Paris-Reims en « bus Macron » : un exemple de la libéralisation des transports
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Depuis le vote de la loi "Macron", les déplacements interrégionaux sont désormais possibles en autocar. Ainsi, en Champagne-Ardenne, des autocaristes proposent des allers-retours entre Paris et Reims. Témoignages de différents acteurs de ce nouveau marché, en concurrence directe avec le rail.
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Date de publication du document :
08 déc. 2021
Date de diffusion :
12 oct. 2015
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Depuis août 2015, et à l’initiative du ministre de l’économie Emmanuel Macron, les compagnies privées d’autocars sont autorisées à offrir des liaisons interrégionales sur le territoire français. Jusqu’à cette date, seul le « cabotage » entre deux villes régionales était légal mais assorti de nombreuses limites. Ainsi, un passager pouvait emprunter le bus pour effectuer un voyage Paris-Strasbourg si le car avait pour destination finale une ville étrangère (Berlin ou Varsovie, par exemple). Mais il n’était pas possible pour une quelconque compagnie de bus d’offrir une liaison Paris-Strasbourg. Cette libéralisation des transports de voyageurs par la route s’inscrit dans un double contexte : la politique européenne des transports et la promotion de la concurrence comme vecteur d’efficacité.
La politique européenne des transports est ancienne. Mais elle accélère nettement avec la mise en place du Marché unique (1992). Ce dernier doit permettre la libre circulation des hommes autant que des marchandises. Jusque-là, et dans de nombreux domaines (ferroviaire, aérien, transport routier, etc.), les transports étaient largement régulés au niveau national et souvent confiés à des monopoles historiques (ex : SNCF en France,). La libéralisation du transport en autocar en France apparaît donc comme un approfondissement de l’espace européen de libre circulation. Elle est relativement tardive en France. L’Allemagne, par exemple, a ouvert son marché dès 2013 et a connu, depuis lors, une forte augmentation de liaisons régulières à bas prix.
Mais l’argument principal est celui des bienfaits de la concurrence, les «cars Macron» agissant aussi bien sur l’offre que sur la demande. Du côté de l’offre : de nouvelles destinations jusque-là non reliées par le train, faute d’infrastructures (rails) peuvent être proposées. La concurrence des cars peut ensuite stimuler les gains de productivité dans les autres modes de transport. Du côté de la demande, le principal attrait est celui du prix : les coûts fixes par voyageur étant souvent plus bas que dans le secteur ferroviaire, le transport par car présente une meilleure compétitivité-prix. Il apparaît donc possible des satisfaire une nouvelle clientèle moins soucieuse de la durée de trajet que du coût du billet. Ensuite, les voyageurs peuvent espérer des services complémentaires à bord.
La France dispose effectivement d’un réseau routier dense et bien entretenu. Pourtant le transport par autocar sur longue distance y demeure largement sous-développé en comparaison d’autres pays de l’UE. En 2015, le transport par car représentait déjà près de 5% des voyages de longue distance en Suède et au Royaume-Uni, contre seulement 0,0005% en France. Au total, le ministre Emmanuel Macron promet, au moment du vote de la loi, des prix 8 à 10 fois inférieurs aux billets de train pour les consommateurs. Il évoque également plus de 22 000 emplois potentiels.
Les débats sont pourtant nombreux au moment du lancement des « cars Macron ». En premier lieu, le transport des voyageurs par route peut sembler en contradiction avec les objectifs aussi bien nationaux qu’européens de réduction des émissions de gaz à effet de serre et de la pollution. Le « bilan carbone » rapporté à chaque voyageur n’est pas nécessairement positif. En second lieu, la mise en concurrence du rail et de la route s’effectue au moment où l’on envisage la fermeture des lignes ferroviaires dites « secondaires », dont l’entretien a été négligé au profit des liaisons grande vitesse. En troisième lieu, la rentabilité des lignes n’est aucunement garantie, si le taux de remplissage n’est pas suffisant. Le marché, de concurrentiel, peut donc rapidement devenir oligopolistique, voire quasi-monopolistique comme le montre le cas allemand (où l’opérateur Flixbus domine désormais sans partage).
