, la Résistance vosgienne lance des actions armées contre l’armée allemande. La répression qui s’en est suivie a été féroce. Afin de sécuriser une ligne de repli le long des Vosges pour la Wehrmacht, le régime national-socialiste a ordonné une vaste opération de « nettoyage » dans le massif, ciblant les nombreux Maquis qui y étaient établit.
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Date de publication du document :
09 déc. 2024
Date de diffusion :
23 avr. 2010
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Contexte historique
ParProfesseur agrégé d’histoire, Doctorant en histoire contemporaine à l’Université de Strasbourg
À la suite de la défaire de la France en juin 1940 et de l’annexion de fait de l’Alsace et de la Moselle par le régime national-socialiste, les Vosges se retrouvent à la frontière avec l’Allemagne nazie. Dès cette date, des mouvements de Résistance apparaissent dans les Vosges, surtout en raison d’initiatives locales. La création du Conseil national de la Résistance en mai 1943 et le mouvement d’unification qui s’en suivit ont entraîné sa structuration en quatre groupements, chacun comprenant entre cinq et treize maquis. Les membres de la Résistance vosgienne se partagent entre des jeunes voulant échapper au STO, des patriotes, des Francs-Tireurs communistes, des aventuriers ainsi que des prisonniers de guerre évadés, des travailleurs forcés venus de l’Est de l’Europe ou des Alsaciens et Mosellans réfractaires à l’incorporation de force. Mis en contact avec les Alliés par le biais des services de renseignement, ils reçoivent des parachutages de matériel, principalement des armées légères.
À la nouvelle du débarquement de Normandie, le Maquis de Corcieux du capitaine Vichard, qui dépend du IVe groupement, est l’unique Maquis de l’est de la France à entrer en action sur ordre de la BBC. Le 6 juin 1944, les hommes de Vichard lancent l’assaut sur Taintrux (Vosges) où se trouve une garnison allemande. L’objectif est de faire des prisonniers et de forcer l’armée allemande à rester en état d’alerte dans le secteur pour l’empêcher d’acheminer des renforts vers le front normand. Rapidement débordés, les Résistants sont tenus en échec et comptent neuf tués au combat, 29 fusillés et 43 déportés. Les autres Maquis vosgiens lancent à leur tour des actions armées, comme le Maquis de Charme ou le Maquis de Grandrupt, harcelant les troupes allemandes, bien qu’ils se trouvent systématiquement en situation d’infériorité.
Avec le débarquement de Provence du 15 août 1944 et le repli ordonné de l’armée allemande de la France, les Vosges, où une ligne de défense a été aménagée, constituent une position clef où la Wehrmacht compte se rétablir pour retenir les Alliés en dehors de l’Allemagne nazie. Zone cependant connue pour être hostile, il apparaît au préalable nécessaire d’y éradiquer définitivement les Maquis. C’est pourquoi Himmler lance l’opération « Waldfest » dans les Vosges en septembre 1944. Présent personnellement à Gérardmer, il explique qu’il s’agit de défendre la frontière occidentale du Reich jusqu’au bout, ce qui ne pourra être mené à bien que si l’armée allemande a les mains libres. Concrètement, l’opération, qui implique la Wehrmacht, les services de police (Gestapo et Sipo-SD) et la milice française, consiste à déployer une politique de « terre brûlée » et une répression implacable, entraînant l’exécution de plusieurs centaines de Résistants et la déportation d’une partie de la population masculine. Les troupes allemandes traquent aussi les SAS, les forces spéciales britanniques, qui ont été parachutés dans le massif vosgien dans le cadre de l’opération Loyton depuis août 1944. Ceux qui tombent entre les mains des Allemands sont immédiatement fusillés en vertu de « l’ordre sur les commandos » (Kommandobefehl) de Hitler datant de 1942.
Ainsi, la quasi-totalité des Maquis vosgiens sont démantelés durant l’automne 1944. Lorsqu’ils réussirent à échapper aux Allemands, nombreux sont ceux qui rallièrent les troupes alliées pour s’engager dans la 1ère armée française du général De Lattre de Tassigny, comme ce fut le cas pour le GMA des Vosges, qui s’est illustré lors de combats à la ferme de Viombois. En novembre 1944, l’armée allemande se retire définitivement des Vosges. Le bilan de l’opération est particulièrement lourd puisqu’on dénombre environ 500 maquisards et SAS tués au combat ou fusillés, 3 700 déportés dans l’univers concentrationnaire — dont les deux tiers ne sont jamais revenus — et presque 10 000 déportés pour le travail obligatoire. Environ 7 500 bâtiments ont également été détruits, dont Corcieux qui a été incendié par les Allemands avant leur repli.
Éclairage média
ParProfesseur agrégé d’histoire, Doctorant en histoire contemporaine à l’Université de Strasbourg
Ce reportage a été diffusé en avril 2010 lors du journal régional de France 3 Lorraine dans le cadre d’une série de courts reportages portant sur l’occupation des Vosges. Il porte sur la résistance dans les Vosges à partir du débarquement de Normandie et jusqu’à la libération du département en novembre 1944. Toutefois, le contexte général n’est pas explicité, malgré l’intervention de l’historien Jean-Claude Fombaron. Les faits, traités pêle-mêle, se télescopent pour insister sur l’implacable répression allemande, sans chercher à en comprendre les modalités. En réalité, les méthodes employées par l’armée allemande dans le cadre de l’opération « Waldfest » sont en substance relativement proches de ce que l’on peut observer sur le front de l’Est ou dans les Balkans, même si elles n’atteignent jamais la même mesure ni la même nature. Elles correspondent à ce que l’historien Peter Lieb a nommé « une forme occidentale de la guerre contre les partisans », moins violente, mais qui tend à s’en rapprocher.
La mémoire de la Résistance est particulièrement implantée dans les Vosges. Les différents lieux montrés dans le reportage témoignent de son enracinement dans le paysage : rue Folmard Saint-Dié-des-Vosges, plaque en souvenir de l’exécution de Marcel Folmard à Saulcy-sur-Meurthe, monument aux morts de Charmes et de Corcieux, monument de Prés de l’Orme, des Combes, de la Piquante-Pierre ; autant d’endroits transformés en « lieux de mémoire », où les imposantes listes de noms témoignent de l’ampleur des sacrifices.
Réalisé en 2010, ce reportage pouvait encore faire intervenir d’anciens résistants, comme Hermann Lanz, Marcel Thomas et Jean-Marie Leduc, tous disparus aujourd’hui. Impliqué après la guerre dans la reconnaissance de leurs parcours et de ceux de leurs camarades, leur discours s’inscrit davantage dans la construction d’un objet mémoriel que dans le propos historique à proprement parler. Marcel Thomas, que l’on voit à l’écran, est un ancien résistant et déporté du Maquis de Corcieux, qui a été, toute sa vie, engagé dans cette cause. En 2017, il a écrit ses mémoires, L’enfant du siècle se souvient, parfois édulcorées, souvent militantes. Acteurs principaux de l’histoire, les anciens résistants sont aussi ceux qui ont alimenté le mythe de la France héroïque, unie et massivement résistante. Érigée après la guerre en roman national par les cercles gaullistes et communistes, cette mémoire s’est progressivement complexifiée à la suite des travaux historiques sur la France de Vichy et la collaboration de Robert Paxton ou plus récemment d’Alya Aglan et Laurent Joly. À l’heure où mes derniers témoins s’éteignent, l’équilibre est à trouver entre l’inestimable héritage qu’ils nous lèguent et la complexité historique qui a été celle de leur temps.
Transcription
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