Référendum sur la Constitution : résultats en Afrique et à Madagascar, commentaires sur le "non" de la Guinée
Notice
Le représentant du ministère de la France d'outre-mer, Émile Biasini, présente les résultats du référendum du 28 septembre 1958 sur la Communauté française en Afrique et à Madagascar et commente le « cas aberrant » de la Guinée qui a voté "non".
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Éclairage
Les territoires d'outre-mer se prononcent le 28 septembre 1958 sur la constitution de la Ve République et la Communauté française.
Lors de son voyage africain en août, de Gaulle a posé l'alternative : les territoires qui voteront en faveur de la communauté pourront à terme accéder à une indépendance négociée ; s'ils votent contre, ce sera l'indépendance immédiate et la « sécession » avec la métropole. D'intenses débats secouent les partis politiques. Le rassemblement démocratique africain (RDA) et son chef de file, Houphouët-Boigny, enjoignent les sections à voter en faveur du projet constitutionnel. Mais après le conflit entre de Gaulle et le leader de la section guinéenne du RDA, Sékou Touré, poussé par les mouvements plus radicaux, engage son pays dans la voie du « non » tout en affirmant sa volonté de négocier avec la France.
Parallèlement, une campagne officielle en faveur du « oui » est activement menée en Afrique. L'intervention de l'administration est plus directe encore au Niger. Pour contrer l'influent parti de Djibo Bakary qui appelle à voter « non », un nouveau gouverneur est nommé pour soutenir par tout moyen les positions du RDA, en bloquant notamment les moyens de communication. Les résultats du référendum reflètent cette activité et le ralliement des principaux partis politiques, à l'exception de ceux de Sékou Touré en Guinée et de Djibo Bakary au Niger.
L'édition télévisée relative au référendum témoigne de l'importance accordée au scrutin outre-mer. Derrière Léon Zitrone est affichée la carte de la France métropolitaine et d'outre-mer. C'est ensuite à Émile Biasini, administrateur du ministère de la France d'outre-mer, qu'il revient de commenter les résultats transitoires. La victoire éclatante du « oui » est mise en évidence, à commencer par les territoires acquis aux positions du RDA. Pour l'Afrique Occidentale Française, le résultat de la Côte d'Ivoire, patrie d'Houphouët-Boigny, est qualifié de « remarquable », avec 99 % de votes positifs. Le même résultat est noté pour le Moyen Congo, en soulignant les 99,4 % de Brazzaville, dont le maire, l'abbé Youlou, bénéficie du soutien des nouveaux colons blancs et du RDA. Biasini insiste ensuite sur le résultat du Niger « dont on pouvait douter jusqu'au dernier moment », avec 76 % de « oui ». L'attention portée à ce territoire permet de connaître les résultats de 73 % des votants, alors que Biasini souligne les résultats encore très partiels des autres territoires sahéliens, en raison des difficultés de déplacement pendant la période des pluies. Le succès plus limité du « oui » au Niger est attribué à l'opposition entre partis africains, sans mentionner l'action de l'administration.
Le résultat de Madagascar, avec 80 % de oui, est aussi qualifié d'« extraordinaire ». En effet, seule la population d'Antananarivo a voté non, suivant la position de son maire qui estime que les vrais artisans de l'indépendance sont les parlementaires exilés en France à la suite de l'insurrection de 1947.
Surtout, la victoire du oui, y compris au Niger, permet à Biasini d'isoler le « cas aberrant » de la Guinée, où le non l'emporte à 98 %. Biasini présente « l'esprit » du communiqué remis à Sékou Touré le matin même par le Haut-commissaire. L'importance donnée à ce document souligne la solennité du moment. Le gouvernement français y « donne acte de la décision de la Guinée », dans le cadre de l'alternative fixée par de Gaulle. Le vote négatif est considéré par Paris comme une « sécession ». Le gouvernement français tire immédiatement les conséquences de ce « non » qui détonne par rapport aux autres territoires. Ces conséquences ne sont pas précisées aux téléspectateurs. Mais lorsque Biasini indique que c'est bien un « acte de divorce [qui] a été remis ce matin », il est évident que la France va rapidement prendre les mesures de représailles contre le pays qui ne s'est pas soumis à sa pression, avec notamment un arrêt brutal de l'aide et le départ des agents français.