Une déclaration de Félix Houphouët-Boigny
Notice
A Versailles, Le président ivoirien Félix Houphouët-Boigny prononce un discours sur la coopération avec la France.
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Éclairage
Les voyages réguliers des chefs d'État africains à Paris, les déclarations officielles et les protestations d'amitié n'ont cessé de ponctuer le processus de « bilatéralisation » des relations entre Paris et ses ex-territoires d'outre-mer. Le contexte de la guerre froide exige que l'on choisisse son camp ; des personnalités de premier plan font ainsi le choix explicite du bloc occidental et contribuent à maintenir des liens très étroits avec la France – tant sur le plan politique qu'économique. Nous en avons ici une bonne illustration, avec un extrait de quatre minutes environ d'un discours de Félix Houphouët-Boigny, diffusé le 8 juin 1961 à l'occasion d'une visite officielle en France du président ivoirien.
Félix Houphouët-Boigny (1905-1993) est l'une des figures politiques majeures de l'histoire de l'Afrique occidentale française du XXe siècle et un acteur de premier ordre dans l'histoire des relations franco-africaines d'après les indépendances. Co-fondateur du Rassemblement Démocratique africain (RDA) en 1946, – mouvement politique qui joua un grand rôle dans l'évolution politique de l'AOF après 1945 (voir Les chemins politiques, de Brazzaville à la Communauté) –, il est à maintes reprises élu député. Il fait également partie du gouvernement Guy Mollet en 1956, avec un poste de ministre délégué à la Présidence du Conseil. Pour la première fois, un élu africain occupait dans un gouvernement français un poste d'envergure. La loi-cadre Defferre – qui accorde l'autonomie aux territoires d'outre-mer – porte d'ailleurs sa marque. Il est ensuite nommé ministre d'État au sein du cabinet Bourgès-Maunoury, puis ministre de la Santé publique et de la Population dans le gouvernement Gaillard. En mai 1958 enfin, il est ministre d'État dans l'éphémère gouvernement dirigé par Pierre Pflimlin.
Bref, Félix Houphouët-Boigny a déjà une longue carrière politique derrière lui quand il proclame l'indépendance de la Côte d'Ivoire le 7 août 1960 et en devient président de la République. Tour à tour opposant nationaliste et anticolonialiste à la présence française, puis homme de gouvernement en France même, il défend une position intéressante dans le processus de décolonisation de la fin des années 1950. Depuis 1958 en effet, il plaide pour le maintien prolongé des républiques africaines autonomes dans la structure de la Communauté française. Il n'est donc pas un chaud partisan de l'indépendance pour l'indépendance mais apparaît, au contraire, comme un défenseur du rapprochement étroit avec l'ancien colonisateur. C'est ce qui ressort d'ailleurs de son discours, où il prône également la mise en place d'une politique de coopération bilatérale pour son pays. Dans le cadre de la politique de développement que lance la France après 1960, la Côte d'Ivoire devient un des partenaires privilégiés – quand bien même le « miracle ivoirien » des années 1960-70 n'en fait pas le pays le plus pauvre de l'ancienne Afrique occidentale française.