La communauté slovène d'Aumetz
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Résumé
Les Slovènes d'Aumetz, en Moselle, sont une des communautés étrangères les moins connues du bassin ferrifère lorrain. C'est à la fin du XIXe siècle que les Allemands font venir les premiers travailleurs slovènes. Aujourd'hui, leurs descendants se sentent français mais restent attachés à leurs racines, notamment à la langue.
Date de publication du document :
Février 2022
Date de diffusion :
10 juin 2004
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Contexte historique
ParDocteur en Histoire, Professeur des universités en Sociologie, 2L2S, Université de Lorraine
La présence slovène en France et en Lorraine est toujours restée discrète tant en termes numériques qu’en visibilité. À partir de 1814, le territoire de la Slovénie est placé sous domination de l’Empire d’Autriche et de Hongrie jusqu’à la fin de la Première Guerre mondiale. Les conditions économiques difficiles poussent la population slovène, majoritairement rurale, à migrer vers les grands centres urbains de l’Empire mais aussi vers les États-Unis ou les bassins industriels d’Allemagne parmi lesquels ceux situés en Moselle. Ces flux restent très minoritaires parmi les courants étrangers avec quelques centaines de ressortissants longtemps identifiés avant tout en qualité de sujets de l’Autriche-Hongrie et parfois, d’un autre pays comme pendant l’occupation italienne sous la période fasciste. Après 1918, les Slovènes seront encore comptabilisés comme les Serbes, les Croates et les Monténégrins dans la nouvelle catégorie des Yougoslaves.
En Lorraine, au cours des années 1920, le bassin ferrifère de Briey et les entreprises de Moselle-Nord accueillent environ 3 000 ressortissants. Ailleurs, dans les mines de charbon de lorraine, de la région de Forbach, les mineurs sont plutôt originaires des régions de Trbovlje et de Hrastnik. La crise des années 1930 réduira encore ce chiffre et à la veille de la Seconde Guerre mondiale il n’en restera plus que la moitié répartis dans des quartiers de cités industrielles comme Tucquenieux, Audun-le-Tiche, Giraumont ou Aumetz.
Par la suite, après la Libération, la baisse s’accentue après l’accord de rapatriement signé en 1946 entre la France et la Yougoslavie et de nombreux retours au pays sont enregistrés jusqu’au début des années 1950. Mais très vite, pour des raisons liées au contexte politique de la Guerre froide, les Slovènes quittent à nouveau la Yougoslavie et migrent en passant par l’Italie avant d’arriver en France et notamment pour certains en Lorraine. Comme pour les autres immigrations, l’idée initiale est de s’établir provisoirement en France avant de rentrer au pays.
Au cours des années 1970, comme en témoigne le reportage, les héritiers de cette immigration finissent par prendre la nationalité française. Néanmoins, chez la plupart d’entre celles et ceux qui naissent en France, le sentiment d’appartenance se maintient, la langue se transmet au sein des familles et ces descendants assument la double appartenance d’être français d’abord mais aussi slovènes lorsqu’ils se retrouvent au pays
comme il est précisé dans l’extrait. Progressivement, le retour au pays n’étant plus d’actualité, les plus anciens finissent par se naturaliser également.
Malgré leur faiblesse numérique et les appartenances nationales diverses, la vie culturelle des Slovènes de l’Est de la France aura été riche. Dès les années de l’entre-deux-guerres les premières associations et sociétés de secours mutuels spécifiquement slovènes voient le jour en Moselle-Est à Merlebach. Avec le temps, d’autres vont éclore en Lorraine comme la Société des Ouvriers Slovènes créée en 1926 à Aumetz et qui deviendra l’Association des Travailleurs Slovènes d’Origine (Slovenko Delavsko Drustvo) jumelée ensuite avec la commune de Idrija.
