La Haute-Volta au tournant de l'indépendance
Notice
A l'occasion de la visite du président Maurice Yaméogo en France, monsieur Henri Guissou, ambassadeur, présente la Haute Volta, jeune République indépendante depuis le 5 août 1960.
Éclairage
Ce reportage diffusé en avril 1962 à la télévision française propose un état des lieux de la jeune république de Haute-Volta deux ans après son accession à l'indépendance, en août 1960. À la faveur de la visite officielle du président Maurice Yaméogo, le micro est tendu à Henri Guissou (1910-1979), ancien instituteur formé à l'École normale William-Ponty de Dakar – comme un très grand nombre d'hommes politiques ouest-africains de la première génération –, ancien député voltaïque au Palais-Bourbon sous la IVe République et désormais ambassadeur de Haute-Volta en France.
La Haute-Volta fait partie des alliés sûrs de la France, qui a fermé les yeux, depuis 1958, sur les agissements de Maurice Yaméogo. Celui-ci en effet a progressivement mis en place un pouvoir personnel, éliminé une bonne partie de ses opposants ou ses concurrents soit en leur proposant des postes prestigieux (c'est le cas par exemple pour Henri Guissou), soit en les emprisonnant. Il a depuis quelques mois instauré un régime de parti unique dans son pays. Sur tout cela, le reportage fait silence et choisit de se concentrer sur le bilan économique de la jeune république.
Forte d'environ 4, 5 millions d'habitants en 1960, la Haute-Volta est un pays essentiellement agricole. La politique coloniale y a, de fait, empêché tout développement industriel et a surtout consisté à organiser l'émigration de la main d'œuvre locale vers les plantations de la Côte d'Ivoire voisine – pour le plus grand intérêt des colons français propriétaires de grandes plantations. De 1932 à 1947, la colonie de Haute-Volta a même été démembrée pour faciliter encore davantage la circulation des flux de travailleurs agricoles. « Le Mossi s'expatrie volontiers », dit la voix off, et d'autant plus que les autorités coloniales l'y ont constamment poussé ! Il faut attendre 1955 pour identifier un début d'industrialisation de la filière du coton, par exemple : c'est une politique économique tardive, qui se fait dans le cadre des plans de développement de l'après-guerre. Il est d'ailleurs intéressant d'observer à quel point le commentaire évoque peu la période coloniale elle-même — on a affaire à une « Haute-Volta » éternelle, celle de la monarchie mossi – et ne s'attache en aucune façon à faire le bilan de sept décennies de présence française dans la région.