La visite d’Helmut Schmidt au Président François Mitterrand

24 mai 1981
03m 27s
Réf. 00014

Notice

Résumé :
Trois jours après son élection à la présidence de la République française, François Mitterrand reçoit le chancelier de la République fédérale d’Allemagne, Helmut Schmidt. Pour François Mitterrand, c’est la première visite que lui rend un chef d’Etat étranger depuis qu’il a remporté les élections le 21 mai 1981. Cette visite a donc un enjeu très symbolique pour le nouveau Président socialiste : montrer qu’il compte s’inscrire dans la continuité des relations franco-allemandes, malgré l’alternance politique qu’il représente.
Date de diffusion :
24 mai 1981
Source :
TF1 (Collection: JT 20H )
Lieux :

Éclairage

Cet extrait du journal télévisé de TF1 expose l’issue de la rencontre du 24 mai 1981 entre le Chancelier allemand Helmut Schmidt et le Président français nouvellement élu François Mitterrand. En prononçant sur le perron de l’Elysée un compte-rendu de leurs deux heures et demie de discussion, Mitterrand pose un premier acte fort en matière de politique étrangère : cette première visite d’un chef d’Etat étranger, dans un septennat qui inaugure l’alternance dans la Ve République, a une particulière importance politique, médiatique et symbolique.

Dans ce contexte de mai 1981, la continuité des relations franco-allemandes est hypothéquée par des divergences politiques entre les convictions socialistes du nouveau Président français et la politique libérale de l’Allemagne de l’Ouest. De plus, pour Helmut Schmidt, qui entretenait une amitié personnelle avec l’ancien président Valéry Giscard d’Estaing, il lui faut en quelque sorte repartir de zéro avec le nouveau Président. Les deux hommes trouvent néanmoins un terrain d’entente : en matière économique et monétaire d’une part, le Chancelier allemand s’engage à maintenir les taux de change entre le Deutschmark et le Franc dans le cadre du Système monétaire européen (SME) ; dans le domaine de la politique internationale d’autre part, marqué par l’escalade de la crise des Euromissiles qui menace la sécurité en Europe, le Président français soutient la décision d’installer en Europe de l’Ouest des missiles américains Pershing II en riposte aux missiles soviétiques SS-20.

Enfin, François Mitterrand conclut sa rencontre avec le Chancelier en rappelant que si la coopération entre la France et l’Allemagne ne doit pas les isoler du reste de l’Europe, l’entente privilégiée entre les deux pays apparaît toujours aussi fondamentale en ce contexte de Guerre Froide. Pour les médias et l’opinion publique, le message du nouveau Président est donc clair : si les évolutions de la politique intérieure ont conduit à l’alternance au sommet de l’Etat, les priorités de la politique extérieure française n’en connaîtront pas pour autant de modifications majeures.
Alice de Lyrot

Transcription

Présentateur
Le chancelier ouest-allemand Helmut Schmidt aura donc été le premier visiteur étranger venu rencontrer François Mitterrand au Palais de l’Élysée. Au cours de deux heures d’entretien tête à tête, suivi par un déjeuner, les deux hommes d’État ont fait le tour de la situation internationale, des problèmes économiques et des rapports entre l’Allemagne de l’Ouest et la France. À l’issue de cet entretien, le Président Mitterrand a tenu à mettre l’accent sur l’excellente ambiance de ces discussions avec le Chancelier Schmidt, il a rappelé à cette occasion que ce n’est pas la première fois qu’il le rencontrait.
François Mitterrand
J’ai donc simplement réitéré l’importance que j’attachais aux relations confiantes de nos deux pays et des responsables de ces deux pays. Depuis de longues années, l’Allemagne Fédérale et la France entretiennent des relations privilégiées qui n’entendent pas s’isoler du développement général de l’Europe du marché commun, mais qui supposent la discussion de problèmes particuliers de grande importance et qui déterminent pour une part le devenir de la politique mondiale.
Bernard Volker
Monsieur le Chancelier, quelles impressions ramenez-vous à Bonn après votre première rencontre avec le Président Mitterrand ?
Helmut Schmidt
C’était pour moi une satisfaction de rencontrer aussi rapidement, après sa prise de fonction, le nouveau Président français pour un entretien aussi détaillé. Nous nous connaissions déjà. La rencontre d’aujourd’hui a, sans aucun doute, renforcé la conviction avec laquelle j’étais venu ici, conviction que les relations franco-allemandes se développeront et se renforceront encore à l’avenir ; et que nous nous conseillerons et aiderons mutuellement dans tous les domaines de la politique, comme cela a été prévu il y a 18 ans par le Traité de L’Élysée. Donc, continuité de la politique française, sans doute une continuité dans la coopération franco-allemande.
Dominique Bromberger
S’il fallait tirer une leçon de la journée d’aujourd’hui, ce serait sans doute le fait que l’entente franco-allemande n’est pas la propriété des hommes politique mais l’affaire de la France et de l’Allemagne. Certes, François Mitterrand a souligné tout à l’heure, et je le cite, que ces rapports n’entendent pas s’isoler du développement général de l’Europe. Allusion à l’amitié, sans doute à son sens un peu exclusive, que pratiquaient Giscard et Schmidt. Mais dans le même temps, le Président français et le Chancelier Allemand sont tombés d’accord sur toute une série de problèmes. Les euromissiles, il faut rétablir l’équilibre en Europe au niveau le plus bas possible, les politiques économiques et les questions financières. Sans doute, Helmut Schmidt avait-il un petit pincement de coeur tout à l’heure en se rappelant l’époque Giscard, mais un participant au déjeuner de travail remarquait aussi que les deux hommes s’étaient très bien entendus et avaient évoqué ensemble de vieux souvenirs. En somme, les hommes d’État passent mais les nécessités de la politique étrangère demeurent.