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Le reportage a été diffusé sur France 3 Champagne-Ardenne. Réalisé en octobre 2015, soit trois mois après l’adoption de la loi Macron libéralisant le transport interrégional par cars, il donne la parole aux différents acteurs de ce marché : les clients mais aussi les porte-parole ou les PDG de compagnies de transport. Il s’agit donc, en partant d’un exemple concret - la liaison Reims-Paris par autocar - d’illustrer les premières conséquences de la loi d’août 2015 donnant naissance aux « bus Macron ».
Le document débute par la description de la nouvelle liaison Reims-Paris assurée par le géant allemand du transport par autocar, Flixbus. Il montre que la loi permet désormais aux prestataires de multiplier les arrêts entre villes françaises, là où le cabotage était préalablement fortement encadré. La liaison Francfort-Paris était ainsi déjà proposée par la compagnie mais la nouvelle législation lui permet désormais de prendre des passagers de Reims jusqu’à Paris.
Le journaliste rend compte de la satisfaction des consommateurs à travers quatre micro-trottoir (le côté "demande" du marché). Tous mettent en avant le prix attractif, le coût d’un billet pouvant être deux à cinq fois inférieur à celui d’un voyage SNCF (entre 9 et 19 euros en moyenne contre un tarif pouvant atteindre 50 euros pour le train). Mais d’autres aspects apparaissent : la qualité des prestations offertes, des horaires plus adaptés aux déplacements, ou la sécurité, relativement à un déplacement personnel réalisé dans son propre véhicule. La compétitivité-prix, largement soulignée par le ministre Macron lors de son argumentation en faveur de la loi, est donc renforcée par des considérations de confort ou de qualité (compétitivité hors-prix). Les clients mettent donc en avant qu’une durée de trajet plus longue (2h par le car contre 45 minutes par le TGV) peut aisément être compensée par d’autres avantages.
La parole est également donnée aux représentants des compagnies de transport (le côté "offre" du marché). Il est clairement signifié que les grandes compagnies ont eu la possibilité de proposer rapidement des liaisons. Flixbus est déjà le leader incontesté du marché allemand et on évoque l’arrivée prochaine du « géant français », Isilines (racheté finalement par Flixbus en avril 2019). Pour contrecarrer l’avantage comparatif du train en termes de durée, le porte-parole de la communication Flixbus-France insiste sur les éléments de compétitivité hors-prix proposés (wifi, « snacking », confort des sièges, etc.). Mais on peut également entendre le témoignage du directeur général d’une entreprise ardennaise Jacqueson Tourisme, qualifiée de « régionale de l’étape ». Celui-ci indique l’intérêt de ce nouveau marché, sur des distances moyennes, potentiellement plus rentables que des destinations de proximité ou internationales. Il évoque une stratégie fondée sur des horaires adaptés (ciblage d’un segment de clientèle). La possibilité pour des compagnies de moindre de taille de tirer leur épingle du jeu sur des « niches » est à l’époque encore défendue (il ne reste plus que deux opérateurs significatifs sur le marché français en 2020).
Le journaliste souligne que l’offre pourrait s’enrichir de nouveaux acteurs mais aussi de nouvelles liaisons comme un Troyes-Paris. Il insiste également sur l’absence de réponse de l’opérateur historique SNCF directement affecté par cette nouvelle concurrence et qui n’a pas alors développé de stratégie alternative.
On peut remarquer que le reportage met clairement l’accent sur les aspects positifs de la loi et ne fait qu’évoquer la « fameuse loi Macon », sans plus de précision. Ainsi les débats relatifs au coût écologique, à la concurrence faite au covoiturage, aux questions de sécurité (les accidents de cars étant plus fréquents que les accidents ferroviaires) ou au possible abandon de lignes SNCF encore moins rentables ne sont pas directement abordés.
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