Képi bleu
Notice
Le képi bleu : surnom donné aux officiers SAS (Section administrative spécialisée) engagés dans l'opération de "pacification" menée par l'armée française en Algérie. Présentation de sa mission : le rôle du képi bleu est d'établir le contact, de "fraterniser" avec la population en difficulté. Il effectue une tournée dans divers villages, accompagné d'un harki et si besoin d'infirmières.
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Éclairage
Le terme « képi bleu » dont il est question dans le titre de ce film est le terme populaire employé pour désigner les officiers des Sections administratives spécialisées (SAS), entités créées en septembre 1955 par le GGA. Il s'agit donc de militaires dépendant à la fois des autorités civiles et militaires, chargés de doter les différentes zones de l'Algérie en représentants de l'administration n'ayant pas que des tâches « militaires » mais devant au contraire être au contact des populations (dans l'esprit des « bureaux arabes » du XIXe siècle) et représenter les valeurs les plus positives de la présence française : construction, santé, enseignement, état civil... Aussi, il n'est pas étonnant que le « képi bleu » ait été souvent employé dans la propagande, notamment pour contre-balancer dans les populations (et à l'extérieur, comme c'est le cas pour ce film) l'image de militaires français agissant souvent de manière violente. Les officiers SAS ont du reste, dans la réalité, été fréquemment assassinés par le FLN.
Ce film, terminé le 9 mars 1957, est l'un des rares films « de propagande » du SCA à avoir été diffusé en Algérie et en métropole (comme, à la même époque, L'Egypte et le monde libre). Il a en effet été distribué par Pathé et a donc été vu dans les salles par un public nombreux. Il a bénéficié de quatre versions différentes (version courte couleur, version longue couleur, version arabe, version anglaise), rendant compte de son importance en termes de propagande. Les producteurs du film sont le SCA et le Gouvernement général de l'Algérie, et les versions sont « approuvées » par Joseph Meyer, chef du service cinéma du GGA, et par le colonel chef des SAS. C'est l'opérateur et réalisateur Alain Pol, par ailleurs auteur de plusieurs films sur l'Algérie, qui signe le film en tant que producteur et réalisateur. Le film, tout d'abord prévu dans une version longue SCA (où mention est faite du SCA), sort commercialement dans une version plus courte dans laquelle il s'agit bien de faire du film seulement « une production Alain Pol », masquant ainsi l'origine militaire du produit.
C'est la version longue siglée SCA que nous analysons ici. C'est un film dont la structure narrative est très proche d'autres films de propagande du SCA, mais dont la forme est sans doute plus aboutie du fait de l'emploi d'un réalisateur sous contrat. Le film commence par le rappel du « génie français » (barrages, immeubles, etc.) sur une musique enjouée. « Soudain », dit le speaker sur une musique devenue brutalement lugubre accompagnées d'images morbides, « répondant à un signal mystérieux, des fanatiques ambitieux pensent pouvoir détruire la civilisation occidentale, rien de moins, en incendiant des écoles, en brûlant des fermes, des autocars, en tuant ». La musique se fait calme quand il s'agit d'évoquer ceux qui font au contraire « œuvre de compréhension, de tolérance » à travers la « pacification » : les « képis bleus » des SAS. On se focalise sur l'un d'eux qui part en mission : « Son programme : un sourire ; sa signature : une poignée de main ; son cheval de bataille : une jeep ». Le film, après une séquence où le képi bleu débloque une situation dans un village et instaure le dialogue avec la population, déroule alors ses missions traditionnelles : aide aux populations, construction de maisons et de routes, établissement de l'école et du dispensaire, sport, destruction de gourbis, etc. C'est donc l'image la plus favorable de l'armée en Algérie qui est ici donnée à voir au public (y compris pour la « paperasse administrative » montrant sa dépendance civile au GGA), de manière à « ouvrir les yeux » des spectateurs, puisque « deux gouttes de collyre, voici qui vaut mieux que toutes les propagandes pour ouvrir les yeux ». Le film utilise plusieurs officiers, mais sous le même terme de « képi bleu », ce qui donne sa cohérence à la mise en scène d'un chevalier moderne qui, du djebel aux territoires sahariens, « a la baraka », et qui représente « l'action civilisatrice et pacificatrice de la France ». Du fait de la couleur, de la musique et de la mise en scène, il s'agit de l'un des films de propagande les plus aboutis réalisés par le SCA. La question de son « efficacité » reste toutefois complexe à déterminer.