Les immigrés slovènes ont créé un réseau de solidarité et d’entraide avec des caisses de secours et des aumôneries des Slovènes notamment à Thicourt ou « Les amis de la mission catholique slovène » à Freyming-Merlebach Des ateliers de travail du textile en lien avec les coutumes dentelières d’Idrija ont également été mis en place. La sixième génération d’héritiers des immigrations slovènes de Lorraine continue à entretenir des liens avec le pays de leurs ancêtres par des réseaux familiaux, des séjours dans les villages de départ et des échanges interpersonnels. L’entrée de la Slovénie dans l’Union européenne au tournant des années 2000 a facilité les échanges entre les familles slovènes de Lorraine et le pays de leurs origines.
Transcription
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Caroline Kellner
Alors que les premiers Européens votent aujourd’hui pour les élections législatives, intéressons-nous ce soir à la population slovène qui vit à Aumetz.Cette communauté est venue en Lorraine pour travailler dans les mines où elle a peu fait parler d’elle, Emmanuel Bouard et Yves Quemener ont rencontré certains de ses membres, tous très fiers de l’entrée de leur pays dans l’Union européenne.
(Musique)
Emmanuel Bouard
Aumetz, l’une des 66 mines qu’a comptées le bassin ferrifère lorrain.Après plus d’un siècle d’activités, elle s’est tue mais le souffle de ces travailleurs immigrés ne l’a jamais quitté.
(Musique)
Emmanuel Bouard
La chorale des travailleurs slovènes existe depuis 1926.À la fin du XIXe siècle déjà, des ouvriers slovènes sont venus s’installer dans la commune.
(Musique)
Jean Tolmajner
Les premiers qui sont arrivés ici, c’est les Allemands qui les ont fait venir parce que c’est les Allemands qui ont ouvert les mines, ici, donc avant 1900.Donc, en Allemagne, dans la Ruhr, il y avait déjà des gens qui travaillaient dans les mines et qui venaient de la partie autrichienne qui était la Slovénie.Donc, ceux-là sont arrivés ici parce qu’ils savaient l’allemand, comme ici on était sous occupation allemande.Donc, ils sont venus, et c’étaient par exemple les [Kockels] les [Saleten] et ceux-là, ils sont arrivés comme ça ici.Ils ne sont pas arrivés de Slovénie, ils sont arrivés d’Allemagne.
(Musique)
Emmanuel Bouard
Tout au long du XXe siècle, près d’un millier de slovènes est passé par Aumetz.L’association des Travailleurs Slovènes réunit cette communauté solidaire.En 1926, elle crée une sécurité sociale privée, chaque mineur verse une journée de salaire par mois afin d’aider ses compatriotes blessés ou malades.Une troupe de théâtre joue régulièrement, un orchestre également, le choeur composé uniquement d’hommes à ses débuts, devient mixte au fil des années, les enfants des premiers immigrants sont Français, sans se départir de leurs racines.
Marie Lebrun
Moi je suis Française mais je me sens quand même profondément Slovène.Mes parents nous ont, mon frère et moi, nous ont parlé en slovène jusqu’à ce qu’on aille à l’école pour qu’on garde la langue.J’avais mes grands-parents paternels qui étaient restés à Aumetz, donc je pouvais, on pouvait parler avec eux en slovène.Donc quand j’allais là-bas, moi, c’était, et j’y retourne régulièrement, et j’aime chanter le slovène.J’aime mon pays d’origine.Je ne peux pas expliquer.Je n’y vivrai pas, je suis un petit peu partagée si vous voulez.Je… ma vie est ici, en France, complètement, à 100 %, mais quand je suis là-bas, je suis bien, je me sens bien, je me sens chez moi.
Emmanuel Bouard
La communauté slovène du bassin ferrifère est certainement la moins connue de toutes mais l’une des plus fières de l’entrée des pays de l’Est dans l’Union européenne.Elle rappelle à tous que le développement de la Lorraine est dû en grande partie aux sacrifices de plusieurs milliers d’hommes arrachés à leurs terres à jamais.
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