Le VIe conseil exécutif de la Communauté (partie 1 : rencontre officielle)
Notice
Le service cinématographique présente l'ouverture du VIe conseil exécutif de la Communauté à Saint-Louis du Sénégal le 11 décembre 1959 et la rencontre des chefs de gouvernement des États membres autour du président de la République française et de la Communauté, le général de Gaulle.
Éclairage
De Gaulle imagine en 1958 une certaine idée de la décolonisation en Afrique subsaharienne, « pacifique » et « encadrée », en contrepoint de la guerre en Algérie. Il conçoit la Communauté française comme un laboratoire des indépendances.
Les populations africaines et malgache votent massivement en faveur de la Communauté au référendum du 28 septembre 1958, à l'exception de la Guinée. Ces territoires qui ont voté oui doivent choisir entre les trois options offertes par la constitution du 4 octobre 1958 : conserver leur statut de territoire d'outre-mer, devenir un département d'outre-mer ou se constituer en République au sein de la Communauté. Les leaders politiques africains s'étaient mobilisés pour que la constitution mentionne le droit à l'indépendance. C'est donc logiquement le troisième choix qui prévaut et 12 républiques sont proclamées d'octobre à décembre 1958.
De nouvelles institutions politiques franco-africaines sont créées. Les conseils exécutifs, qui rassemblent les chefs de gouvernement des États membres et de la France, constituent la colonne vertébrale de cette architecture communautaire. Ce sont eux qui déterminent entre février 1959 et mars 1960 le calendrier de la décolonisation, selon une politique d'association des pouvoirs exécutifs locaux dominée par de Gaulle, qui préside à la fois la République française et la Communauté. Le caractère pyramidal et la nature exécutive du dispositif sont affirmés.
Les cinq premiers conseils exécutifs définissent les compétences communes et nationales ainsi que les structures institutionnelles, économiques et de sécurité extérieure de la Communauté.
Le VIe conseil exécutif qui se tient à Saint-Louis les 11 et 12 décembre 1959 accélère la transition vers les indépendances et conduit à une mutation de la Communauté. Les représentants de la Fédération du Mali y demandent formellement leur indépendance, dans le cadre de négociations avec la France, comme cela est prévu par la constitution. La Fédération du Mali créée en janvier 1959 s'est réduite au Sénégal et au Soudan, après le retrait du Dahomey et de la Haute-Volta qui ont été dissuadés de l'intégrer par la France et la Côte d'Ivoire. Cette Fédération limitée marque l'échec de l'idée des « fédérations primaires » destinées à éviter la balkanisation de l'Afrique. La Fédération du Mali demande dès lors l'indépendance, et donc son retrait de la Communauté, et les autres États membres suivent peu après.
Le reportage réalisé par le service cinématographique des armées présente la cérémonie officielle du VIe conseil exécutif, sans évoquer le chant du cygne qu'il constitue pour la Communauté. Il s'agit surtout de célébrer la dimension évènementielle des relations franco-africaines, alors que le contenu de la rencontre entre les chefs d'État n'est pas mentionné et reste secret. Les conseils exécutifs sont présentés comme se tenant à tour de rôle dans les différents États membres, bien que ce ne soit que la deuxième fois que cette institution se réunit hors de Paris (le IVe conseil exécutif s'était tenu en juillet 1959 à Tananarive). La célébration d'une Communauté centrée sur la France et son président apparaît à toutes les étapes du reportage. Ce sont d'abord les symboles de cette Communauté qui pavoisent la ville et s'inspirent des emblèmes français, comme le drapeau tricolore et l'insigne représentant deux mains unies, entourées d'une couronne de laurier et de chêne. C'est ensuite l'accueil réservé à de Gaulle, représenté sur les vêtements, et qui rassemble autour de lui les chefs des États membres. C'est enfin le discours même du Général qui consacre la Communauté comme une « œuvre d'avenir », bien que celle-ci soit appelée à disparaître à brève échéance. Mais de Gaulle entend maintenir cette « amitié organisée » entre la France et les États africains à travers une « communauté rénovée », fondée sur des accords de coopération en dehors de tout cadre institutionnel.